Chapitre 6

401 36 0
                                    


Le lendemain Rémy arriva au travail à l'heure habituelle, gara sa voiture à la place habituelle, prit son café habituel, emprunta le parcours habituel en saluant les gens habituels... Tout semblait normal. Seule chose inhabituelle, elle portait d'énormes lunettes de soleil et était bien décidée à ne pas les retirer de la journée.

Quand elle s'était réveillée au son de son alarme, elle avait été peinée de constater les énormes cernes qui ornaient ses yeux. Normal, vu qu'elle devait avoir eu quoi? Deux heures de sommeil à tout casser, alors qu'elle avait passé toute la nuit à pleurer dans son lit. Elle avait regretté son manque cruel de maquillage aujourd'hui, car elle n'avait plus acheté de fond de teint depuis un long moment déjà.

Debby éclata de rire quand elle la vit en arrivant au bureau. Au moins une qui rayonnait de bonheur! Avec un peu de chance sa bonne humeur déteindrait sur elle! Le ventre de Debby était légèrement marqué sous sa robe crayon beige. Sa grossesse semblait bien se passer. Rémy faillit en pleurer, mais ravala vite ses larmes. Au travail, pas de place pour les problèmes personnels.

- Ça ne va pas? s'enquit Debby en s'approchant. C'est quoi ces affreuses lunettes?

- Une babiole que j'ai payé à un marchand ambulant, répondit-elle sans intonation dans la voix.

- Oui, mais pourquoi? demanda Debby plus sérieusement en s'asseyant en face de son amie. Il s'est passé quoi?

- Rien de grave, j'ai des cernes parce-que je manque de sommeil, c'est tout.

- Rem, tu sais que tu peux me parler, non? Tous les jours c'est toi qui m'écoute et qui me conseille quand ça ne va pas, alors que c'est moi l'ainée de nous deux. Tu as le droit de me raconter tes problèmes aussi! Je te le dis souvent!

- Oui, je sais.

- Alors dis moi ce qui s'est passé! insista Debby.

Rémy retira ses lunettes de soleil et baissa la tête.

- Je me suis disputée avec Samuel hier soir, raconta Rémy.

- Mais pourquoi? Tout se passait bien entre vous, non?

- C'était pas très grave, ne t'en fais pas. C'était à propos d'enfants. Et j'ai pleuré.

- Ma chérie! Ça doit être vraiment difficile à gérer, ce problème! Mais je suis sûre que ça ira! Vous y parviendrai, vous aurez même plein d'enfants!

L'enthousiasme de Debby fit sourire Rémy. Et son amie sembla un peu rassurée en la voyant sourire. Mais ce que son amie ignorait, c'est qu'elle ne souriait pas parce qu'elle avait un regain d'optimisme, elle souriait parce qu'elle savait qu'elle n'avait plus aucune chance de donner un enfant à son mari. C'était un sourire amer, un sourire de résignation.

Le téléphone de Debby sonna, et elle décrocha en s'en allant. Et une larme roula sur la joue de Rémy. Elle l'effaça rapidement et remit ses lunettes en place avant de se replonger dans le travail. Travail, travail, travail. C'est tout ce qui pouvait lui sortir Samuel de la tête.

En ouvrant la porte de son appartement le soir, elle eut le coeur serré. Cet appartement lui semblait vide, alors qu'aucun meuble n'avait été retiré. Ce n'es pas non plus comme si jusqu'ici en rentrant quelqu'un était là pour l'accueillir! Elle fila directement dans la chambre et posa son sac sur le lit. Elle se déshabilla et prit une douche. En ouvrant l'armoire pour prendre des vêtements, elle tomba sur le survêtement de Lucas.

Elle prit le haut et le fouilla à la recherche de la carte de visite qu'il lui avait donné. Elle la retrouva froissée, mais quand même lisible. Elle enregistra le numéro et ensuite replia le vêtement pour le mettre dans un sac plastique.

Elle se rendit ensuite à la cuisine et se fit du café. Tout en le préparant et tout en le buvant, son regard était resté fixé sue le numéro de Lucas. Elle envisageait l'appeler. Cette fois elle ne risquait pas d'avoir des remords en couchant avec lui. Après tout, on ne pouvait pas dire qu'elle trompait son mari! Et le pire qui pourrait lui arriver serait qu'elle tombe enceinte, or ça ne pouvait pas être une mauvaise chose! Elle lança l'appel, et il décrocha à la deuxième sonnerie.

- Lucas Vlahaus j'écoute!?

- Salut, c'est Rémy!

- Ah! Salut, Rémy, comment vas-tu!

- Bonsoir Rémy! cria Vlad au loin.

- Bonsoir Vlad!

- Elle te salut, transmit-il. Bon, alors que puis-je faire pour toi?

- J'aimerais que tu vienne chez moi.

- Ah!? Il y a un problème avec la voiture?

- Non. Je veux réitérer l'expérience de la dernière fois, au mariage.

Un silence suivit sa déclaration. Il allait peut-être refuser! Après tout, la dernière fois elle l'avait presque chassé de son lit!

- Quand? Demanda-t-il au bout d'un moment.

- Tout de suite, si possible.

- Très bien, j'arrive, répondit-il. Envoie moi l'adresse par message.

- OK, à tout à l'heure.

Elle raccrocha, lui envoya l'adresse, et se mit en quête de toutes les photos ou autres éléments qui pourrait indiquer qu'elle était mariée. Elle rangea le tout dans la partie du dressing réservée à Samuel, et prit soin de fermer les placards à clé.

Elle retourna ensuite à la cuisine, et se mit aux fourneaux. La dernière fois elle avait eu faim après son départ, alors elle anticipa. Elle fit des pattes sautées rapidement, et venait juste de finir la vaisselle quand on sonna à la porte.

Elle se nettoya les mains, et alla ouvrir. Il se tenait appuyé contre le cadran de la porte, les jambes croisées, les yeux fermés. Il avait lâché ses cheveux comme la dernière fois. Il ouvrit les yeux et la détailla sans dire un mot, puis entra sans attendre de se faire inviter. Il s'assit dans le canapé et regarda autour de lui. Elle referma la porte et le rejoignit.

- C'est joli, chez toi! Tu vis seul dans ce grand appart!?

- Bonsoir! Entre je te prie! Vas-y fais comme chez toi, assieds toi! récita-t-elle. Je te croyais plus poli que ça!

- Tu voulais qu'on fasse ça dans le couloir? s'enquit-il. Je ne pense pas. Et puisque tu ne disais rien, je me suis permis.

Il marquait un demi point. Un demi seulement.

- Bref, ce n'est pas grave, fit-elle. Suis moi!

Il se leva et la suivit jusque dans la chambre.

- Je t'en prie, mets-toi à l'aise! lui dit-elle.

Il lui sourit et partit en exploration. Il traversa le dressing, se rendit dans la salle de bain où il testa tous les robinets, et revint s'asseoir sur le lit ou il sembla tester le confort du matelas. Pendant tout ce temps, elle était restée adossée à la porte close de la chambre, silencieuse.

- Tu vis seule? demanda-t-il à nouveau.

- Oui, répondit-elle.

- S'il y a déjà une si grande salle de bain, c'est quoi l'autre porte qu'on a dépassé?

- Une autre chambre.

- Pourquoi deux chambres pour une seule personne?

- Pour d'éventuels invités.

- D'accord!

Deux fois plus d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant