Vous voyez cette fille toujours dans la Lune et le nez en l'air? Vous savez, celle qui ne semble jamais vraiment là, celle dont on pourrait facilement oublier la présence... eh bien c'est moi. Pourquoi je déconnecte mon esprit du monde autour de moi...
Dans un petit village de l'est de la France, niché au cœur des massifs alpins, vit un petit garçon du nom de Sofiane. Tout le monde le connaît dans la petite bourgade. Pourtant, c'est un enfant discret, et si par beau temps vous le cherchez, vous le trouverez assurément là-haut, perché sur la falaise qui surplombe la vallée. Ses yeux aussi bleus que l'azur du ciel, il contemple les oiseaux. Aaah comme il aimerait les rejoindre... Son regard rêveur perdu dans cette immensité bleue, il repense à sa journée d'école. Aujourd'hui, la maîtresse leur a demandé ce qu'ils voudraient faire plus tard. Ses camarades ont répondu pompier, astronaute, princesse, docteur... mais pas Sofiane. Quand est venu son tour, il s'est levé de sa chaise comme l'avaient fait les autres élèves, et a déclaré, tout fier : "Plus tard, je serais un oiseau!". Toute la classe a rigolé. Sofiane n'a pas compris pourquoi. Avait-il dit une bêtise? Il s'était rassis, songeur, tandis que la maîtresse rappelait ses camarades au calme. Les yeux dans le vague, il regarda par la fenêtre de la classe. Dans un arbre proche, un oisillon prit son envol pour la première fois, agitant frénétiquement ses petites ailes duveteuses. Sofiane sourit. Et à cet instant précis, il se fit une promesse : un jour, lui aussi prendrait son envol.
Depuis ce fameux jour, quatorze ans se sont écoulés. Quatorze ans de taquineries, de sourires tantôt moqueurs, tantôt désespérés. Tout le monde au village avait rapidement eu vent de l'étrange projet d'avenir du garçon. Il faut dire que la maîtresse est une femme bavarde. Et, étant en contact avec beaucoup de familles, la nouvelle s'était répandue comme une trainée de poudre. Pourtant, la détermination de Sofiane n'a pas changé d'un pouce. Il vient tout juste d'avoir vingt ans, et pour ne rien changer, il se tient au bord de la falaise, ses yeux dévorant le ciel comme s'il voulait s'y fondre. Cela lui avait manqué.
Trois jours durant, il avait plu à torrents, ce qui avait contraint le jeune homme à rester cloîtré chez lui. Et comme à chaque fois que le temps était contre lui, il s'était installé sur une chaise de bois, pour regarder la pluie cingler les carreaux. Dans ces moments là, un voile mélancolique tombait sur son visage, ternissant l'azur de ses yeux. Pourtant, et aussi inexplicable que cela puisse paraître, une lueur brillait toujours au fond d'eux. Comme pour rappeler que, même caché par de sombres nuages, le soleil ne cessait jamais de briller.
Justement, le voilà qui se montrait enfin. Le vent fouettant son visage, le jeune homme ouvrit les bras, accueillant avec une joie non feinte les premières lueurs du jour. Il savoura le spectacle que l'astre lui offrait, des étoiles plein les yeux. Un kaléidoscope de couleurs chaudes se mélangeait sur les fins nuages blancs, disséminés ça et là dans l'immensité du ciel. Il n'y avait pas phénomène plus magnifique en ce monde, Sofiane en était certain. Il était heureux d'avoir pu y assister. S'approchant du bord de la falaise, il contempla la vallée se teinter de rose et de orange, et tomba dans le vide.
Il ne cria pas. Au contraire, un sourire immense se mit à illuminer son visage, tandis qu'il plongeait vers l'herbe grasse des alpages. Sous lui, les prairies verdoyantes défilaient, parfois peuplées de vaches qui paissaient tranquillement. Elles lui paraissaient si petites... Glissant sur le vent, il regardait partout autour de lui, voulant graver chaque détail dans sa mémoire. Le paysage avait beau lui être familier, il le redécouvrait tous les jours. Chacun de ses vols était inoubliable. Oui, SES vols. Car Sofiane n'était pas en train de tomber dans les bras de la Mort, qui l'attendait pourtant en contrebas, tapie au milieu d'un troupeau de moutons. Il volait bel et bien. Les bras écartés, les yeux brillants, il contemplait sa vallée natale, écoutant le vent claquer contre sa combinaison de wingsuit. C'était un cadeau, que ses parents lui avaient offert il y a maintenant deux ans. Sofiane se souviendrait toujours de ce jour-là.
Après avoir passé l'après-midi au sommet de la falaise, il était rentré chez lui, tout guilleret. Et pour cause : ce soir-là, il fêtait ses dix-huit ans avec sa famille. Ses parents, ses grands-parents, son oncle et sa tante, et même son cousin de quatre ans, tous étaient présents. Il avait salué tout le monde, fait tournoyer son cousin dans ses bras, ce dernier riant aux éclats, et s'était installé à table. Après l'apéritif, sa mère s'était levée pour préparer le repas. Des spaghettis à la carbonara, son plat préféré. Comme il s'était régalé... Enfin, sa mère avait déposé le gâteau sur la table. Un chef d'œuvre chocolaté avec un cœur framboise. Salivant d'avance, Sofiane s'était hâté de souffler ses bougies sous les applaudissements et les "joyeux anniversaire!" de sa famille. Il était décidément trop impatient de goûter cette merveille. Mais ce n'était pas le clou du spectacle, loin de là. Lorsque le gâteau avait été englouti, ses parents avaient quitté la table et étaient revenus avec un gros paquet difforme, orné d'un petit mot qui disait "À notre cher oiseau, pour l'aider à prendre son envol"... Intrigué et curieux, le jeune homme avait saisi son présent et déchiré l'emballage. Quand il avait vu ce qui se trouvait à l'intérieur, Sofiane était resté bouche bée. Un équipement complet de wingsuit. Tremblant, il s'était relevé et, les yeux brillants, il s'était jeté au cou de ses parents, des larmes de joie dévalant ses joues. Il allait enfin pouvoir réaliser son rêve.
La peur qui l'avait saisi lors de son premier vol n'était rien face au bonheur à l'état brut qu'il avait ressenti ensuite. Ce même bonheur qui circulait actuellement dans ses veines. Tourbillonnant dans le ciel au-dessus de sa montagne, il se sentait libre. Libre comme l'air.
Ce n'est que cinq minutes plus tard que, décrivant un dernier cercle au-dessus de son hameau, il déploya son parachute et atterrit en douceur devant la porte de chez lui, un air serein sur le visage. Les rires moqueurs étaient loin maintenant. Tout le village, et même le monde entier connaissaient désormais Sofiane sous un autre nom : l'homme-oiseau.
************************************ Me revoilà! Et comme convenu, voici ma deuxième nouvelle! Elle avait pour thème le ciel :)
Elle vous a plu? Donnez-moi votre avis c'est très important pour que je m'améliore ^^'
Et si vous avez une idée de thème : dites-le ici >>>
À une prochaine :)
Dof.
🐧
EDIT 28/01/22 : Je viens de découvrir au journal TV qu'une femme qui fait du wingsuit se fait appeler la "femme-oiseau". Vous croyez que ça passe si je demande des droits d'auteurs pour le nom?
EDIT 5/04/22 : J'ai inscris cette nouvelle au défi #AimeSansHaine de DaneeshaKat (qui consiste à valoriser les écrits qui parlent de choses difficiles, comme par exemple le harcèlement, mais qui délivrent un message positif), et voici la couverture qu'elle m'a faite en retour!
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Elle est trop mignonne je trouve, je pense qu'elle aurait beaucoup plu à Sofiane 😊
