Prologue #2

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Comme convenu, on part donc sur une publication hebdomadaire des  sous-chapitres déjà publiés et écrits. Pour celles et ceux qui veulent les chapitres entiers : vous pouvez les lire sur AO3 et ils seront bientôt publiés sur Scribay. Bonne lecture !

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Prologue, partie 2
Jugement et abandon.

Quelques millénaires plus tard

Le voyage a été rapide mais incroyablement épuisant. Les menottes qui entaillent ses chairs scellent sa magie, et son corps peine à s'habituer à cette perte. Alors quand il est expulsé du Bifrost, Loki ne doit son équilibre qu'à son frère qui le tient fermement. Des fois qu'il s'échappe...

Heimdall salut Thor avec révérence, mais celui-ci le remarque à peine. Loki quant à lui n'hérite au mieux que d'un regard dédaigneux et empli de jugement. Qu'importe. Il est libre, enfin. Enchaîné, muselé et bientôt jugé, mais libre. Thanos n'a plus aucune emprise sur son esprit, et seuls les sévices subis chez les Chitauris peuvent encore mettre en péril sa santé mentale – rien qu'il n'ait jamais connu.

Ils peuvent bien penser ce qu'ils veulent, Loki n'est ni stupide, ni égoïste. Et de mémoire de dieu, il n'a jamais hésité à se sacrifier pour le bien du plus grand nombre, si tant est que le plus grand nombre en vaille la peine. Ou qu'il n'ait pas le choix, mais c'est une autre histoire. Et de toute évidence, la vie d'une planète entière, d'un royaume au cœur d'Yggdrasil, d'une porte sur l'univers en valait largement la peine. Loki était heureux d'avoir été arrêté. Oh, pas sans avoir causé quelques dommages, bien sûr, mais rien d'irréparable sinon les quelques vies fauchées indépendamment de sa volonté. Mais il fallait bien qu'il fasse bonne figure devant Thanos et l'Autre.

Non, en réalité, maintenant qu'il effectue une sorte de Marche de la Honte depuis le Bifrost jusqu'au palais royal d'Asgard, Loki espère seulement qu'Odin saura se montrer clément. Non, autant ne pas compter là-dessus. Peut-être le laissera-t-il parler, s'expliquer, se défendre ? Définitivement, non. Alors... Peut-être, avec un peu de chance, et un bon alignement des astres, et la naissance d'une deuxième Lune asgardienne, peut-être que Thor se décidera à ouvrir les yeux. Peut-être qu'il va ouvrir ce qui lui sert de bouche pour autre chose que se bâfrer et raconter des âneries. Le défendre par exemple !

Durant tout le trajet, aussi long soit-il, Loki est resté concentré sur Thor, sur Odin, sur Frigga, sur ces trois êtres censés être sa famille et qui pourtant le connaissent bien mal. À quel point son frère le déteste-t-il pour ne même plus connaître la couleur de ses yeux ? Parce qu'il ne faut pas s'y tromper, lui aussi a été victime du sceptre ! Et des yeux verts prasin, c'est quand même bien différent d'une couleur bleu céleste ! Non ?

C'est le soudain silence qui sort Loki de ses pensées tristes et agaçantes. Lorsqu'il relève la tête, son regard tombe dans celui d'Odin. Il est dans la salle du trône, le conseil réunit autour du roi, les courtisans amassés afin de demander sa tête. Il est l'heure.

Thor le pousse un peu violemment jusqu'à le mettre à genoux devant le trône. Position humiliante. Une fois Loki "à sa place" (dixit son conna- son débile de frère), Thor place une main lourde sur sa nuque, le forçant à baisser la tête. Soumission ou repentance, telle est la question ! Mais Odin semble satisfait alors bon, le chiot labrador aussi.

En parlant du vieux, il est assis sur Hlidskjalf*, Gungnir à sa main droite, la gauche posée sur l'accoudoir de son trône. Il se tient droit et fier dans sa tenue royale, le Père de Toute Chose dans toute sa splendeur. Comme à son habitude, Odin se donne en spectacle, il soigne les détails, il assoit son pouvoir et son autorité en étant en constante représentation. Alors pour l'instant, Odin laisse hurler la foule, laisse trembler le conseil, laisse Thor se tenir droit et fier aux côté d'un condamné à genoux devant lui.

Loki en est dégoûté. S'il lui restait une once d'espoir qu'Odin puisse un jour être un père aimant, bien que maladroit et imparfait, elle vient d'être écrasée sous la botte dorée du Roi. Il suffit de regarder son visage. Bien-sûr, ces abrutis d'Ases n'y verront rien qu'un masque froid, le visage neutre d'un roi, et d'un père qui va devoir punir, sans doute à regret, car tel est son devoir. Pauvre Odin. Juste Odin. Mais Loki, lui, Dieu des Mensonges, ne se laisse pas attendrir par un masque aussi ridicule. Non, en réalité, Loki arrive à voir bien en dessous des masques, et ce qu'il voit sur le visage d'Odin n'augure rien de bon pour lui.

Odin semble se gorger des cris de la foule. Ils veulent sa tête. Tout Asgard veut voir sa tête au bout d'un piquet, son corps écartelé, ses entrailles nourrissant le sol de la place des exécutions. Et cela semble ravir Odin au plus haut point. Et c'est ce qui effraie Loki : Odin ne manquera jamais une seule occasion de le faire souffrir, alors si en plus cela contente le peuple, il ne va certainement pas se gêner.

Lorsqu'Odin fatigue de ces bruits de basse-cour, il claque Gungnir contre le sol en marbre du palais. La foule tressaille et se tait, le conseil se redresse à l'écoute du Roi, et le corps de Loki se raidit comme la main de Thor presse sa nuque fermement. Un sourire sadique mais fugace illumine le visage d'Odin alors qu'il se relève, le dominant de toute sa hauteur. Cela n'a duré qu'un instant, moins d'une seconde, mais c'est suffisant pour que Loki puisse l'apercevoir. Et alors qu'Odin descend une marche, puis une deuxième ne le quittant jamais du regard, Loki tressaille. Son destin est scellé.

Odin prend alors la parole, invoquant son meilleur jeu d'acteur afin d'apparaître comme un roi juste et clément, mais un père brisé de devoir à nouveau punir son fils. Comédie. Conneries.

« Loki Odinson, tu es aujourd'hui à genoux devant la cour d'Asgard afin de recevoir ton châtiment. À nouveau, tu as déçu les tiens et trahi Yggdrasil ainsi que ton frère en choisissant d'envahir un royaume placé sous sa protection. Louées soient les Nornes, tes noirs desseins ont une fois de plus été déjoués par mon fils, ton Prince et futur Roi. Mais cela a assez duré ! Yggdrasil sait à quel point mon coeur saigne de te punir à chaque fois, aussi je ferai en sorte que plus jamais je n'aie à réparer tes bêtises ni à te punir pour tes crimes. »

Jamais Odin n'avait été aussi véhément, malgré le ton faussement las et blessé. Un murmure parcourt la foule derrière lui, tandis que Loki regarde désespérément le Conseil afin qu'il intervienne. Mais bien sûr, tous les membres fuient son regard... Ils ne s'opposeront jamais à la radicalité d'Odin, pas le concernant en tous cas : ils le veulent aussi inoffensif qu'un chiot sans mère.

« Moi, Odin, Roi d'Asgard, Père de Toute chose. Moi, Odin, je te renie, je t'arrache à ma famille, je coupe les liens qui te lient à la maison Odinblóð*. Moi, Odin, je scelle ta magie comme je ne peux te l'ôter. Moi, Odin, je te condamne à passer 5 années midgardiennes dans les prisons d'Asgard à l'issue de quoi tu quitteras ces terres car... Moi, Odin, je te bannis. J'ai dit ! »

C'est un cri déchirant qui réveille la foule atterrée par cette annonce. La magie de Loki qui s'était débattue au plus profond de lui est maintenant silencieuse, comme morte. C'est incroyablement douloureux, tellement que Loki se serait écroulé au sol sans les bras de Thor pour le retenir. Des bras très vite remplacés par plusieurs poignes solides qui le conduisent jusqu'aux cachots, alors qu'il est complètement amorphe.

Loki est jeté dans une cellule sans plus de ménagement, la lourde porte se fermant derrière les gardes et l'isolant de tous, de tout. Odin l'a renié. Frigga n'était même pas présente à son simulacre de procès et Thor... Thor n'a rien fait. Loki est seul. Et Thor n'a rien fait.

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Hlidskjalf : Non, je n'ai pas passé mes nerfs sur mon pauvre clavier. Ce mot passablement imprononçable et relativement chiant à lire est en réalité le nom du trône d'Odin (dans la mythologie du moins). Cette note ne sert peut-être à rien, mais au moins elle dissipe les malentendus ~

Odinblóð : Littéralement et grossièrement "du sang" ou "de la lignée d'Odin". 'Blóð' en vieux Norrois signifiant le sang et la lignée, j'ai composé ce mot comme on compose par exemple "Odinson" pour "fils d'Odin".

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À suivre...

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[1306 mots] Premier jet.

Errants Du CocyteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant