Eline et Julia s’étaient réveillées de bonne heure, comme à leur habitude quand elles avaient une idée derrière la tête. Elles nourrissaient l’espoir de mettre la main sur la boîte de leur père. Elles avaient dévoré un copieux petit déjeuner et étaient maintenant cachées sous une table, attendant que Madame Pommesec ne soit plus dans les parages. Après avoir cherché partout sans résultat, elle ne pouvait être qu’à un endroit, là où elles avaient l’interdiction de pénétrer. Le bureau de leur père. Leur nourrice venait de quitter les lieux quand elles s’élancèrent vers l’immense porte en chêne, tournèrent le loquet et entrèrent dans le bureau. Très rapidement, elles trouvèrent une boîte en bois vernis qui semblait être très ancienne. Eline s’en empara et fit une drôle de tête en l’ouvrant. Quelque chose clochait. Julia avait une sensation étrange elle aussi en découvrant son contenu. Elles s’échangèrent un regard perplexe puis, Julia s’approcha pour le regarder de plus près. Elle avait une impression de déjà-vu. Comme si le moment qu’elles étaient en train de vivre s’était déjà produit, mais elle n’arrivait pas encore à savoir ce qui allait arriver après. Décidant de ne pas y prêter attention, elle secoua la tête et Eline souffla sur l'encrier. Un nuage de poussière chatouilla leurs narines et sur le point d’éternuer, Julia pris de panique, referma le couvercle de la boîte. Les yeux ronds comme des billes, sa sœur la dévisagea.
- J’ai eu un mauvais pressentiment, répondit Julia. Je pense qu’on ne devrait pas jouer avec.
Voir Eline souffler sur l'encrier, libérant un nuage de poussière, avait déclenché chez Julia une sorte de flash dans lequel elle avait vu Madame Pommesec chuter dans les escaliers, la grange prendre feu, l’enterrement de ses parents et elle, dix ans plus tard aux côtés de sa sœur chez le notaire.
- Tu as raison, répondit Eline. Moi non plus je ne pense pas que ce soit une bonne idée.
Étrangement soulagés, les deux petites filles reposèrent la boîte là où elles l’avaient trouvée. Finalement, elles décidèrent qu’attendre une dizaine d’années avant d’avoir l'opportunité de formuler leurs vœux était un délai acceptable et elles quittèrent la pièce. Au rez-de-chaussée, Madame Pommesec était affairée à préparer les raquettes et les balles pour leur cours de tennis. Eline et Julia descendirent pour la rejoindre et suivirent le cours sans rouspéter. A la fin de la journée, elles sautèrent dans les bras de leurs parents et les serrèrent fort contre elles pendant de longues secondes, reconnaissantes et heureuses de les avoir auprès d'elles.Lors de leur vingtième anniversaire, leur père légua bien des vœux en héritage. Julia avait utilisé tous ses vœux et il n’en restait qu’un seul à Eline.
Quand Julia avait souhaité que tout ce qui s’était passé ne soit qu’un mauvais rêve, le mage, gardien des mots et des vœux, n’avait pas annulé les souhaits formulés, il avait simplement donné une seconde chance aux jeunes femmes. Considérant que Julia avait utilisé son dernier vœu pour réunir toute la famille, Eline estima qu’elle se devait d’en faire de même pour sa sœur. Elle voulait l’utiliser pour Julia et elle-même. Ayant déjà les carrières qu’elles espéraient et étant suffisamment riches pour les générations à venir, ne manquant qu’une chose aux deux sœurs.
- Je souhaite que nous ayons une vie aussi heureuse et remplie que celle de nos parents, car la famille est ce qu’il y a de plus important.Plus tard, elles aussi, contaient leur histoire, le soir pour endormir leurs enfants. Offrant aussi, pour leur vingtième anniversaire des vœux en héritage et en temps voulu qui pour qu'ils perpétuent à leur tour la tradition jusqu’à la fin des temps.
Parfois, nous serons tentés de choisir la facilité, de désobéir aux règles, de n’en faire qu’à notre tête pour obtenir ce que l’on veut quand on le veut, car il est plus aisé de prendre la voie la plus courte. Mais ce ne sera pas forcément celle qui nous rendra le plus heureux. La voie de la réussite est un long chemin étroit et sinueux, semé d’embûches et d’obstacles qu’il nous faudra franchir si nous souhaitons parvenir au bonheur.
La patience peut s’avérer payante, parfois attendre un peu, nous permets d’acquérir en maturité et de faire de meilleurs choix.
Pour Eline et Julia, elles l’apprirent de la manière forte, mais elles finirent par comprendre que désobéir aux règles ne les aiderait pas, ce qui leur permit de ne pas reproduire les mêmes erreurs. La tradition voulait que les vœux d'heritage reviennent aux descendants de la famille Voss à leur vingtième anniversaire pour une bonne raison. Parce qu’à dix ans, ils ne disposaient pas de la maturité nécessaire à faire de tels choix.
Si l’on veut vraiment quelque chose, il nous faudra donner le meilleur de nous-même et savoir faire preuve de patience pour l’obtenir, car nous n’avons pas tous la chance d’avoir un livre à souhait magique comme Eline et Julia, enfin…
VOUS LISEZ
DES VŒUX EN HÉRITAGE [Terminé]
Short StoryEline et Julia sont les deux héritières de la famille Voss. La tradition veut que pour leur vingtième anniversaire, elles héritent d'un livre magique leur permettant d'exaucer trois vœux chacune. Mais les deux jeunes sœurs n'ont aucunement l'intenti...