CHAPITRE II-1

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CHAPITRE 2 - 010975

Les deux gardes qui m'escortent me tiennent les bras tellement serrés que rapidement des picotements commencent à les parcourir. Cela n'a pris que cinq minutes pour atteindre le bureau du directeur en chef. Pourtant, quand un des gardes a cogné, la porte est restée fermée. On m'a alors simplement indiqué de m'asseoir et d'attendre. Les deux gardes étaient allés se poster à l'entrée de la salle d'attente et ne bougeaient plus.

Je ne sais pas combien de temps j'ai patienté, mais quand la porte du bureau s'ouvrit j'ai remarqué que mes mains étaient rendues toutes moites et que je tremblais légèrement. De peur? Je ne le sais pas.

J'entre dans la pièce. Les murs autour de moi sont tous gris, pas foncés, mais plutôt comme la couleur du ciel juste avant la pluie. Assis derrière son bureau se trouve un homme massif à l'air intimidant. Il porte l'habit orange brûlé classique des dirigeants. J'ai immédiatement deviné que c'est à lui que je vais avoir affaire.

En ce moment, mes chances de sortir indemne de ce bureau se résument à 0.

Plutôt, mes mains étaient moites, maintenant je sens une goutte de sueur longer ma nuque. Je sais que j'ai commis un grand nombre de fautes et celles-ci sont toujours gravement punies.

L'homme qui se tient de façon imposante enlève ses lunette, les pose sur la surface de son bureau et me fixe un court instant. Enfin il m'adresse la parole:

« —010975, on m'a prévenu aujourd'hui que vous avez enfreint plusieurs de nos lois, dans cet établissement, qui bien évidemment est sous ma surveillance. Tout d'abord, vous n'avez pas porté attention à une personne qui vous parlait. Ensuite, vous avez couru sans que cette action ne soit faite dans un cadre sportif et j'en passe. Cela me semble bien étrange qu'une personne comme vous, qui est d'habitude si calme et n'a aucune tendance rebelle, commette en si peu de temps autant d'erreurs. Qu'avez-vous à dire pour votre défense? »

Je ne réponds rien. Parfois, le silence vaut mieux que de s'enfoncer dans ses propres mots. Le directeur repris de plus belle:

« Je vois, vous n'avez donc pas l'amabilité de me répondre? Eh bien, étant donné que je trouve très étrange de votre part d'agir ainsi, je me suis permis d'aller voir vos informations dans les archives. J'ai alors découvert qu'à ce jour, vous n'avez jamais commis d'infraction. Donc, j'ai pris une décision. Cette petite rencontre restera entre nous, mais la prochaine fois que vous commentez une erreur, le Système répondra à vos actes sans hésitation. Ai-je été bien clair? »

Je hoche la tête, légèrement sous le choc. Le Système n'est habituellement pas flexible. En fait, il ne l'est jamais! Une erreur et c'est la fin. D'après ce que j'ai constaté, les gens qui sont fautifs sont amenés dans un centre de discipline, rares sont ceux qui en reviennent (personne n'en revient).

Après un petit moment de silence, le directeur me tend la main, je la serre et je quitte d'un pas régulier, mais surtout calculé. Quand je sors du bureau, la salle d'attente est vide. C'est la même chose pour le corridor par lequel je suis arrivée.

Je me dirige vers mon casier pour y récupérer un manteau et un sac dans lequel on m'a indiqué d'y déposer les devoirs que je dois faire avant la veille. Ensuite, je marche, alors, vers la sortie de l'institut d'éducation.

Je n'ai pas remarqué qu'il était rendu si tard, le ciel est mauve foncé avec une légère touche de rose. Il n'y a presque plus personne dans les rues, ce que je trouve plutôt étrange jusqu'à ce que je passe à côté de la place centrale. Au milieu de celle-ci trône une grande horloge, il est déjà 18: 30: 07. Le couvre-feu sonne dans moins de 30 minutes. Je dois me dépêcher pour ne pas arriver en retard. Habituellement, je prends les trains sous-terrains, mais à cette heure il n'y en a plus qui passent. Je porte à mon oreille une oreillette et demande au Système si je peux emprunter un chemin différent de celui que j'emprunte d'habitude. Rapidement, une conseillère me donne l'autorisation de prendre un chemin différent. Techniquement, si je tourne dans la rue qui se trouve à ma gauche, j'arriverai plus tôt à mon immeuble familial.

C'est comme ça que ça marche dans le Système. Il faut respecter le protocole qui nous est attribué depuis notre naissance. Si jamais il faut faire quelque chose de différent, nous possédons tous une oreillette et nous devons demander la permission de dévier de nos instructions. Ainsi, l'ordre parfait régnait et une société parfaite existait.  Le Système est guide, le Système est juste, le Système est bon et je crois au Système.

La grande horloge indique maintenant 18: 34: 56. Je dois me dépêcher, je prends d'un pas décidé le chemin qui se trouve à ma gauche. C'est la première fois que je passe par là. Le décor est mignon avec des petits commerces et des insignes illuminés au-dessus de chacun d'entre eux, projetant une douce lumière sur la rue.

Parvint doucement à mes narines une douce odeur de pain en cuisson. Je regarde à ma droite pour voir que je suis en train de marcher à côté de l'usine de production de nourriture. Cela veut donc dire que demain, il y aura du pain pour déjeuner, peut-être pour faire des tartines. Peut-être y aura-t-il aussi de la confiture à la framboise ou même du beurre de chocolat aux noisettes. Bien que cette dernière option est plutôt rare.

Mon ventre gargouille, me ramenant à la réalité. Pendant que j'étais plongée dans mes pensées, je n'ai pas remarqué qu'un bourdonnement se faisait entendre derrière moi. Lentement, je me retourne pour voir une petite lumière rouge clignoter dans le ciel. C'est de là que provient le bruit. Je plisse un peu les yeux pour afin de découvrir que depuis mon départ de l'institut d'éducation je me fais suivre par un drone.

Étrange, je n'ai vu ceux-ci que dans mon cours de technologie. Dans ce cours, nous avons appris qu'on utilise cet objet afin de surveiller des citoyens qui sont instables. Je ne suis pas instable! Je ne comprends pas pourquoi ce drone est là. Est-ce que je suis en train de me faire suivre par une de ces personnes?

Je commence donc à marcher d'un pas beaucoup plus rapide, pour finalement me mettre à courir. Je sais que c'est illégal, mais si je vais me faire tuer par une personne instable, je préfère courir et sauver ma vie. La panique prend de plus en plus de place dans mon esprit, car le bourdonnement me suit toujours.

Pourtant quelque chose me saisit le poignet et me tira dans l'ombre. Me cachant ainsi du drone.

Projet LibertéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant