VII.

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Le reste de la journée se déroula calmement, une ambiance chaleureuse c'était installée au sein de cette petite famille, les Luccani étaient le genre de famille joviale et pleine de joie de vivre, ils ont toujours été proches, on dit que les italiens sont très familiaux, si on prenait les Luccani comme exemple, on ne pourrait pas hésiter sur la réponse. Alexis se sentait parfois trop différent du reste de sa famille, même si il les adorait, il aimait bien passer du temps seul avec ses pensées. Ses amis l'ont vite compris, il avait besoin de son moment d'isolation, c'est d'ailleurs pour cela qu'il a préféré emménager seul. Alexis adorait écrire, c'était plus qu'une passion pour lui c'était une nécessité, même plus que le dessin, écrire ses pensées ou imaginer des personnages totalement différents de lui, c'était son activité préférée car ça lui permettait de voyager en étant chez lui, lire et écrire était des besoins primaires pour ce jeune homme, il ne se passait pas une journée sans qu'il n'ai un bouquin dans son sac ou qu'il déchire une feuille de son cahier pour écrire quelque chose qui venait de lui passer à l'esprit. Je pense qu'on pourrait décerner l'Oscar du bureau le moins rangé au cadet de la famille Luccani, il y avait des fiches par ici, des stylos par là, une tasse qui datait d'il y a environ une semaine, un carnet avec écrit toutes sortes de choses, ainsi que des dessins dans la marge. Mais il se retrouvait dans son désordre, on pouvait qualifier son appartement de « désordre organisé » il savait où était chaque chose, la boîte de gâteaux sous le fauteuil, la télécommande dans la cuisine, le stylo dans la salle de bain, il connaissait ces emplacements par cœur, et si quelqu'un avait l'audace de toucher à ces petites choses pourtant si importantes, il pourrait commettre un meurtre sans aucun remords. On ne touche pas au désordre d'Alexis ! Il a encore des frissons quand il repense à son enfance et son adolescence, quand il vivait encore chez ses parents. Je pense que ce qui angoissait Alexis encore plus qu'un python était une chambre rangée. Si sa mère rangeait sa chambre, il ne pouvait plus faire ses devoirs, il dormait avec sa soeur, il prenait les affaires de son frère, il ne supportait pas de devoir chercher pour trouver ses propres affaires, dans quelle constitution était-il marqué qu'il fallait ranger sa chambre ? Aucune ! Alors laissez ce pauvre garçon traumatisé dans son désordre ! Pour en revenir à cette journée, elle était tout simplement parfaite, ça lui avait manqué. Ils avaient mangé un poulet rôti cuisiné par sa mère, il aurait pu payer pour manger la bonne cuisine de maman, mais il l'avait gratuitement quand il venait à la maison. Loïc avait fait la tête parce que contrairement au reste de sa famille, il devait se contenter de boire de l'eau ou à la limite du jus, tandis que les autres avait un beau breuvage alcoolisé rouge sang, au goût prononcé et acide. La journée passa vite, et il était déjà 21h, Alexis décida qu'il était temps de s'isoler un peu après une journée remplie d'interactions sociales.
- Mais, Alex, il est 21h t'as plus 10 ans pour te coucher à cette heure ci ! Sa sœur n'avait jamais compris cette tendance qu'avait son petit frère à s'isoler de temps à autres, ils étaient si différents l'un de l'autre, on pouvait les qualifier d'opposés. Cassandra avait toujours été la fille populaire amie avec tout le monde et qui sortait sans cesse, tandis qu'Alexis, étant populaire également il faut le dire, préférait décliner les propositions de sortie, il était heureux avec une bonne série, du popcorn, un thé glacé et sa couette. Alors au fil des années, ses amis avaient appris la leçon et ont commencés à le rejoindre dans ses soirées cinéma, ce qui devint une tradition au fil du temps, tous les jeudis, ils se retrouvaient chez l'un d'entre eux pour regarder un film ou même une série assez courte pour être terminée en une nuit. Mais au fil du temps, le thé glacé fut remplacé par une boisson plus mousseuse, jaune et alcoolisée. Mais le popcorn et la couette étaient toujours fidèles. Tout le monde a un petit truc qu'ils ne remplaceraient pour rien au monde, pour Alexis c'était ces moments avec ses meilleurs amis, pour Théo c'était quand il allait voir son père à l'hôpital et que l'infirmière lui dit que son état s'améliore, Emma c'était quand sa mère posait enfin ce verre d'alcool, Eliott c'était quand il rentrait chez lui le vendredi et qu'il pouvait enfin se reposer sans être stressé pour le lendemain. Pour Maxime, c'était les concerts, parce qu'il pouvait chanter aussi fort qu'il le voulait, personne ne pouvait l'entendre et critiquer sa voix. Thomas c'est le moment du mois où il peut se permettre d'entrer dans une boutique de jeux vidéos et en acheter un nouveau, après avoir joué aux mêmes jeux en boucle pendant un mois. Chacun avait son truc et chacun ne le remplacerait pour rien au monde. Tout le monde a ce genre de petit moment préféré, tout le monde sauf Valentin. Il savait profiter de chaque moment sans en préférer un plus qu'un autre, il vivait sa vie à 100% et c'est ce que tout ses amis admiraient chez lui, sa capacité à être neutre et objectif en toute circonstance, et c'est ce qui fera de lui un très bon juge plus tard. À mon sens, tout les aspects de l'esprit humain étaient réunis dans ce petit groupe, ils ont tous quelque chose que l'autre n'as pas, ils se ressemblent mais ils sont pourtant très différents et c'est ce qui fait la beauté de leur petit monde, sa diversité. Bref, trêve de philosophie, passons aux choses sérieuses. Alexis, étant donc monté dans sa chambre d'enfance, qui ceci dit ne variait pas beaucoup de celle qu'il a maintenant, il décida d'explorer ses souvenirs d'enfance enfouis dans les murs de cette pièce, on dit que les murs ont des oreilles, mais les objets ont des histoires et ils savent comment les raconter. À droite de son lit deux places, notre très cher Alex avait un coffre, destinés aux jouets mais qui renfermait bien plus que des figurines et des petites voitures. Il y avait un vieil appareil photo dans ce coffre, même si il ne fonctionnait plus, la carte mémoire elle était bel et bien intacte, il prit alors son ordinateur portable et plaça la carte SD dans la fente prévue à cet effet. Un dossier apparut : Alexis 8 ans. Il double cliqua et vit les images s'afficher petit à petit. La première image le fit éclater de rire, ils étaient si innocents ! C'était une photo d'Emma et lui en train de se faire un câlin devant la caméra. Il se rappela de cette journée...
Le 12 mai, nous étions en classe de CM1, c'était le jour de la kermesse, Emma et moi étions si excités à l'idée de jouer pour gagner des cadeaux ! On avait un plan infaillible, je jouait et elle achetait les tickets, comme ça on perdait le moins de temps possible. Nos parents passaient du temps ensemble, pendant que nous nous mettions en œuvre notre plan si bien élaboré. À la fin de la journée on avait récolté beaucoup de jouets et on a partagé, une fois notre échange de bon procédé terminé, on s'était fait un câlin pour se remercier et se féliciter, j'entends encore le clic de l'appareil photo qui retentissait dans mes innocentes oreilles. Il trouva une figurine qui en apparence n'avait rien de particulier, mais elle appartenait au grand frère d'Emma, Michaël. Il avait toujours agit comme le grand frère d'Alexis, il le protégeait quand on lui faisait du mal, il le consolait quand il n'allait pas bien, il lui donnait des conseils avec les filles quand il était au collège, mais à l'âge de 22 ans, il fut placé dans un centre de désintoxication, c'était une étape très dure pour Emma et Alex, l'une perdait la seule figure masculine qu'elle avait, et l'autre son exemple, son guide. Ils avaient beaucoup pleuré, et quand je dis beaucoup c'est beaucoup, plusieurs semaines. Ils n'avaient que 15 ans quand cela s'est produit, maintenant Michaël est toujours dans le centre, même si il est sorti quelques fois, il a vite rechuté. Espérons qu'il fête son trentième anniversaire avec sa mère et sa sœur, dans la joie et la sobriété. Michaël manquait beaucoup à Alexis, il s'était fait à ce vide qu'il avait laissé, mais il pensait toujours à lui, tout le temps. Et sans s'en rendre compte, une petite larme coula de l'œil gauche du jeune homme...

A day that seemed normal [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant