Borderline (Profilage)

Chapitre 1 : Quatre ans plus tard

Vendredi 14 juin 2028

Adèle ouvrit lentement les yeux et sourit à la vue du léger anneau qui ornait son doigt. Elle fit tourner la bague quelques instants sur son annulaire. Un an. Un an jour pour jour qu'elle avait dit "oui" à Thomas. Tandis qu'elle s'adonnait de nouveaux à quelques rêveries, son mari enlaça sa taille de ses bras tout en l'embrassant dans le cou.

-Bonjour, femme de ma vie, susurra-t-il au creux de son oreille.

Elle sourit de nouveau, puis pivota légèrement sa tête afin d'embrasser Thomas sur l'épaule.

-Bonjour mon amour.

Il déposa un nouveau baiser dans son cou, puis s'empara délicatement de la main de son épouse pour en caresser l'anneau. Lui aussi s'était éveillé avec cette seule pensée. Un an. Un an jour pour jour qu'Adèle lui avait dit oui face à l'autel de l'église. Un an. Tant de choses se sont passées depuis ce jour de juin 2027 où elle avait fait de lui le plus heureux des hommes. Il y avait d'abord eu les premières longues phrases de Corentin, le merveilleux petit garçon que sa femme lui avait donné il y avait presque trois ans. Puis, Ulysse, maintenant âgé de onze ans, était entré au collège. Ulysse. Cet autre petit garçon qu'il élevait avec Adèle depuis leurs retrouvailles, et qui l'appelait désormais "papa". Thomas s'en était beaucoup rapproché lorsqu'Adèle était tombée dans le coma. Il s'était occupé de lui durant quatre mois, et lui comme Ulysse étaient à présent très attachés l'un à l'autre. La procédure d'adoption avait été relativement rapide. Une fois sa maman adoptive sortie de cette douloureuse épreuve, il n'avait fallu que quelques formalités administratives pour que l'assistante sociale accepte de lui confier la garde . Ils formaient une famille, après tout. Thomas avait expressément demandé Adèle en mariage, et cette dernière avait accepté. De plus, la jeune femme venait de découvrir sa grossesse, et les deux amants comptaient bien garder l'enfant. Les événements se présentaient sous les meilleures auspices pour le petit Ulysse, à qui l'on prévoyait un avenir stable et épanoui. Savourant le plaisir d'être l'un contre l'autre, Adèle dit soudain à Thomas.

-Si un jour on m'avait dit qu'on en arriverait là !, s'exclama la jeune femme.

-Quoi ? Qu'on se marierait ?, rétorqua son mari d'un air faussement offusqué.

-Oui ! Tu te souviens à nos débuts, tu étais tellement distant. Et moi, qu'est-ce-que j'étais insupportable, c'était à peine si on pouvait se sentir !

-C'est vrai. Et aujourd'hui ? Tu regrettes  ?

-Non. Pas un seul instant. C'est juste que je suis partie de loin. Jamais je n'aurais cru être capable de fonder une famille. D'abord de m'occuper d'un enfant qui n'est pas le mien, puis de m'engager dans une relation amoureuse durable, et surtout de mettre au monde un enfant.

-Comme quoi, la vie nous réserve de belles surprise, parfois.

Adèle acquiesça tout en se retournant pour s'allonger contre Thomas. Elle l'embrassa, prudemment d'abord, avec fougue ensuite. Tandis que leurs langues commençaient à s'enflammer, un ouragan débarqua dans leur chambre pour sauter sur la couette.

-CÂLINNNNNNN !!!

-Roh, Coco ! Mais tu es déjà debout, mon chéri ?, l'interrogea sa maman.

-Voui. Ulysse est déjà debout aussi et il mange ses céréales.

Adèle et Thomas se regardèrent d'un air attendri. Leur fils était si mignon... A presque trois ans, il faisait déjà de vraies phrases de grands. Il fallait dire qu'il avait aussi un très bon modèle à la maison : son grand frère ! Corentin le copiait dans les moindres détails, et, bien qu'Adèle craignait au départ que cela agace son pré-ado, Ulysse en était ravi et s'occupait très bien du bébé. A contre-coeur, la jeune maman leva la tête en direction du radio-réveil qui ornait leur table de chevet. 6h50. Il fallait, en effet, que les amoureux se lèvent s'ils ne voulaient pas arriver en retard à la DPJ. Adèle se retourna lentement tout en veillant à ne pas faire tomber Corentin , puis s'empara de son petit garçon afin de le prendre dans ses bras. Elle tira la couette pour s'extraire des draps.