Chapitre XI

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LOUIS

Je viens d'entendre un bruit fracassant à travers le combiné. Mon cerveau met quelques secondes à se reconnecter, se rappelant doucement qu'Harry était à l'autre bout du fil. Merde son père vient de mourir. Il ne m'avait jamais parlé de sa famille et encore moins de son père qui n'avait même pas de contact dans son téléphone. Je n'arrive pas à savoir comment il se sent. La voix avec laquelle il m'a annoncé la nouvelle était complètement neutre, complètement plate. Je sais que si mon père venait à mourir je serais dévasté et bien incapable de tenir une conversation. Je n'aurais appelé personne et encore moins mon ex petit copain avec qui j'ai couché par erreur sans préservatif quelques jours plus tôt.

"Harry ?"

Aucun bruit de l'autre côté même pas une respiration haletante ou des sanglots étouffés. Je commence vraiment à m'inquiéter. Qui sait quel genre de connerie il est capable de faire ? Son père vient de mourir après tout et je suis certain que ça bouleverse pour toujours le reste de sa vie. Alors j'essaye une nouvelle fois de lui parler, après m'être raclé la gorge pour être sûr de me faire entendre.

"Harry tu es toujours là ?"

Toujours pas de réponse même après quelques minutes d'attentes ma respiration en suspens. Je me décide à raccrocher le cœur battant. Il faut que j'aille chez lui, il faut que je m'assure qu'il ne lui soit arriver. S'il m'a appelé moi c'est qu'il y a une bonne raison, il a besoin de mon soutien peu importe les disputes qu'on a eu et les épreuves qu'on a traversées.

Je passe récupérer mon portefeuille sur le meuble de l'entrée ainsi que mes clefs d'appartement. Quand j'ai tout en main je sors de chez moi et dévale les escaliers de l'immeuble pour sortir. Je cours prendre le premier métro qui mène jusqu'à chez Harry et le trajet ne m'a jamais paru aussi long. 7 arrêts me sépare de chez lui et mon cœur est prêt à exploser à chaque fois que le métro s'arrête.

Garibaldi.

Je me dépêche de sortir de la rame bousculant une femme sur le passage. Un regard par-dessus mon épaule en guise d'excuse et je sors dans la rue. J'arpente ces lieux que je connais beaucoup trop à force d'être venu chez lui. Ma main dans la poche de mon blouson s'assure que le bloc de post-it vert que j'ai pris en partant est toujours en place. S'il n'est pas là il faudra que je lui laisse un mot.

Je trottine jusqu'à chez lui, compose le code pour ouvrir l'immeuble puis je monte les escaliers 4 par 4 sans prendre le temps d'attendre l'ascenseur. Je n'ai pas la patience de rester immobile, de subir.
En peu de temps je me retrouve devant sa porte à frapper plus fortement que les autres fois. J'ai vraiment peur qu'il lui soit arrivé quelque chose de grave et le temps qu'il met à venir m'ouvrir ne calme pas mes doutes. Au bout d'environ 5 minutes, s'apparentant à l'éternité je me décide à pousser cette putain de porte. Elle n'était pas bien enclenchée alors elle s'ouvre toute seule sur une entrée vide où trône encore mes post-it.

J'avance dans l'appartement le cœur battant, j'ai vu un trop grand nombre de série américaine pour savoir qu'en général ce n'est pas bon signe. Je ne m'attends pas à trouver un corps et du sang de partout dans la chambre mais un Harry dévasté. Pourtant, rien dans le salon, rien dans sa chambre alors je tente la dernière pièce de son appartement. J'entends le bruit de l'eau qui coule, il doit être sous la douche et je ne veux pas m'immiscer dans son intimité plus que je ne l'ai déjà fait auparavant. Je toque alors plusieurs fois attendant une invitation pour pénétrer dans la pièce mais rien ne vient, absolument rien. Je pousse la porte qui était entrouverte et je tombe sur un Harry replié sur lui-même dans la douche. Il est habillé et son corps est pris de spasmes incontrôlés.

"Harry ? Putain c'est pas vrai tu m'as foutu une peur bleue. "

Il ne relève pas la tête, il ne prononce pas un mot et je ne suis même pas sûr qu'il respire comme il faut. Je m'avance, ouvre la paroi de douche et rentre dans la cabine le prenant contre moi. L'eau est gelée ce n'est pas étonnant qu'il tremble sans pouvoir se contrôler. Je le serre dans mes bras fortement, me trempant et faisant redescendre de quelques degrés ma température corporelle. Il fait froid, beaucoup trop froid. Mon pouce passe sur sa lèvre bleue et viens la caresser tout doucement.

"Harry s'il te plaît il faut que tu sortes d'ici tu vas faire une hypothermie. "

Ne le voyant pas réagir je prends les choses en main. Je lève le bras pour couper l'eau et je le prends par les cuisses pour le porter hors de cette cabine. J'ai l'impression de soulever un mort, c'est peut-être ce qu'il est intérieurement. Il ne fait aucun effort pour se soutenir et encore moins pour paraître plus léger. C'est un poids mort.

Je l'emmène dans sa chambre l'enroulant dans plusieurs serviettes pour être certain de le réchauffer. Il est glacé et le fait qu'il n'ait toujours pas prononcé un mot me fait paniquer. Je le prends dans mes bras le serrant contre mon torse sans m'arrêter. Il reprend tout doucement des couleurs, ses lèvres redevenant rouges comme s'il avait mis de quoi les colorer. Une main se passe dans ses cheveux et mes lèvres se posent sur son front.

"Doucement reprend doucement ta respiration Harry. Je ne bouge pas on va pouvoir se parler. "

Il cherche à s'échapper et je sais que ça doit être très dur pour lui surtout parce qu'on n'est pas ensemble. On est plus ensemble. Mais c'est aussi moi qu'il a appelé et c'est mon rôle maintenant que je sais, de m'occuper de lui. Je dois veiller à ce qu'il ne fasse pas de connerie.

"Pourquoi t'es là ? "

Sa voix est dur et sévère et je commence à m'en vouloir. Je ne veux pas qu'Harry pense que je me sers de son état pour revenir et être tendre avec lui. Bien sûr il ne m'aurait jamais laisser rentrer dans sa vie à nouveau de cette manière si rapidement sans que son père ne soit mort. Pourtant je ne vois pas non plus un gros choc psychologique chez Harry, je ne le vois pas dévasté. J'ai surtout l'impression qu'il est perdu et en proies a des démons atroces.

"Tu m'as appelé pour me dire que ton père était mort. Comme tu ne répondais pas ensuite je me suis inquiété Harry je suis venu... Bordel tes lèvres étaient bleues... Je ne veux pas profiter de ton état pour revenir. Je veux t'apporter du soutien parce que je pense que tu ne veux plus revoir Liam après la dernière fois. Laisse-moi prendre soin de toi, pas comme un couple simplement comme des amis si tu m'autorise à l'être. "

Il ne prononce pas un mot, ses yeux par contre s'ouvrent en grand ne me lâchant plus. Il soupire et part s'installer dans le salon, se mettant sur le canapé. Je le regarde quitter la pièce avec un petit sourire parce que je sais pertinemment que j'ai gagné. Il a besoin de quelqu'un et je suis la personne qu'il a appelée, je suis donc la personne qu'il voulait auprès de lui.

Mes yeux parcourent sa chambre du regard. Sur le sol il y a des centaines de photos, j'avais été tellement obnubilé par son état que je n'avais pas remarqué l'état du lieu. Des photos d'un petit garçon avec un grand monsieur imposant sont visibles de partout sur le sol. Parfois les grands sourires sont accompagnés d'un troisième celui d'une femme brune avec la peau légèrement halée. Je ne sais pas si ce sont ses parents mais en tout cas je ne les avais certainement pas imaginés de cette façon. Son père paraît si effrayant physiquement, je me demande comment et pour quelles raisons il ne les voyait plus.

Je ramasse les photos sur le sol et fait une pile sur sa table de nuit. Je découvre deux post-it verts accrochés juste au-dessus du meuble sur le mur. Je promets que je n'allais pas y prêter attention jusqu'à ce que je remarque mon prénom sur la feuille. Il me saute aux yeux parce que c'est le premier mot du petit texte et qu'il est écrit en rouge et en majuscule. Je ne suis pas censé le lire je le comprends tout de suite.

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