Chapitre 4

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Son visage souriant est là, à quelques mètres de moi, ses yeux rieurs me fixent, me narguent. J'ai l'impression d'entendre son rire résonner dans les couloirs du lycée, de nous revoir tous les cinq, il y a un an jour pour jour, fouler le sol de cet établissement pour la première fois, heureux, fiers. Aujourd'hui, il n'y a plus que moi et sa photo sur ce qui était encore son casier il y a quelques mois. Un casier couvert de mots de nos camarades et de fleurs. Un casier transformé en lieu de recueil pour toutes les personnes qui l'aimait. Un casier que je ne suis plus en mesure de regarder sans que mon cœur me menace de quitter ma poitrine, sans que mes yeux ne se brouillent sous les larmes, sans que mon être tout entier se mette à trembler. Et pourtant, je reste là. Je ne bouge pas, malgré les chuchotements, malgré les murmures, parce que tout ça me semble trop irréel pour que je puisse y croire. Parce que j'espère encore sentir ses mains s'enrouler autour de ma taille et me demander comment s'est passer la fin de mes vacances.

Mais ça n'arrivera plus jamais.

La sonnerie annonçant le début des cours retentit et c'est l'effervescence autour de moi. Les nouveaux cherchent leur chemin, les anciens se précipitent en direction de leur classe, puis il y a cette main qui apparaît et s'agite dans mon champ de vision, suivi d'un ricanement qui me fait sursauter.

« – Est-ce que tu pourrais bouger de là, gamine ? »

Je n'aime pas la façon dont il m'adresse la parole et encore moins le côté hautain qu'il se permet d'employer avec moi. Si, en temps normal, je me laisse difficilement marcher sur les pieds, aujourd'hui, je n'ai ni la force ni le courage de lui exprimer le fond de ma pensée et encore moins de le remettre à sa place. Je sèche les larmes qui viennent de naître dans le coin de mes yeux et me décale sur le côté, balbutiant quelques excuses incompréhensibles.

« – On ne m'avait pas dit qu'en récupérant le casier du macchabée, j'aurais également le droit à sa pleurnicharde de petite-amie. »

Ses paroles me font le même effet que plusieurs coups de couteaux en plein cœur. Je sens la colère me gagner petit à petit et j'en oublie que, quelques secondes auparavant, j'avais décidé de m'écraser.

« – Tu viens de dire quoi là ?

– Pleurnicharde et sourde, en plus de ça. J'ai vraiment touché le pactole, raille-t-il, moqueur. »

Je n'ai plus qu'une seule envie, lui faire ravaler son arrogance, sa fierté mal placée et son insolence. Le poing serré, je dois faire preuve d'un immense sang-froid pour me retenir de lui refaire le portrait. Et ce n'est pourtant pas l'envie qui m'en manque.

« – Connard..., je marmonne. »

Ses muscles se tendent, son regard jusqu'à présent sarcastique s'emplit d'une telle noirceur que, surprise par ce changement si brutal, je recule, mettant de la distance entre lui et moi. Distance qu'il finit par briser en s'approchant pour venir murmurer contre mon oreiller :

« – Je connais ton petit secret, Grimm. À ta place, j'éviterais de trop faire la maligne en ma présence, tu pourrais amèrement le regretter. »

Alors qu'il termine d'énoncer sa menace, un long frisson d'incompréhension et d'appréhension parcours mon échine. Il y a quelque chose qui cloche. Comment peut-il connaître mon nom alors qu'on ne s'est jamais croisé avant aujourd'hui ? Et de quel secret peut-il bien parler ? Je n'ai rien à cacher, du moins rien d'assez gros pour qu'on puisse s'en servir contre moi. Tout ça, ça ne tient pas la route et pourtant, j'ai l'intime conviction qu'il est sérieux, qu'il connaît quelque chose que moi-même, j'ignore...

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 16, 2020 ⏰

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