Je suis né malade. Mon mal est celui du poison des sens, celui du déni face au reflet dans un miroir, celui des vérités qui condamnent au mensonge. J'ai longtemps cherché l'exorcisme pour l'ultime délivrance. Délivrance vis à vis d'un mal qui nous ronge de l'intérieur, qui nous ramène sans cesse à cette vie qui n'est pas la nôtre ; qui n'a pas été programmée pour être nôtre mais derrière laquelle on se cache. À l'abris, de l'autre côté de l'épais rideau des Apparences, au devant d'une scène où le personnage est la bouée de sauvetage et la personne, la victime du personnage, mais c'est un mal nécessaire, car c'est ce qui sauve ; le jeu de la scène.
« Tu es un homme.
Elle m'a dit ça avant de partir. Je suis un homme comme elle l'a dit. C'est mon personnage, ce mensonge salvateur qui paye au lynchage des vices. Elle a longtemps aimé ce personnage, car il a souvent bien joué son rôle, si bien qu'il en aurait lui-même presque oublier le visage derrière le masque si cela n'avait pas été la chair qui témoigne du sang impur qui coule dans les veines.
J'ai aimé ma femme comme on aime une voiture qui est sûre de nous amener à bon port, en évitant les profondeurs douteuses, une voiture qui nous fait oublier à quoi servent nos deux jambes et dont l'habitacle nous protège des vents d'automne.
Et nous nous sommes aimés, jusqu'au jour où le personnage a perdu son costume et la voiture, ses freins.Oh j'ai souffert, ici-bas l'absolution est chose divine et Dieu est partout, en dehors de l'autel de mes iniquités. J'ai expié mes fautes, j'ai dit mes prières, j'ai fait pénitence mais je pèche encore parce que le mal est là, sous ma peau. Je pèche en pensées et par omission tout en implorant la miséricorde du Sublime éternel de me préserver d'actions ; j'ai toujours tout fait pour ne pas atteindre la ligne de non retour mais l'étau se resserre et je perds mes répliques.
Ma voiture est partie.L'abîme est proche, je regarde en bas ; ses profondes noirceurs qui épouvantent et émoustillent. Je peux encore faire marche arrière, je peux encore reprendre mon rôle au devant de la scène, je peux encore ... Alors je fais un choix et je m'envole, loin de l'abîme et loin de la scène. Je n'ai jamais eu ma place.
Je ne suis plus un homme, juste un brin de néant.
Lady V
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Mémoires de Lady V
Puisi"Pourquoi veux-tu voler, petit oiseau ? Jamais tu ne saurais voler. Aucun espace n'a jamais été assez grand pour contenir tes larmes, Car le nom de ta mère était Solitude, Celui de ton père, Douleur. Ils t'ont alors appelé Petit Chagrin, Car tu n'e...