Chapitre 28 - Le temps d'un éclair

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Skye

J'avais tellement était troublée de ce que j'avais ressenti jeudi soir, lorsque Florian et moi avions parlé des heures durant, que j'avais ressenti le besoin irrépressible de me plonger dans une histoire pour oublier mon trouble. Plongée dans mon roman préféré je n'avais alors pas vu le temps passer. Isabella et son bel Edward m'avaient transportée dans un autre monde si bien que je n'avais pas remarqué que le rare soleil de décembre avait laissé sa place aux effroyables nuages quotidiens. Dans mon esprit les prénoms de Matthew et Florian s'étaient évaporés un court instant et j'avais senti toute mon énergie me regagner mais, lorsque ma mère était entrée dans ma chambre pour me dire que j'étais en retard, je m'étais retrouvée face à la dure réalité. Cette réalité où chacuns de mes choix font forcément souffrir quelqu'un et je savais pertinemment que Matthew m'en voudrait de ce que je m'apprêtais à faire. Mais je repensais aussi à ce que Laure m'avait dit l'autre jour : il faut que je réfléchisse aux choses qui perturbent et que j'arrête absolument de vouloir les oublier.

Je commençais regretter le temps où je n'étais qu'une enfant innocente. Je ne me souciais de rien d'autre que de ce à quoi j'aurais bien pu jouer ou manger, du prénom de mes poissons rouges ou encore du nombre de dents qui bougeaient dans ma bouche. J'étais persuadée que lorsque mon prince charmant viendrait à ma rencontre tout deviendrait encore plus simple, jamais je ne me serais doutée que ce serait le contraire. Je ne me serai jamais doutée non plus de l'amour que je pouvais porter et apporter à deux êtres en même temps et, même si je ne leur avais pas dit, je savais au plus profond de moi que ce n'était pas de l'amitié que j'avais à leur égard.

Ce fut sur ces pensées qui ne m'étaient que trop familières, que je me séparai à contre cœur de l'ouvrage qui m'avait fait, un instant, oublié le dilemme qui me rongeait de l'intérieur. Je n'avais pas envie d'aller au rendez-vous que m'avait proposé Florian, pas que je ne voulais pas le voir mais surtout car je détestais ce sport. De plus, le temps ne se montrait pas clément et je n'avais aucune envie de suivre un match dont je ne comprenais rien sous les gouttes gelées que nous envoyait le ciel.

Je profitais du peu de temps assise au fond de mon bus pour écouter le calme qui s'y faisait avant le tumulte qui allait suivre. Les routes humides me firent arriver en retard, tout le monde était déjà installé à encourager leur équipe. Toutes les places étaient occupées sauf une vers laquelle je me précipitai, si bien que je me retrouvai entre une mère et son bébé qui ne cessait de pleurer et un homme qui dévorait son paquet de chips tel un cochon dans une basse-cour. Et ce fut à cet instant que mon subconscient me supplia de retourner au chaud chez moi mais, pour une raison ou une autre, ma raison s'accrochait à rester ici, sous la pluie à suivre des silhouettes des yeux.

Une longue heure passa sans que je ne puisse profiter du moment. L'odeur de cigarette qui se dégageait de la bouche de mon voisin me donnait la nausée et les cris de l'enfant qui se trouvait à ma droite me brisaient les tympans un peu plus chaque minute. Je me sentais prise au piège, coincée, mais je n'avais pas pour autant arrêté de suivre le garçon pour qui j'étais là des yeux. Il était là, à courir après le ballon, son visage que mon regard ne voulait pas quitter était couvert d'une fine couche de sueur et plusieurs fois je le vis chercher quelqu'un dans les tribunes, et la simple pensées que cette personne se fut moi me donnait le sourire.

Lors des dernières minutes, Samuel tapa encore une fois dans le ballon mais cette fois-ci il arriva dans une des cages, ce qui me paru être une bonne chose car tout le monde se mit à hurler de joie. Je suivie le mouvement de foule en applaudissant moi aussi et, quelques minutes après le passage de l'adrénaline dans le public, tout le monde se leva et quitta petit à petit le stade. Moi, contrairement à eux, mon instinct me dictait de rester assise comme une pauvre malheureuse, seule et sous la pluie. Il me disait que si je les suivais Florian ne me verrait pas et qu'il repartirait en passant que je n'avais pas été là.
Je suis donc restée penaude à regarder les gradins se vider et milles questions se bousculaient, comme à leur habitude, dans ma tête : Quand viendra-t-il ? Viendra-t-il tout simplement ? Ou encore, que serais-je lui dire ?

En ce milieu de décembre la pénombre recouvrait déjà la ville et je  commençais à me demander si Florian allait venir me rejoindre. Le froid me rongeait peu à peu et se fut seulement lorsque je me résignai à retourner chez moi que j'entendis au loin :

- Skye, attend !

Je me retournai en trombe. J'avais attendu cet instant pendant des heures et le simple fait de le vivre enfin me fit oublier tout mes désagréments.

- J'ai cru que tu n'allais jamais arriver.

- Et moi j'ai cru que tu n'étais pas là, eut-il en montant deux à deux les bancs pour me rejoindre.

- Mais je suis là, riai-je à mon tour.

Maintenant qu'il était plus près je pouvais voir que sa lèvre était gonflée et fissurée. Mes traits redeviennent alors en un claquement de doigt aussi perplexe qu'il m'était possible de l'être.

- Qui t'as fait ça, lui demandai-je en le regardant avec encore plus d'attention.

- C'est à l'entraînement, me répondit-il alors.

Il me paru alors gêné. Il ne me regardais même plus et plus personne n'osait parler. Alors, pour nous permettre d'échapper à ce malaise inexpliqué, je repris la parole :

- J'ai recommencé à lire Twilight !

Ses iris bleus se posèrent enfin sur moi avec une pointe d'amusement.

- Comme quoi ta cure sans portable te permet de te replonger dans tes classiques ma belle, riait-il.

Alors que nous venions de retrouver notre bulle apaisante que j'appréciais plus que tout, la pluie se remit à tomber et nous pouvions entendre au loin le grognement de l'orage qui s'approchait. Ni lui ni moi n'avions de quoi nous protéger alors, puisque plus  rien ne nous retenait, Florian prit ma main dans la sienne et nous entraîna sous un petit porche pas très loin. A chaque grondement je serrai encore un peu plus la paume chaude et rassurante de mon ami - si je pouvais encore l'appeler ainsi.

- Tu as peur de l'orage ? Me demanda-t-il une fois au sec.

Par mes habits détrempés, je grelotais et n'arrivais plus à sortir un seul mot de ma bouche. Un éclair déchira le ciel déchaîné et des larmes commençaient à perler dans le coin de mes yeux. Il sembla s'en apercevoir car, de sa douce main humide, il rapprocha mon visage du sien et, dans un dernier geste de tendresse, déposa ses lèvres sur les miennes.
Le temps d'un instant plus rien ne m'effrayait, ni les éclairs ni le dilemme qui était toujours là. Il n'y avait que lui et ses lèvres dansant sur les miennes.

- Promets moi de ne jamais pleurer par ma faute Skye, susurra-t-il en continuant notre baiser.

- Je te le promets.

TWO - Chapitre 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant