Les Chroniques de Narnia: Le Prince Caspian. Livre 1

Chapitre 4: L'Armée d'Aslan.

La marche vers le campement secret dura plusieurs heures. Laylah n'avait jamais autant marché et elle commençait à avoir mal aux pieds, à avoir faim et soif. Elle se demandait également ce que devenait sa mère et sa sœur, si elles n'allaient pas avoir d'ennuis à cause d'elle et si, tout simplement, elle les reverrait un jour.

"Nous y sommes Votre Altesse!"

Légèrement surprise d'entendre la voix du faune après ces longues heures de silence, la jeune fille releva brusquement la tête et observa la scène. Ils étaient toujours sous les arbres, même si la forêt était devenue beaucoup plus dense et beaucoup plus sombre qu'auparavant. Laylah fronça les sourcils mais ne vit rien à part une petite étendue d'herbe vallonnée.

"Tu es sûr que c'est ici Faz?"

Le petit faune lui offrit un large sourire qu'elle entraperçut dans l'obscurité, puis il se tourna vers la vallée et sortit quelque chose de sa sacoche qui ne l'avait pas quitté depuis qu'il s'était enfui avec la jeune fille. Laylah ne vit pas ce que c'était mais comprit quand il porta l'objet à sa bouche et commença à jouer: une flûte de Pan.

Alors doucement, l'obscurité sembla commencer à bouger. Des buissons émergèrent des Centaures, de derrière les arbres apparurent d'autres faunes, ainsi qu'une myriade de petits animaux, et même dans les branchages, des oiseaux et des écureuils se montrèrent timidement.

"Je savais que tout était vrai..."

"Mes amis! Approchez! J'ai une merveilleuse nouvelle!"

Faz rangea rapidement sa flûte avant de venir se placer au centre de la vallée, attirant toute l'attention sur lui.

"Je croyais que tu avais été pris?"

"Oui, et que tu étais mort!"

Un des Centaures s'approcha et gronda:

"On t'avait prévenu que si tu nous mettais encore en danger, tu aurais des problèmes petit être!"

Malgré l'obscurité, Laylah put voir que le faune rougit de honte, se tortillant sur place, visiblement mal à l'aise et elle fronça les sourcils avant d'intervenir.

"Hey! Laissez-le tranquille! Vous n'avez pas honte? Il a déjà eu assez peur comme ça avec les Telmarins, vous n'avez pas besoin d'en rajouter!"

Surpris, tous les Narniens se tournèrent vers l'intruse avant que plusieurs ne se cachent.

"Un Humain! Vite cachez-vous! Les Telmarins!"

Le même Centaure se retourna rapidement et dégaina son épée avant de la pointer sur la jeune fille qui ne bougea pas d'un pouce.

"Qui es-tu Humaine? C'est Faz qui t'a amenée ici?"

Le petit faune se précipita pour intervenir, mais il fut rapidement attrapé et soulevé de terre par un autre Centaure. Sans se démonter, Laylah fit un pas en avant.

"Je m'appelle Laylah Sinyatàri et je suis la fille de la Reine Thanéa."

Un silence accueillit ses paroles. Tous les animaux et toutes les créatures se regardèrent, incrédules. Puis plein d'hésitation, un petit écureuil se rapprocha et demanda d'une petite voix:

"Tu es vraiment la fille de notre Reine bien-aimée? La descendante des Grands Rois et Reines?"

A son tour, Laylah hésita. Était-elle réellement cette personne que tous attendaient? Accepterait-elle la responsabilité de tout un royaume? Sa mère, même adoptive, avait pris de grands risques pour l'élever et la protéger. Faz semblait en être persuadé également. Au fond d'elle, elle avait toujours connu l'existence du vrai Narnia et maintenant, ses croyances étaient tout ce qui lui restait.

La jeune fille baissa les yeux un instant avant de prendre une profonde inspiration. Puis elle releva la tête et acquiesça fermement.

"C'est moi."

Un nouveau silence envahit la petite vallée. Puis, un à un, les animaux et les créatures s'inclinèrent devant leur nouvelle reine. Puis, doucement, un aigle vieillissant s'approcha de la jeune fille. Il lui fit une révérence avant de relever la tête vers elle.

"Jeune Princesse, je suis Marrod. Vous ne vous souvenez sûrement pas de moi, mais c'est moi qui vous ai confié à Rosalyn la nuit de votre naissance. Et je tenais à vous dire que je suis plus qu'honoré de vous revoir à présent."

Surprise et touchée, Laylah lui offrit un sourire avant de s'incliner légèrement face à lui.

"C'est moi qui suis honorée de vous rencontrer, cher Marrod." 

*******

Le lendemain, Elissia regardait le Soleil se lever avec une colère non dissimulée dans ses yeux. Elle avait passé la nuit à repenser à tout ce qu'il s'était passé ces dernières années et sa jalousie avait définitivement pris le pas sur sa raison. La jeune fille en voulait à sa mère d'avoir accepté Laylah dans leur famille, elle en voulait à Laylah d'être simplement née, elle s'en voulait à elle-même d'être aussi jalouse du destin de sa sœur alors qu'elle ne serait jamais qu'une petite paysanne dans un royaume où Laylah serait Reine.

Finalement, après plusieurs minutes à tergiverser, elle se leva pour aller retrouver Rosalyn dans la petite cuisine. Mais à la vue du petit sourire heureux de sa mère, la jeune fille enfila rapidement ses bottes et sortit sans un bruit de la maison. Elle traversa le village à grandes enjambées, ignorant les appels des habitants et de ses amis, jusqu'au moment où elle se retrouva devant une garnison de soldats Telmarins. Une idée lui vint alors en tête. Il n'y avait qu'un seul moyen pour calmer sa colère et sa jalousie. Le seul moyen qui, pour elle, permettrait d'obtenir une vie différente et d'avoir ce que sa sœur allait bientôt posséder.

La jeune fille lança un regard en arrière à la petite cabane servant de maison à sa mère et à elle, puis, après avoir pris une profonde inspiration, elle s'avança vers la base militaire.

"Hey là! Vous n'avez pas le droit d'entrer Mademoiselle."

Elissia leva ses yeux bruns sur le garde avant de rassembler son courage en fixant son regard dans le sien.

"J'ai des informations importantes. Je dois parler à l'un de vos supérieurs."

Le soldat haussa un sourcil avant de lancer un regard au deuxième garde, qui acquiesça avant de s'éloigner vers l'un des baraquements. A peine un instant plus tard, il revint accompagné cette fois par un autre homme, un officier à croire son uniforme. Elissia l'observa attentivement avant de réaliser qu'elle avait déjà vu ce visage: la veille, près de la rivière.

"Mes hommes me disent que vous avez quelque chose d'important à dire? J'espère pour vous que cela est vrai sinon vous allez avoir de gros ennuis Mademoiselle."

Elissia prit une profonde inspiration pour calmer sa nervosité avant de faire une rapide révérence.

"Je crois en effet que les informations que j'ai en ma possession vous seront d'une grande utilité Monseigneur. Il s'agit des Narniens. Ils sont sur le point de se soulever et je connais le nom de leur leader."

Les deux soldats éclatèrent de rire, franchement amusés par les divagations de cette jeune fille, mais Glozelle, car il s'agissait bien de lui, fixa Elissia longuement avant de lui faire signe de le suivre à l'intérieur. Une fois passé la porte du baraquement, Glozelle lança un regard assassin à la jeune intruse avant de grogner:

"Vous êtes consciente que les Narniens n'existent  que dans les contes pour enfants?"

Elissia ne se démonta pas et inclina légèrement la tête sur le côté, un petit sourire en coin apparaissant sur son visage.

"Mais si c'était le cas Monseigneur, vous ne m'auriez pas prise à part pour me menacer de répercussions si j'en parlais à qui que ce soit. Parce que c'est ce que vous vouliez faire, je me trompe?"

Pris à son propre piège, le Général soupira avant de détourner les yeux un instant.

"Que voulez-vous en échange de vos informations?"

"Juste la satisfaction de voir une personne souffrir comme j'ai souffert."