Quand l'amour de vivre disparaît, aucun sens ne nous console.

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Louis aimait Harry bien plus que Harry ne le faisait. En tout cas, que ce qu'il montrait. Quand ils se promenaient, Harry lâchait parfois la main de Louis sans même y penser, alors que Louis, il voyait Harry comme un ballon. Un ballon qui s'envolerait. Un ballon qu'il n'arriverait jamais à rattraper. Quand ils passaient un moment d'amour ensemble, le soir, quand ils arrivaient à se voir, Louis était toujours celui qui écoutait les ronflements de l'autre, capturant son propre sommeil à lui. Il ne fermait l'oeil qu'au bout d'une ou deux heures, le temps de redessiner les courbes d'Harry en prenant soin de ne jamais le réveiller. La première fois que Louis a rencontré les parents d'Harry, il n'a même pas pris le temps de le présenter, il a dû le faire lui-même avant d'être impoliment emporté par une foule de baisers et une paire de mains qui s'agrippait à ses hanches pour le faire comprendre que, tout ce qu'il désirait, c'était de les faire rouler son contre corps. Harry, il était comme ça. Il disait que la vie était assez nulle pour qu'il se prive en plus de la seule chose qui le rendait vraiment heureux. Il aimait faire l'amour jusqu'au matin, arriver au lycée fier de ce que cette courte nuit et Louis avaient laissés marquer sur son visage. Harry, il n'était tellement pas comme les autres, que Louis se demandait bien comment il avait pu ne pas le voir. Pourtant ils s'étaient rencontrés dans un contexte banal. Un rassemblement d'élèves pour parler de l'homosexualité qui révoltait la moitié du pays à cette époque. Louis s'était levé pour affirmer qu'il n'y avait aucune inégalité à avoir, entre rien ni personne, et Harry s'était levé à son tour pour le soutenir. Certes, pas que lui. Mais Louis, il n'avait vu qu'Harry. Ses boucles brunes dans le fond de la salle, une confiance en lui surprenante, ses bras croisés sur son torse. Harry était en classe général. Louis, lui, il savait très bien ce qu'il voulait faire et comment il voyait sa vie. Il voulait devenir un professionnel du football, espérer trouver un compagnon qui aurait un travail stable, avoir des enfants, une maison, deux voitures, un chien, et même un chat. En attendant, il aurait aimé trouver un petit-ami pour se sentir moins seul, même s'il n'y pensait pas forcément. Mais il était tombé sur Harry. Ou plutôt, il était tombé amoureux d'Harry. Ça a foutu son idée de vie en l'air, parce que quand on est amoureux, on s'imagine que ça va durer pour toujours. Harry le soutenait dans le football, c'était d'ailleurs sa manière à lui de lui montrer qu'il l'aimait, autrement qu'en lui offrant du plaisir ; aux entraînements, il venait toujours hurler pour encourager Louis et ses fesses bien rondes, aussi. Ça faisait en rire certains, d'autres le trouvaient complètement idiot. Évidemment qu'il l'était. Harry il s'en fichait. Il se fichait de tout, il était bien là le problème. Harry n'allait jamais avoir un travail stable, il détestait l'idée. Il disait qu'avoir des enfants était le pire acte d'égoïsme qu'il connaissait, mais ça ne comptait pas pour eux, puisqu'ils auraient adoptés. Mais Louis, il voyait ça comme un refus. Harry ne voulait pas de maison avec qui que ce soit, peut-être qu'il aurait pris un chien s'il n'avait pas eu Louis, mais certainement pas un chat, parce que ça lui provoquait des allergies. Harry, il passait son temps à rejeter la vie, alors que, comme un boomerang, elle revenait vers lui, un peu plus violemment à chaque fois.

Louis aimait Harry bien plus que lui n'aimait sa propre personne. Harry n'aimait pas grand monde, mais un peu avant la vie, la personne qu'il détestait le plus, c'était lui. Il ne le faisait pourtant pas montrer, comme tout le reste. Il ne mâchait juste pas ses mots quand on lui demandait. C'était comme ça que Louis avait découvert qu'il était comme un pansement pour Harry, même si la plaie était bien trop grande. Il ne servait qu'à apaiser les choses avec lesquelles il était forcé de vivre. Harry, il détestait la société. Il aurait pu être un terroriste, si tuer une mouche ne l'aurait jamais rendu triste. Ils étaient en train de regarder un film dans la chambre de Louis. Ce dernier avait essuyé les larmes de ses yeux discrètement alors qu'Harry s'était mis à gigoter quand ça commençait à devenir triste. Il embêtait Louis, par-dessous son t-shirt, pour le caresser et mordiller sa peau. Louis déposait des baisers sur son oreille pour qu'il le laisse tranquille, sans pour autant le repousser. Ça avait fonctionné, le temps de la fin du film. À peine le générique avait démarré que Louis s'était retrouvé sous le poids du corps d'Harry pendant qu'il s'agrippait à l'élastique de son jogging. Il se moquait gentiment des joues humides de Louis. Cette pauvre fille venait quand même de perdre ses parents, son frère, et avait décidé de continuer à vivre. Louis, il savait que c'était une mauvaise idée, mais il a quand même demandé à Harry ce qu'il aurait fait, lui.

              Une occasion pareille, je ne la laisse pas passer. Je ne reste pas, c'est certain.                    Il avait dit le plus normalement du monde, alors que les yeux de Louis se remettaient à briller. Les lèvres d'Harry étaient déjà plongées sur sa peau, comme s'il n'y avait rien de contrariant à ce qu'il venait de dire. Alors Louis s'était contenté de passer ses doigts dans les cheveux d'Harry et l'avait laissé lui faire l'amour, puisqu'il n'y avait que comme ça qu'il pouvait vraiment se rassurer, en sentant que, quand même, Harry l'aimait.

Tout le monde savait qu'Harry voulait mourir. Ça n'avait rien de suicidaire. Il n'avait pas envie de se blesser volontairement, ni de prendre des gélules par dizaine pour contrarier son organisme. Il se fichait juste de la sensation qu'une cigarette pouvait lui apporter en brûlant sa peau, il aurait pu rester en milieu d'une autoroute sans être terrorisé de pouvoir être emporté à tout moment par n'importe quel engin roulant à plus que 130km/h. Il n'avait pas peur de marcher sur le bord des toits des immeubles, ou même de s'aventurer dans des maisons abandonnées au passé terrifiant. Rien ne l'effrayait plus, parce que la vie le faisait déjà secrètement bien assez.

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