Supers [MxM]

9 - Le contrat

     Maxence n'avait cessé de fixer la carte de visite de Pax Omnis depuis le départ des deux démarcheurs. Il savait que tout leur cirque n'avait été qu'un chantage parmi tant d'autre, et quoi demander de plus de la part des Normaux, après tout. Il avait reprit la vie qu'il menait depuis de nombreuses années, se rendant à son travail en temps et en heures, puis rentrait chez lui et dormait.

     Ce rythme de lui lui convenait parfaitement bien, jusqu'à ce qu'une famille de son immeuble se fasse expulser de leur appartement. L'usine dans laquelle travaillait le père de famille avait fermé deux semaines plus tôt et il ni lui, ni sa femme n'avaient pu retrouver un nouvel emploi à temps. Ils avaient quitté l'immeuble sous le regard attristé de tous les résidents, qui ne pouvaient rien faire.

     Il y avait eu cet évènement, et ensuite, le chauffe-eau avait définitivement rendu l'âme. Dans un premier temps, les résidents s'étaient plaints à de nombreuses reprises, mais c'était resté sans réponses.

     Au début, ils avaient tous adopté la technique de faire chauffer de l'eau à la bouilloire pour se rincer à l'eau chaude, mais cette méthode, quoique qu'efficace, était relativement coûteuse, et aucun super de la résidence n'avait la capacité de faire chauffer de l'eau. Ce n'était donc pas une solution en soi. Ils s'étaient donc finalement dit que se doucher à l'eau chaude était un bien grand luxe, qu'ils ne pouvaient malheureusement plus se permettre. Ils s'étaient donc attelés à économiser pour mettre suffisamment d'argis de côté pour acheter un nouveau chauffe-eau, mais les prix étaient colossaux face à leur maigre revenus.

     Au final, ils s'étaient résolus à se débrouiller autrement pour bénéficier de l'eau chaude en attendant. Maxence empruntait les douches des vestiaires publiques et pour autant qu'il le sache, Hughie privilégiait les douches des hôtels où ils se rendait avec ses clients.

     Malheureusement, cette situation ne pouvait et ne devait pas durer indéfiniment.

     C'était vers quatre heures du matin lors de son jour de repos que le regard de Maxence se posa une énième fois sur le petit carton de visite de Pax Omnis. Il se pinça l'arête du nez et soupira, avant d'avoir le pressentiment de faire une énorme erreur ; il venait d'attraper la carte de visite pour la glisser dans sa poche, après avoir regardé l'adresse.

     Bien entendu, les locaux de Pax Omnis se situaient dans le quartier des Normaux. D'une pensée, son bonnet en laine et son manteau s'enfilèrent sur son corps et il ouvrit sa porte pour la refermer après être sorti de son appartement. Il ne croisa personne dans le bâtiment, et encore moins dans les rues. Seulement quelques passants dont la tête lui rappelait vaguement quelque chose, mais il ne s'arrêtait pas pour les saluer.

     Le chemin jusqu'à Pax Omnis fut long, et Maxence ne fut pas surprit de se retrouver au pied d'un immense immeuble, dont les parois étaient entièrement faites de verre, et aux armatures en fer. C'était un édifice très moderne, et Maxence aperçu quelques lumières encore allumées. Au moins, il n'aurait pas à patienter comme l'idiot impulsif qu'il était. Il repéra l'interphone et appuya frénétiquement dessus, jusqu'à ce qu'il voit un garde de nuit un peu rembourré et affichant un bide à bière imposant. Il avait une démarche pataude et Maxence remarqua qu'il avait sa main droite posée sur son arme de service.

« Quoi ? demanda-t-il en hurlant à travers la vitre.

     Maxence ôta son bonnet, révélant sa masse de cheveux blancs et il sortit la carte de sa poche. Il vit distinctement le garde de nuit défaire le bouton pression pour dégainer son arme plus rapidement. Cela n'impressionna nullement Maxence. Une arme comme la sienne, il pouvait très facilement en prendre le contrôle, si besoin était. Il fut un instant tenté par cette idée, mais il se contenta de plaquer la carte de visite sur la vitre immaculée, y laissant une sale trace de la paume de sa main au passage.