Astres

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25 décembre, 0h05. Noël. Profitez bien. C'est le dernier. Un observateur attentif aurait remarqué une statue supplémentaire sur l'un des toits de Notre-Dame-de-Paris. Le voyage a été long depuis la province. Mais formateur.

La France est sous contrôle. Comme beaucoup d'autres pays. Les dirigeants sont encadrés strictement, ralliés à notre cause ou remplacé.

Rien ne m'échappe. Rien, ou presque. Une place forte, impénétrable, incorruptible. Profitez bien. C'est la dernière.

Triskèle sort de l'ombre. Ses longs cheveux blancs sont tirés en arrière, couverts de fines gouttelettes de pluie. Sur son torse son symbole est tatoué. Tracé à jamais. La chair est brûlée. Au centre, un onyx est enchâssé à même le sternum. Il est aveugle. Et il est le seul à pouvoir lire les instructions que nos Maîtres nous laissent dans le ciel. Il est le représentant du culte pour la planète.

A sa droite, Khanda. A sa gauche, Ouroboros. Symbole dessiné au couteau sur le crâne pour l'un, incrusté au fil de fer dans la peau du cou pour l'autre.

Nous sommes tous les quatre à l'origine du mouvement. Quatre ados qui n'en pouvaient plus des adultes et de leurs conneries. Quatre à être marqués à vie.

Triskèle a tenté de s'immoler dans son collège. Harcelé à cause de son albinisme. Il est devenu aveugle. Il s'est brûlé à nouveau volontairement pour modifier sa cicatrice. Puis s'est enfui du domicile familial. L'onyx provient d'une statue chez ses parents, il l'a enfoncé dans un creux formé avec un marteau pendant un passage à tabac.

Khanda a été maltraitée par ses proches. Suffisamment agressée pour avoir le corps recouvert de multiples coupures et traces de coups. Elle est restée 10 jours enfermée dans un placard à balais, puis a été jetée à travers une fenêtre du deuxième étage de son lieu de vie. Les voisins ont fermé les yeux. Elle s'est scarifiée le crâne afin d'y tracer un khanda, puis a placé la canif dans la main de son alcoolique de géniteur, occupé à décuver. Et elle est partie.

Ouroboros a été étranglé pendant un viol. Il a voulu porter plainte. N'a pas été pris au sérieux. Pas de preuve. Trace de strangulation jugée non-fiable. Et puis, un garçon ne se fait pas violer. Ou il se défend. Ou c'est une tapette qui l'avait cherchée. Rire macho. Alors il s'est fait justice lui-même. Ses violeurs ont eu mystérieusement les mains tranchées. Ainsi que leurs pieds. On en a retrouvé des morceaux dans leur estomac. Sous le choc, ils sont toujours incapables de parler. Lui a essayé de s'étrangler avec le fil encore recouvert de sang. Avant qu'une fille ne s'écrase à ses pieds. Elle venait de passer à travers une fenêtre. Alors il a rectifié le placement des fils. Et incrusté un ouroboros dans le cou.

Ma vie est un paradis à côté de la leur. Ni famille violente, ni harcèlement, ni viol. Juste un profond dégoût. Et des crises de démence. Je me lacère le dos pendant la nuit. Les marques laissées par la chair à vif forment un nom. Le mien à présent. Mes ongles sont encore rouges de mon sang.

Je sais pourquoi ils sont là cette nuit.

Triskèle approche. Ouvre la bouche. "Avaritia".

Ils ont parlé. Annoncé le début de la fin. Apporté leur message. Leur ordre.

Ils sont nos dieux. Êtres supérieurs. Tous puissants.

Mes yeux passent au jaune.

Comme eux.

Astres.

La Confrérie du Serpent [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant