Oui, je suis un Serpentard

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Plusieurs jours s'étaient écoulés depuis la cérémonie de la répartition, mais Neville ne parvenait toujours pas à encaisser le choc. La désillusion qu'il avait vécu faisait maintenant place à une frustration grandissante qu'il ne parvenait pas à maîtriser. D'ailleurs, il ne se gênait pas pour le faire ressentir et, de par ce fait, il se retrouvait esseulé dans le dortoir des première année vert et argent.
Trop centré sur sa propre assignation, il n'avait appris que récemment lors d'un cours d'histoire de la magie en commun, que Harry, lui, avait été envoyé à Gryffondor. Luna elle se retrouvait à Serdaigle et le seul cours qu'il avait avec elle était le cours de sortilèges, le jeudi après-midi. Ce cours était dispensé par le professeur Flitwick. Sa toute petite taille caractéristique le forçait à escalader une pile de livres pour que l'on voit dépasser le bout de son front de derrière son bureau. Ce jeudi, le professeur Flitwick entreprit de leur enseigner un sortilège on ne peut plus basique, le sort de lévitation. De sa petite voix fluette, il s'appliqua à leur donner des consignes aussi précises que possible.
- La base de la connaissance magique pour chaque sorcière et chaque sorcier est la lévitation ; ou la capacité de faire voler des objets. Il s'agit là d'un des passes-partout du sorcier, un sortilège du quotidien. Pour y arriver, vous devrez prononcer l'incantation suivante. « Wingardium Leviosa". Dans le même temps, vous effectuerez un léger moulinet avec votre baguette puis donnerez un coup sec vers le bas. Des questions ?
Le mutisme de l'assemblée sembla suffire au professeur.
- Dans ce cas, allez-y ! S'exclama Flitwick de sa petite voix haut perché.
- Wingardium Leviosa ! Lança la classe entière dans une cohue indescriptible.
Chacun tentait tant bien que mal de faire planer la plume blanche placée devant eux sans y parvenir. Luna, qui s'était mise d'office en duo avec Neville, n'avait pas franchement plus de réussite que ses camarades.
- Tu ne veux pas essayer Neville ? Moi je trouve ça plutôt amusant !
- Non merci Luna, exerce-toi, moi je le connais déjà ce sortilège...
- Alors tu n'as qu'à me montrer !
Face à l'enthousiasme de son amie, Neville finit par se laisser prendre au jeu. Il sortit sa baguette magique, la pointa sur la plume et, dans un mouvement du poignet qui n'avait rien à envier à celui du professeur, prononça la formule magique d'un ton assuré.
- Wingardium Leviosa.
Évidemment, la grande majorité de la classe fût stupéfaite de voir la plume de Neville s'envoler de plus en plus haut au-dessus de leurs têtes. Certains, les plus enthousiastes, échappèrent même un léger cri de surprise ou émirent de brefs applaudissements d'excitation. Le professeur Flitwick ne manqua pas non plus de réagir.
- Oh ! Bravo monsieur Londubat ! C'est fantastique ! Dix points pour Serpentard.
Neville eut une légère grimace à la prononciation du nom de sa maison mais, la moitié de la classe fût parcourue d'un souffle de joie et de gratitude. A la sortie de la salle, plusieurs de ses camarades lui tapèrent sur l'épaule pour le féliciter, mais un seul finit vraiment par lui adresser la parole.
- Impressionnant Londubat ! Lança une voix traînante derrière lui.
Neville le reconnut rapidement. Tout aussi grand que lui, ce qui était rare pour leur âge, les yeux d'un noir profond et des cheveux couleur d'ébène si caractéristiques. Philius Rogue le dévisageait, à la fois méfiant et presque admiratif. Comme d'autres de ses camarades à Serpentard, le père de Philius était considéré aux yeux de tous comme un mangemort confirmé. Cependant, par manque de preuves, aucune condamnation n'avait pu être prononcé à l'encontre de Severus Rogue. Aujourd'hui, celui-ci occupait même une place importante dans le Conseil du Ministre de la Magie.
- Qu'est-ce que tu veux Philius ? cracha Neville
- Détends toi Londubat, on est dans le même camp tu te souviens ?
Il tapota du bout de son index l'emblème frappé du serpent qui ornaient leurs robes de sorciers. Frappé par cette remarque, Neville ne sut se contenir. Plusieurs jours de rancœurs serraient sa gorge comme un étau mais, à cet instant, il n'éprouvait ni l'envie ni le besoin de se contenir. Il fit face à Philius et, sans sommation, il sortit vivement sa baguette.
- Petrificus Totalus !
Un éclair jaune jaillit et frappa de plein fouet le jeune Rogue qui se retrouva instantanément bâillonné et ligoté par des liens invisibles. Il tomba au sol, incapable de bouger ni de dire le moindre mot. Neville s'approcha doucement et le domina de toute sa hauteur.
- Je ne m'associerai jamais à quelqu'un comme toi, pour la simple et bonne raison que JE NE SUIS PAS COMME TOI !
Il avait crié ces derniers mots et ce n'était pas près de s'arrêter. Il en avait tellement sur le cœur !
- Le fils d'un mangemort. Ton père est au moins aussi responsable de la mort de mes parents que Voldemort lui-même ! Tu me dégoûtes Philius.
Un frisson avait parcouru l'assemblée qui s'était réunie autour d'eux à la prononciation du nom du mage noir. Le regard plein de haine, Neville tourna les talons et partit en direction de la Grande Salle. Il n'eut cependant pas le temps de s'y rendre. A peine avait-il franchi le premier angle de couloir qu'il se retrouva nez à nez avec le professeur Mc Gonagall. Ses yeux semblaient lancer des éclairs et Neville comprit tout de suite qu'elle était déjà au courant de l'altercation qui venait d'avoir lieu. D'un ton aussi sec que ses lèvres étaient pincées, le professeur Mc Gonagall s'adressa directement à Neville.
- Suivez moi Londubat.
Et ce fut donc son tour de tourner les talons. Neville, qui ne regrettait sûrement pas ce qu'il venait de faire, sentit malgré tout son courage fondre comme neige au soleil au fond de sa gorge et un puissant nœud semblait maintenant s'être formé au niveau de son estomac. Ils déambulèrent quelques minutes dans les couloirs. Il suivait la sorcière qui avançait d'un pas rapide et décidé en direction du deuxième étage. Arrivé à l'angle d'un couloir, Neville comprit tout de suite où elle le conduisait. Il avait lu tout ce qu'il avait pu trouver sur Poudlard, et cette gargouille si caractéristique n'était mentionné qu'à un chapitre bien précis de L'Histoire de Poudlard. Celui qui faisait référence aux directeurs passés dans cette école, et cette gargouille, c'était l'entrée de leur bureau. Il allait de nouveau se retrouver face à Dumbledore. A cette pensée, son cœur s'emplit de joie, ce qui contrastait étrangement avec le nœud de plus en plus serré qui lui sciait le ventre.
Mc Gonagall marqua un temps d'arrêt devant la gargouille et prononça un mot de passe qui ne manqua pas dérider Neville un très bref instant.
- Fraises Tagada !
La statue s'anima et laissa entrevoir un grand escalier en colimaçon qui semblait monter tout seul tel un escalator moldu.
- Montez. Le professeur Dumbledore vous attend.
Le professeur tourna les talons et disparut avant même que Neville ne s'en aperçoive. Il était seul devant cet escalier qui semblait tourner sur lui-même, comme pour l'inviter à monter. Il hésita un instant et commença à regretter le sort lancé à Philius. Comment pouvait-il se justifier de ce geste devant Dumbledore ? En proie au doute, il finit quand même par s'installer sur l'une des marches magiques qui le guida jusqu'à l'entrée du bureau du Directeur. Celle-ci s'ouvrit avant même que Neville n'ait le temps de frapper. Dumbledore était là, derrière son bureau de chêne, sa baguette négligemment tendue vers la porte qui venait de s'ouvrir. Il dégageait une certaine forme de sympathie malgré l'air de jugement qui passait dans son regard bleu perçant. Neville se sentit instantanément plus à l'aise.
- Bonjour professeur, murmura-t-il.
- Bonjour Neville !
La voix presque enjouée du professeur Dumbledore et le sourire qu'il affichait désormais finit de chasser la peur qui avait prise Neville d'assaut.
- Je .. je suis désolé de vous avoir causé des ennuis Professeur ! Je ne voulais pas ! Je n'ai pas sû me c...
Neville s'arrêta en apercevant les paumes de Dumbledore dirigées vers lui.
- Pas d'affolement Neville, dit-il d'un ton calme. Tu n'es pas là pour t'excuser. Tu es là pour discuter. Plusieurs de tes professeurs et moi-même avons remarqué que tu as l'air extrêmement morose depuis ton arrivée à l'école et ce, malgré les qualités indéniables dont tu as fait preuve à chacun de tes cours ! En tant que Directeur des Serpentard, le professeur Slughorn est tout particulièrement inquiet de voir que tu sembles ne pas t'intégrer correctement. Alors ma question est : Que t'arrive-t-il ? N'es-tu pas heureux d'être à Poudlard ?
Si Neville s'était attendu à ça... lui qui pensait devoir se justifier de ses actes, voilà que la situation était encore pire ! Comment dire à Dumbledore qu'il n'était pas heureux ici ? Comment lui dire qu'il détestait sa maison et tous ceux qui pouvaient lui rappeler cette decision incompréhensible du Choixpeau que Neville voyait trôner derrière le Directeur ? Il chercha ses mots et finit par dire.
- Professeur... vous vous êtes sûrement déjà dit qu'une chose... indépendante de notre volonté, pouvait paraître injuste ? Je.. j'étais tellement impatient d'intégrer Poudlard et de développer mes connaissances pratiques et théoriques. Mais ... je ne m'attendais pas un seul instant à devoir le faire entouré de gens que je n'apprécie pas !
- Que tu n'apprécies pas .. ?
- Que je déteste ! Que je refuse d'apprécier ! Professeur je n'ai rien à faire chez les Serpentard !
- Alors dans ce cas pourquoi le Choixpeau t'a-t-il envoyé chez Serpentard ? Demanda calmement Dumbledore.
Tout à sa rage qui le submergeait, Neville se mit à crier, debout au milieu de la pièce.
- PARCE QU'IL S'EST TROMPÉ !
Il pointa du doigt le misérable chapeau. La tristesse et la rancœur accumulées depuis plusieurs jours lui échappaient pour la deuxième fois de la journée.
- Demandez-lui pourquoi il a fait ce choix... Demandez lui pourquoi il m'a fait ça.. ! En me mettant chez les Serpentard, il me met au même niveau que Voldemort et tous les autres...
Neville pleurait désormais, de rage, de tristesse. Les larmes coulaient sur son visage et son doigt accusateur, tendu en direction de l'étagère derrière Dumbledore, tremblant sous les soubresauts de Neville, finit par s'abaisser. Plusieurs minutes s'écoulèrent durant lesquelles Dumbledore laissa Neville reprendre ses esprits. Il finit par prendre la parole d'une voix calme et posée, presque douce, presque paternelle.
- Neville, la décision du Choixpeau lui appartient. Si il ta envoyé à Serpentard, c'est qu'il a estimé que ce serait l'environnement le plus favorable pour développer efficacement ces connaissances dont tu m'as parlé. Quant à Voldemort, il est certes passé chez les Serpentard, mais cela ne veut pas dire que Serpentard est à son image. As-tu essayer de discuter avec tes camarades ? De te montrer attentif à ce qu'ils pouvaient dire ou faire ? Si c'était le cas, tu te serais sûrement aperçu que ce sont tous des enfants comme toi.
Dumbleddore laissa flotter un silence lourd de sens pendant quelques instants. Neville, hésita à reprendre la parole mais se ravisa finalement. Dumbledore avait peut-être raison. Il avait sûrement raison.
- Neville, tu dois bien comprendre que vous êtes répartis dans vos maisons en fonctions de vos attentes, de vos convictions et de vos affinités. Mais dans le fond, ce seront vos choix qui feront de vous ce que vous deviendrez. Voldemort était un jeune garçon brillant tout comme toi, mais le garçon que j'ai connu a fait tous les mauvais choix possibles. Ils ont fait de lui quelqu'un qu'il n'était pas, et que tu n'es pas plus aujourd'hui. Tu n'es en aucun cas comme Voldemort. Tu es Neville Londubat, première année à Serpentard. Ton histoire reste à écrire mon garçon.
Dumbledore laissa à Neville le temps d'intégrer ce qu'il venait de lui dire. Il sembla même attendre de lui qu'il reprenne la parole. Après quelques minutes de silence, Neville essuya les dernières larmes qui perlaient encore sur ses joues avant de parler à nouveau.
- Merci professeur. C'est vous qui avez raison.
Il lui coûtait de l'admettre, mais il n'avait pas fait d'efforts. Il n'avait meme pas essayé d'en faire.
À nouveau, le regard de Dumbledore changea, il semblait scruter son esprit à travers ses yeux et Neville comprit qu'il devait soutenir ce regard.
- Tu as beaucoup de volonté Neville. Et si tu suis le bon chemin, tu deviendras un très grand sorcier.
Puis, sans laisser à Neville le temps de réagir, il ajouta :
- Ça ira pour cette fois. Tu peux t'en aller.
- Merci professeur Dumbledore.
Neville ne s'attendait pas à être congédié aussi rapidement et c'est sans y penser que ses jambes le guidèrent d'abord hors du bureau, puis jusqu'aux cachots où se trouvait l'entrée secrète du dortoir des Serpentards. Arrivé dans la salle commune, il s'assit machinalement dans un fauteuil et regarda les profondeurs du lac noir à travers le plafond magique au-dessus de sa tête. Il réfléchit pendant un moment, laissant son esprit vagabonder librement, repensant à tout ce que lui avait dit Dumbledore. Toutes ces vérités qu'il avait refusé de voir jusque-là et qui s'imposaient maintenant à lui avec douceur. Quand il reprit finalement ses esprits, la salle s'était remplie peu à peu ; remplie d'élèves comme lui, avec les mêmes robes que lui et les mêmes préoccupations que lui. Le feu qui ronflait dans la cheminée instaurait une certaine chaleur dans la pièce et, pour la première fois depuis son arrivée, Neville se sentit bien. Il se sentait enfin chez lui. Il finit par se dire pour lui-même.
- Oui, Dumbledore a raison. Je suis un Serpentard.

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⏰ Dernière mise à jour : Apr 01, 2020 ⏰

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Neville Londubat : Le destin d'un élu Où les histoires vivent. Découvrez maintenant