[ s i x t e e n ]

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J'ouvre les yeux, peu consciente de l'environnement qui m'entoure. Mais rapidement, je prends conscience que l'air commence à manquer dans mes poumons ; je suffoque drastiquement vers une mort certaine. Je comprends alors que je me retrouve sous l'eau, les poignets enchaînés à ce qui semblerait être une baignoire. Je me débat de toutes mes forces, tirant sur les liens qui ne veulent se briser. Mes hurlements désespérés s'étouffent en petites bulles qui remontent à la surface, me narguant de l'air libre en dehors de l'eau, elles ont le plaisir d'y goûter.

C'est un cauchemar.

Les souvenirs du premier niveau de Closed Spaces me reviennent à l'esprit, alors qu'instinctivement je cherche un outil me permettant de me sortir de ce traquenard. C'est ainsi que je tombe sur un couteau de poche coulant au fond à l'autre bout de la baignoire, je donne un coup de pied pour l'attraper. En coupant les liens, la lame me glisse de la main, et une plaie béante dans ma paume inonde l'eau claire d'un rouge écarlate m'otant une grimace de douleur.

J'émerge hâtivement telle baleine dans l'océan, la bouche grande ouverte pour avaler le plus d'air possible dans mon corps étouffé par l'eau. La panique me prend aux tripes, je me laisse tomber sur le dos, terrifiée et à moitié nue sur le carrelage sale de la petite pièce. La main sur la gorge, je tente de reprendre une respiration normale malgré cette foutue crise d'asthme qui ne veut plus me lâcher.

Je veux sortir.

Soudain, une plaque du plafond s'ouvre, lâchant un  inhalateur qui tombe lourdement sur le sol. Je me roule rapidement sur le ventre, tendant le bras pour attraper mon seul moyen de survie. Cette scène de désespoir digne des plus grands spectacles théâtraux pourrait sûrement en faire rire plus d'un, pourtant je suis bel et bien en train de jouer avec la vie.

Je parviens finalement à y mettre la main dessus, mais le plafond se met à trembler et sans prendre garde un énorme bloc chute de bien haut, prêt à m'exploser. Mais je réussi à m'éloigner à la dernière seconde.

Après quelques bouffées d'oxygène, je parviens à me relever sur mes deux jambes tremblantes — par la peur ou le froid, je ne saurais faire la différence, mes yeux affolés s'attardent sur chaque aspect des quatre murs étroits qui me retiennent prisonnière.

« - Namjoon ! À l'aide ! »

Je m'approche de la porte, mes poings s'échouant sur le métal la constituant. Ma gorge me brûle, j'en croirais presque être à deux doigts de vomir mes tripes tant l'adrénaline prend un mauvais tournant dans mon corps.

« - T.. Taehyung ! »

Mes coups se font plus lents et dénués de puissances à mesure que le désespoir me frappe de plein visage. Je me laisse tomber, rencontrant une nouvelle fois le carrelage gelé et affaiblie je rapproche mes jambes contre ma poitrine, la tête enterrée dans mes genoux, mon cerveau luttant pour trier les pensées qui fusent à une vitesse hallucinante dans mon esprit étourdi.

Je suis enfermée dans une pièce, seule et perdue. Probablement un niveau de Closed Spaces, je n'en suis pas très sûre. Je n'aperçois aucun minuteur, ni clé pour m'échapper. Ce qui veut probablement dire que je suis retenue prisonnière volontairement, sans possibilité de quitter cet endroit. Peut être va-t-on venir me chercher pour me torturer et me soutirer quelconque information, qui sait ?

« - Ou peut être que... »

Je lève lentement la tête, jetant un nouveau coup d'œil au plafond dans lequel le vide qu'a créé le bloc n'a toujours pas été comblé. Est-ce intentionnel ? Je ne vais pas attendre de connaître la réponse sans rester sagement dans cette foutue prison.

Je me redresse rapidement, sans jamais vraiment oublier la paume de ma main, dont le sang continue de couler malgré les pressions que j'exerce. Mais je n'ai pas le temps de m'occuper de mon état, je dois sortir. Je pousse sans attendre les quelques meubles qui décorent la pièce, dont une vieille commode à peine stable, une chaise dont un pied manque à l'appel ; une montagne de vieilleries au milieu de la pièce, mon œuvre d'art dépasse bien les horreurs que ce taré a pu exposer dans Closed Spaces.

Malgré l'instabilité de mon idée, je parviens tout de même à atteindre le trou du plafond, dans lequel les ténèbres me procurent des milliers de frissons le long de l'échine, jusqu'au bas de mon dos.

La porte se met soudain à tambouriner, alors qu'on tente de forcer la serrure avec une clé. De l'autre côté, je parviens à entendre deux voix bien distinctes ; celle d'une femme et d'un homme, venus avec de mauvaises intentions. Et je ne compte pas discuter avec eux autour d'une table remplie de thé à la camomille et des biscuits sucrés. Je me hisse dans le plafond, donnant par la même occasion un coup dans ma sculpture qui s'effondre dramatiquement au sol.

Je laisse dépasser un œil, puis le deuxième dans la brèche, observant discrètement les deux figures qui entrent finalement dans la pièce, seulement pour voir un éboulement de meubles démontés.

« - Où est passée cette garce ?!

- Le patron va nous démolir... oh mon dieu...

- Tu veux pas la fermer un peu Naye ?!

- Excuse moi Kiji... »

Ils ne semblent pas s'être aperçus de la dalle manquante dans le plafond, ce qui prouve que je n'étais pas supposée entrer dans ce plafond. Le Traqueur intimidant marmonne des propos incompréhensibles, parfois interrompu par la voix trop forte de la jeune femme apeurée à l'idée de se faire punir. S'en est presque humoristique, de mon point de vue.

« - Et dire que le boss m'a repris dans la mission, tout ça pour me foutre avec une empotée de débutante !

- Je suis désolée ! »

Le noiraud aggripe quelques mèches de cheveux avec ses doigts, relevant brusquement la tête, me prenant de court. Son regard neutre rencontre le mien paralysé, alors qu'un sourire narquois étire malicieusement ses lèvres. Je n'ai le temps de comprendre la situation qu'il sort un flingue de sa ceinture, le pointant tout droit sur moi.

« - Trouvée ~ »

La balle effleure ma joue, alors que j'observe quelques gouttes écarlate s'échouer à ses pieds, la respiration coupée. Mais rapidement le sang bouillonne à nouveau dans mon cerveau, et je rampe à m'en brûler les genoux et les coudes. Je suis repérée, et ces Traqueurs doivent probablement connaître les lieux bien mieux que moi. Il doit sûrement y en avoir un à chaque sortie de ce foutu plafond, autrement dit ;

je suis morte.

𝐑𝐮𝐧 𝐀𝐰𝐚𝐲₂ - 𝐊.𝐓𝐡Où les histoires vivent. Découvrez maintenant