Neville Londubat : Le destin d'un élu

La décision du Choixpeau

Quand le Poudlard Express atteignit la gare de Pré-au-Lard et que tout le monde eut revêtit sa robe de sorcier, ce fut un nouveau bain de foule pour les deux compères. Ils descendirent du train avec autant de difficultés qu’il n’en avait à tirer chacun leur lourde malle. Les plus grands jouaient des coudes pour rejoindre la sortie la plus proche, eux, devaient se contenter de suivre le flot des élèves majoritairement plus grands et plus âgés. Ils parvinrent finalement à sortir du train magique et se retrouvèrent donc sur le quai. C’était le moment que redoutait Neville et dont il avait rejeté les pensées à plusieurs reprises durant leur voyage. Cependant, à sa grande surprise, les regards alentours ne le suivirent pas lors de sa progression sur le quai. Quant aux murmures créé habituellement par son passage, ils se faisaient nettement moins entendre qu’à l’accoutumée. Se faisant ces réflexions, il avançait, sans but mais trop vite pour Harry qui était plus frêle et peinait plus que lui à tirer sa malle. Soudain, une voix rauque, puissante et impressionnante s’éleva du bout du quai le plus proche de Neville.
- Bon, je vois que tout le monde est descendu. Très bien, les premières année, venez par ici. Allez dépêchons !
  L'homme qui ne se tenait qu’à quelques enjambées de Neville était impressionnant. Il mesurait sûrement plus de deux mètres cinquante et était large comme au moins trois ou quatre élèves du petit groupe intimidé qui se formait devant lui. Cependant, un sourire bienveillant que sa barbe hirsute et très fournie ne parvenait pas à dissimuler lui donnait un air plutôt accueillant finalement. Nul doute pour Neville, cet homme là, c’était un demi-géant. Il fit part de cette information à Harry avec beaucoup d'enthousiasme. Celui-ci écarquilla des yeux encore plus grands en entendant cela.
- Seulement un DEMI-géant tu es sûr ? Tu as vu ce colosse ? Il doit mesurer au moins trois mètres ! murmura Harry de peur d’être entendu
- Mais non, les plus petits géants sont au moins deux fois plus grands que lui. Moi je trouve qu’il a l’air gentil.
- Moi j’éviterais de m'y frotter quand même, marmonna pour lui-même le jeune sorcier aux lunettes rondes.
  L'homme attendit patiemment que tous les élèves hormis les premières année aient libéré le quai pour s’adresser à son public.
- Bonsoir à tous, tonna-t-il de sa voix forte. Je m’appelle Rubeus Hagrid, gardien des clés et des lieux à Poudlard et garde-chasse de l’école. Lequel d'entre vous puis-je manger le premier ? lança Hagrid.
  Le petit groupe eut un léger mouvement de recul jusqu’à ce que Hagrid émette un petit ricanement qui se voulait rassurant.
- Je plaisante les enfants, je plaisante. Je serai votre guide pour la traditionnelle traversée en pirogues du lac noir qui signera officiellement votre entrée à Poudlard !
  Le ton très solennel employé par Hagrid, loin d’être naturel, faisait plus penser à un élève moldu à qui on a demandé d’apprendre une poésie par cœur. Ce contraste finit de détendre l’atmosphère dans la petite assemblée et maintenant, chacun écoutait avec attention le demi-géant.
- Vous allez vous répartir par petits groupes de trois s’il vous plaît. Vous êtes quarante-cinq nouveaux élèves pour seize pirogues . Comprenez bien que je dois venir aussi.
  Harry et Neville se regardèrent instinctivement avec la même pensée, eux seraient tous les deux mais qui serait la troisième personne à partager leur pirogue ? Après tout, ils s’en fichaient bien et ce fût finalement une fille avec de longs cheveux blonds foncés qui s’avança vers eux. Ses yeux grands ouverts en permanence, lui donnaient un air légèrement étonné. Ses sourcils étaient très clairs, beaucoup plus que ses cheveux, et son petit nez très fin et très petit à côté de ses yeux finissait de la faire paraître ahurie.
- Bonjour, vous n’êtes que tous les deux ?
- Ou.. oui bredouilla Harry. Si tu veux, tu peux venir avec nous.
- C’est très gentil merci beaucoup Harry Potter.
- Tu… tu connais mon nom ?
- Bien sûr ! Et toi, tu es Neville Londubat, déclara-t-elle pleine d’assurance en se tournant vers Neville.
  Cette assurance, qui contrastait beaucoup avec l’air surpris de la jeune blonde, prit Neville de court.
- Oui c’est moi, se contenta-t-il de répondre.
- Tu as été très courageux tout à l’heure sur le quai. Je suis admirative.
- Euuuuh merci… mais dis nous, toi tu es… ?
- Luna ! Luna Lovegood.
  Cette fille avait le don pour rendre l’atmosphère étrange, presque pesante. Son côté lunaire aurait pu mettre mal à l’aise n’importe qui et ce fût finalement Harry qui brisa le silence qui s’était installé.
- Et bien Luna Lovegood, c’est avec un grand plaisir que nous t'invitons dans la cercle très fermé de la pirogue de Neville et Harry !
  Il avait dit ça d’une telle manière que l’on ne pouvait s’y tromper. Harry avait voulu imiter Hagrid. Mais son échec eut pour effet immédiat de métamorphoser le visage de la jeune fille aux cheveux blonds. En fait, quand elle souriait, elle paraissait même normale finalement.

  Le petit groupe, guidé par le gigantesque garde-chasse, finit par prendre la direction du fameux lac noir sur lequel des pirogues magiques les attendaient déjà tous. La traversée se fit dans un silence d’émerveillement total. Depuis le lac, le château semblait les dominer de toute sa splendeur et de son vécu. Les fenêtres illuminées semblaient par endroits flotter dans un océan d’étoiles et l'ombre a peine perceptible des contours du château lui donnait un air de puissance fantomatique à couper le souffle. Tous les élèves restèrent silencieux pendant la traversée, sans voix devant ce spectacle magnifique auquel ils assistaient. Ils finirent par accoster sur la rive et Hagrid guida le groupe jusqu’à l’intérieur du château. Le hall, immense, était lui aussi impressionnant tout en procurant un sentiment nouveau de sérénité. Ils poursuivirent leur chemin jusqu’à arriver devant une gigantesque porte close derrière laquelle régnait un brouhaha digne des plus grandes réceptions. Hagrid ne s’arrêta pourtant pas devant et leur fit tourner les talons vers la droite où il ouvrit une autre porte, nettement moins imposante. Il les fit entrer, leur donna quelques directives puis disparut. Après quelques minutes passées à attendre, les élèves commençaient à  s’impatienter légèrement et des petits groupes commencèrent à discuter. Neville savait  très bien ce qui les attendait maintenant. Un professeur allait finir par ouvrir cette porte et les emmènerait dans la Grande Salle, devant laquelle ils venaient de passer, où le fameux Choixpeau magique les répartirait un à un dans les différentes maisons. Les choses sérieuses allaient vraiment commencer et Neville paraissait plus déterminé que jamais. Harry, impressionné par le mutisme et la concentration de son ami, n’essaya même pas de détendre l’atmosphère comme à son habitude et préféra lui aussi demeurer dans le silence. Luna, elle, ne semblait pas réellement être à ce qu’il se passait dans la pièce. Son esprit avait l’air d’avoir momentanément quitté son corps pour vagabonder tout seul et son visage affichait à nouveau cet air ahuri qu’elle avait si souvent. Comme l’avait pensé si justement Neville, la porte finit par s’ouvrir de nouveau. Une femme entra vivement dans la petite salle de classe où ils se trouvaient tous. Elle avait un air sévère, les cheveux tirés vers l’arrière en un chignon bien serré sur lequel venait se poser un petit chapeau pointu aussi droit que sa propriétaire. Lorsqu’elle prit la parole, personne ne fût surpris d’entendre un ton ferme et autoritaire.
- Bonjour les enfants. Bienvenues à Poudlard. Je suis le professeur Minerva Mc Gonagall. Entrons directement dans le vif du sujet. Comme vous le savez sûrement, notre prestigieuse école est divisée en quatre maisons. Elles ont pour noms Poufsouffle, Gryffondor dont je suis la directrice, Serdaigle et Serpentard. Ce soir vous allez tous intégrer l’une de ces quatre maisons. Elle sera la vôtre pour le restant de vos études à Poudlard alors vous avez tout intérêt à considérer votre maison, ainsi que ses membres, comme une seconde famille. Maintenant que les choses sont claires, je vais vous énoncer un à un quelques-uns des points les plus importants du règlement de l’école. Le règlement au complet sera affiché dans vos dortoirs. Ensuite, vous viendrez avec moi dans la grande salle, où le reste des élèves ainsi que des professeurs vous attendent déjà.
  Le professeur déroula un rouleau de parchemin et après une dictée interminable de quelques points du règlement, la majorité des élèves avaient cessé d’écouter et avaient le regard aussi vide que pouvait l’être celui de Luna. Apparemment coutumière de ce genre de réaction, le professeur Mc Gonagall fit jaillir quelques éclairs bleus de sa baguette magique et, d’un coup d'un seul, regagna toute l’attention de son auditoire. Même Luna paraissait attentive désormais. Neville, lui, semblait de plus en plus concentré et déterminé. Il n’avait jamais eu l’air aussi sûr de lui qu’à ce moment précis.
- Maintenant que nous avons pu faire le point, j’imagine que vous avez tous hâte de découvrir qui seront vos nouveaux camarades. Alors, suivez moi.
  Mc Gonagall prit donc la tête du cortège et mena les première année jusqu’à la Grande Salle. Arrivés devant la majestueuse porte en chêne massif, celle-ci s’ouvrit toute seule, sans le moindre grincement, comme si elle ne pesait rien. Certain ne purent s’empêcher d’exprimer leur admiration en découvrant le décor qui les attendait. Quatre tables s’étendaient devant eux. Des tables d’une longueur impressionnante au-dessus desquelles flottaient des centaines de bougies qui plongeaient la grande salle dans une lumière chaleureuse et accueillante . De même, des centaines de paires d'yeux étaient maintenant braqués sur le petit groupe qui donna l’impression de se resserrer sur lui-même. Les première année, toujours guidés par Mc Gonagall, s’avancèrent timidement et parcoururent toute la longueur de la grande salle sous le regard inquisiteur de l’ensemble des élèves. Ils finirent par arriver devant la table des professeurs et comment ne pas reconnaître l’un d’entre eux ? Ses petites lunettes en demi-lune posées tout au bout de son nez aquilin, cette longue barbe blanche si caractéristique. Albus Dumbledore trônait fièrement au milieu de ses collègues. Neville était en admiration. Le célèbre directeur de Poudlard, l’un des plus grands sorciers de tous les temps, le seul qui était parvenu à tenir tête à Voldemort en combat singulier, se tenait là devant lui. Son esprit fit un bond dans sa boîte crânienne lorsqu’il se rendit compte que Dumbledore le regardait fixement, droit dans les yeux. Il ne put s’empêcher de remarquer l’intensité du regard bleu perçant que lui lançait le vieux sorcier et malgré toute sa volonté, il finit par détourner le regard. Celui-ci tomba sur Harry qui semblait ne plus tenir en place. Neville décida de le laisser à son excitation et à nouveau, un masque de détermination apparut sur son visage qui se ferma au reste du monde.

Mc Gonagall, qui avait brièvement disparu  était maintenant revenue avec le mythique Choixpeau magique. Elle expliqua rapidement comment tout cela allait se dérouler et sortit un nouveau rouleau de parchemin qu’elle déroula. Un à un, elle appela les élèves et commença à les placer chacun leur tour sous le Choixpeau magique. Neville remarqua plusieurs réactions de la part de ses camarades, que ce soit à l’appel de leur nom ou suite à la décision du Choixpeau. Mais il s’en moquait bien. Il attendait son tour et quand celui-ci arriva, il s’avança d’un pas décidé vers le tabouret où les élèves qui l’avaient précédé avaient appris leur appartenance à telle ou telle maison. Il décida d’ignorer la clameur générale provoquée par l’appel de son nom ainsi que tous les regards soudainement fixés sur lui. Il s'installa et le professeur Mc Gonagall déposa l'objet magique sur sa tête. Neville ne s’y attendait pas, mais à ce moment là, une voix qui n’était pas la sienne et sur laquelle il n'avait aucun contrôle, se mit à lui parler dans sa tête.
- Tiens, tiens, tiens… Londubat. Alors voyons voir. Hum, pas évident tout cela. C’est même très difficile. Je vois là beaucoup de fierté mais également du courage. De l’ambition aussi, du talent et … ho ! Un désir de vengeance très prononcé . Mon garçon la vengeance est un moteur dangereux.
Alors… où vais-je te mettre, je ressens ta préférence. Tu voudrais aller à Gryffondor, mais je pense que pour toi il vaut mieux… SERPENTARD !
  Neville entendit avec stupeur le dernier mot résonner en écho dans la Grande Salle. Comment le Choixpeau avait-il pu l’envoyer à Serpentard ?! Ce n’était pas possible ! Après quelques secondes d’incompréhension totale pour la quasi-totalité des élèves, une clameur s’éleva de la table la plus à droite drapée des couleurs vert et argent si caractéristiques de sa nouvelle appartenance. Il se dirigea donc vers cette table les bras ballants, encore sous le choc de ce qu’il était entrain de vivre, ignorant même les claques amicales de ses nouveaux camarades. Serpentard… Neville avait le sentiment de vivre un cauchemar…