Chapitre 13

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Lucas était assis sur une chaise, près du lit où était allongé Rémy. Le docteur tenait le dossier de Rémy qu'il feuilletait. Lucas était stressé. Si le docteur avait tenu à ne parler qu'à eux, ça devait être grave.

- Monsieur et madame Collen, c'est ça? Demanda le docteur en tirant une chaise pour s'asseoir en face d'eux.

- Oui, répondit-elle.

- Non, répondit-il en même temps. Je ne suis pas monsieur Collen, je suis monsieur Vlahaus.

- Alors il doit y avoir erreur. J'ai demandé à parler au mari de madame Collen.

- Je ne suis pas son mari, mais c'est mon enfant, expliqua calmement Lucas.

- Ah! Excusez-moi pour la méprise. Bien. Si j'ai tenu à vous parler en personne, c'est parce qu'il y a une décision importante que je vais vous demander de prendre. Nous avons fait passer quelques examens à votre... A madame, et nous avons pu constater que son endomètre est très fragile. C'est pourtant le lieu de nidation de l'embryon, et de ce fait la grossesse est à risques. Nous craignons de nombreuses complications. Aujourd'hui, nous avons évité la fausse couche. Mais cela pourrait survenir à n'importe quel moment. Et quand bien même la grossesse arriverait à terme, l'accouchement pourrait être problématique. Nous pourrions perdre la mère, ou l'enfant, ou même les deux. Pendant votre absence je me suis entretenu avec des collègues, et ils en sont venus à la même conclusion: cette grossesse n'est viable qu'à quinze pour cent. Et en tant que médecins, nous voulions vous faire envisager une IVG. Nous sommes conscients de l'enjeu, mais nous tenions à vous faire part des risques si vous tentez de mener cette grossesse à terme.

- Y-a-t-il la moindre chance que cet enfant puisse voir je jour? demanda Rémy.

- Oui, mais...

- Alors je suis prête à prendre le risque. Je refuse de pratiquer une IVG.

- Hé! s'opposa Lucas. Je pense qu'on devrait en discuter avant.

- Je serai dans mon bureau. Monsieur...

- Lucas Vlahaus.

- Monsieur Vlahaus, quand vous aurez pris votre décision, vous pourrez m'en faire part.

Il se leva et s'en alla en refermant la porte. Lucas se tourna de sorte à faire face à Rémy. Ils ne s'étaient pas dits un mot depuis qu'il était entrés dans la chambre. Maintenant qu'il connaissait toute l'histoire, il redoutait plus sa réaction à elle que celle des autres.

Debby et Bruno l'avaient mieux pris qu'il ne l'aurait cru. Ils ne lui avaient pas crié dessus, Debby n'avait pas cherché à le giffler, rien. Même s'ils ne cachaient pas qu'ils désapprouvaient les circonstances. Quand Rémy dormait encore, Debby lui avait raconté ce qu'il s'était vraiment passé. En l'écoutant, la colère qu'il avait autrefois éprouvé pour Rémy se dirigea vers ce Samuel.

Elle ne lui avait pas menti techniquement. Sauf sur le moment de son divorce. Ils avaient bien été mariés trois ans, et leur mariage avait foiré à cause de ses problèmes de fertilité. Mais ils n'avaient pas divorcé depuis un an, c'est juste que leurs problèmes avaient commencé à cette période. Et si on prenait en compte le fait que son mari avait déserté le lit conjugal, elle ne l'avait pas trompée, c'était même le contraire! Et il avait été si désagréable envers elle alors qu'elle souffrait déjà suffisamment. Il n'a même pas cherché à l'écouter. Avec tout ça pas étonnant qu'elle cherche à élever son enfant seule!

Il se racla la gorge, cherchant les bonnes paroles pour entamer une discussion avec elle. Elle était étendue sur le lit dont le haut avait été redressé. Elle ne le regardait pas. Mais elle était calme. Pas la moindre trace d'émotions sur son visage. Maintenant qu'il y pensait, les seuls moments où elle montrait des émotions c'était pendant leurs ébats sexuels, et lorsque Vlad était dans les parages.

- Tu... commença-t-il.

- Je n'ai pas l'intention de me faire avorter, le coupa-t-elle calmement. Ton avis n'y changera rien. S'il ne tenait qu'à moi tu ne serais pas là. Alors ça n'a aucune importance que tu veuille ou non que je garde le bébé. C'est sans doute ma seule chance d'avoir un enfant un jour, alors je refuse d'avorter. Je mènerai cette grossesse à son terme, quels qu'en soient les risques.

- D'après les médecins l'enfant ou toi pourrait mourir pendant l'accouchement. Tu en es consciente?

- Oui. S'il le faut je suis prète à mourir pour donner naissance à cet enfant.

- Et en pensant ainsi crois-tu vraiment que ma présence est inutile? Tu voudrais mourir en laissant un enfant sans parent, c'est ça? Alors qu'il pourrait en avoir deux?

Elle le regarda enfin.

- Je ne veux pas t'obliger à interrompre la grossesse. J'ai l'intention de te soutenir, quelle que soit ta décision. Si tu décides de garder ce bébé, notre bébé, je veux être là tout le temps. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que cette grossesse se passe sans accroc. Et  si l'enfant nait, je veux pouvoir être là, le voir grandir, et m'occuper de lui avec toi.

Elle parut surprise.

- Je pensais que tu m'en voudrait de m'être servie de toi, et que ce que le médecin a dit t'inciterait à opter pour l'IVG.

- Ce n'est pas le cas. Je ne t'en veux pas. Plus maintenant.

- Qu'est-ce qui a changé?

- Je sais, à propos de ton divorce et ses circonstances.

- Alors tu as pitié et tu veux m'aider, c'est ça?

- Non, je n'ai pas pitié, j'ai de l'admiration. Tu es forte, endurer tant de chose toute seule! Mais parfois il faut savoir partager! Et puisque je ne suis pas innocent dans l'histoire, j'ai décidé de partager ta peine.

- Si tu le dis...

- Je vais prévenir le médecin de notre décision. Je reviens.

Il se leva et sortit. Debby et Bruno l'attendaient, assis sur un banc dans le couloir. En le voyant ils se levèrent dans un mouvement parfaitement synchronisé.

- Pitié Dis-nous ce qui se passe! se plaignit Debby. Ne nous demande pas d'attendre quoi que ce soit!

- Je dois encore parler au médecin, mais allez-y, elle vous dira ce qu'on nous a dit.

Ils ne se firent pas prier et entrèrent.

Deux fois plus d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant