Shape Shifter ~ Tome 2 ~

I. Relèves-toi et bats-toi

Les prémices du jour éclairaient à peine la cime des arbres de ses rayons encore doux et frais mais cela faisait bien longtemps que la journée avait commencé au cœur de la forêt du pays mythique.

Des bruits sourds émanaient d'entre les troncs, des gémissements, des pleurs, des cris de douleurs et d'efforts. Alors que le peuple émergeait de ses rêves enchantés, d'autres plongeaient dans leurs cauchemars. Et c'était ainsi chaque jours, depuis des mois.

Un rugissement bestial retentit alors au creux des arbres. Les oiseaux s'envolèrent et la forêt sembla retenir son souffle stupéfaite. Un silence de mort suivit le cri effroyable avant qu'une voix cinglante et dur comme la roche ne se fit entendre dans le calme plat.

- Reprends toi ! Ne le laisse pas te diriger !

Dans une petite clairière, cimetière d'un ancien temple abandonné par ses disciples et dont les arbres au feuillage dense ne laissaient qu'un mince puit de lumière se tenait une jeune femme à genoux sur la mousse verte qui recouvrait les dalles de l'ancien bâtiment.
La jeune femme était avachie s'appuyant sur ses mains pour ne pas tomber sous l'épuisement qui l'assaillait, son visage dirigé vers le sol était caché par un rideau de cheveux brun aux reflets sucrés du caramel.
Sa respiration était saccadée et son coeur lui donnait l'impression qu'il allait exploser tellement son rythme était élevé. Sa tête lui tournait et elle se retenait pour ne pas vomir et tomber dans l'inconscient.

Face à elle, un homme se tenait droit, fier comme un chêne et regardait de ses yeux vert et impassible la jeune femme à ses pieds. Ses mains jointes dans son dos, il semblait si fermé à toutes émotions comme si son coeur était aussi dur que de la pierre mais c'était loin d'être le cas. Il voulait la rejoindre, tomber à genoux à ses côtés et la serrer contre lui, lui dire que tout ceci était fini, qu'elle n'avait plus besoin de souffrir ainsi mais ça serait se voiler la face. Alors il restait debout, impassible et elle à genoux, épuisée.

- Relève toi, ordonna l'homme aux cheveux d'ébène.

La jeune femme s'exécuta lentement. Elle avança un pied, un genoux toujours à terre, pris appuis sur sa jambe et se releva chancelante. Quand elle reprit son équilibre et se tenait de nouveau debout prête à affronter son démon comme à chaque fois, elle planta ses yeux d'onyx dans les prunelles vertes de l'homme.

- Tu es prête ? demanda t'il.
- Jamais comme à chaque fois, rétorqua la jeune femme avec un faible sourire narquois.

L'homme sourit brièvement puis avança ses mains de part et d'autres de la tête de la brune et tendit deux doigts à chaque tempes. Il ferma les yeux pour se concentrer et la brune resta impassible savant ce qui l'attendait.
Soudain, le monde sembla si lointain comme si elle était entourée d'une bille qui l'isolait de tout. Des vapeurs vertes se mirent à émaner autour d'elle et s'insinuèrent dans ses poumons, dans sa tête rendant ses pensées floues et la faisant divaguer dans ses doutes et peurs.
Elle ferma les yeux brièvement et lorsqu'elle les rouvrit, elle se trouvait seule dans la clairière. C'était le même temple en ruine mais quelque chose sonnait faux dans le lieu. C'était comme si tout ce qui l'entourait n'était qu'une illusion. Et ça l'était. Tout ce qui se passait était dans sa tête.

Il faisait calme mais la jeune femme savait que ça n'allait pas durer. Bientôt la tempête arriverait balayant la jeune femme sur son passage et cette tempête n'était autre que son démon, Léplas.

« Tu es têtue, raisonna soudainement une voix gutturale »

La jeune femme aperçu à travers le feuillage dense deux yeux oranges luisants dans la pénombre des sous-bois.

- Ô combien, marmonna la fille.

L'immense chien sortit enfin de sa cachette pour faire face à la jeune femme. Ses muscles imposants saillaient sous son pelage d'ébène luisants. Sa gueule à demi ouverte laissait entrevoir des crocs ivoires longs et pointus comme des poignards et une haleine putride s'en échappait.
Il était celui qui hantait ses cauchemars, il était son démon, la rage qu'elle devait calmer. Léplas lui faisait face.