Alistair

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Ils sont partis en pleine nuit.

Ils sont partis comme des voleurs, sans rien emporter.

Ils sont partis en nous laissant seuls, mon frère et moi.

Cest lui qui ma réveillé, ce jour-là. Il ma mis un coup de béquille en me disant de me lever, quon était en retard et que les parents nétaient pas là.

Jai regardé lheure.

Et jai insulté la terre entière.

On avait 46 minutes de retard, moi pour le lycée, lui pour lécole primaire.

Impossible de mettre la main sur mon portable.

Je nai même pas eu le temps de lire le petit bout de papier jaune posé sur le meuble à chaussures.

Jai aidé Dante à mettre sa prothèse, je me suis habillé et on sest jetés dehors.

Il faisait une chaleur à crever, et la semelle de mes tennis collait au béton. Je me suis étonné du nombre de gamin qui erraient dans les rues un jeudi matin.

La boulangerie était fermée, et ça ma étonné parce que tous les jeudis jallais acheter un croissant à Dante et que jamais elle navait été fermée.

Du coup jai voulu lui acheter une sucette.

Le kiosque était fermé.

Jai accéléré.

Javais peur.

Superette. Fermée.

Piscine. Fermée.

Bar. Fermé.

Restaurant. Fermé.

Dante me demandait de ralentir.

-Tu vas trop vite, jai ma prothèse qui me fait mal ! maman elle me la met toujours mieux que toi !

Jai aboyé.

-Oui, bah maman elle nest pas là, alors tu te dépêche et je te la remet en arrivant à lécole !

Jai quand même ralenti pendant que mon frère tapait dans des cailloux avec un petit bruit métallique.

Pendant quon se trainait en direction de lécole de Dante, Kenneth ma interpellé.

-Alistair ! Tu vas ou, comme ça ?

-Je vais poser Dante à lécole et je vais au lycée. Et toi ? Quest-ce-que tu fais là ? On est en retard, au cas où.

Kenneth a haussé un sourcil et a ricané. Il était très triste, son rire.

-Tes pas au courant ? Ya plus dadultes, mec. On est seuls. Tous les gamins avec qui jai parlé ont reçus le même mot de leurs parents. Comme quoi ils devaient partir, mais quils nous aiment, ect.

À côté de moi, je savais exactement quelle tête avait mon frère. Il avait surement écarquillé ses grands yeux bleus et sa bouche devait trembler. Il faisait toujours ça quand il avait envie de pleurer. Je ne lai pas regardé. Jai juste attrapé sa main, sa petite main moite de garçon de huit ans.

Javais envie de frapper Kenneth.

Alors jai soulevé mon frère et je suis parti en courant.

Tout le temps où je courrais, je me disais que Kenneth me faisait une blague, que cétait pas possible, que jamais nos parents nous auraient laissés en plan comme ça.

Dante se serrait fort contre moi et sa prothèse me frappait la hanche pendant que je le ballottais dans tous les sens. Il pleurait. Lui aussi, il essayait surement essayer de croire à une blague. Mais, comme moi, il devait se dire que tous les enfants de la ville navaient pas séché les cours pour nous faire une mauvaise blague. Il se disait surement que le regard de Kenneth était trop triste, trop éteint pour que ça soit juste une blague.

Norwich roadWhere stories live. Discover now