La mort

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𝚄𝚗𝚎 𝚜𝚎𝚞𝚕𝚎 𝚙𝚎𝚗𝚜𝚎́𝚎 𝚟𝚘𝚞𝚜 𝚎𝚗𝚟𝚊𝚑𝚒𝚝,
𝚎𝚝 𝚕𝚎 𝚖𝚘𝚗𝚍𝚎 𝚎𝚗𝚝𝚒𝚎𝚛 𝚜'𝚊𝚜𝚜𝚘𝚖𝚋𝚛𝚒𝚝.

Chère Lili,

Aujourd'hui, nous t'avons fait nos adieux. Tout a commencé à 10h. Nous sommes allés à la messe. Toute la famille était là, mamie, papy, tata Sarah, les cousins, Addy... Tes amies aussi, Madelaine, Camila, Austyn, Taylor et les autres. Et Cole, bien sûr. Ah Cole ! Tu sais ça n'a pas été facile pour lui aujourd'hui. Dire adieu à la femme que l'on aime, en sachant qu'on ne la reverra plus jamais. Peut-être au Paradis si Dieu existe. Nous avions tout préparé pour toi, pour que tu gardes une image douce de notre chère famille. Si l'on peut dire que c'est encore une famille à présent.

L'église était grande. Des voûtes immenses montant au plafond, une froideur qui vous glace le sang. Pas un mouvement dans cet atmosphère figée par la mort. Une impression de très lente asphyxie. Tu as beau inspiré mais tu ne sens pas l'air descendre dans ta gorge et remplir tes poumons, alors tu respires de plus en plus vite, de plus en plus fort et petit à petit elle vient, cette sensation d'oppressement indescriptible. Tu recherches désespérément un signe pour te sentir vivante. Le prêtre est entré en premier, suivi des enfants de cœur, dont Addy faisait partie, puis tu les as rejoint. Un cercueil en bois remontant l'allée. C'est drôle car je m'étais imaginée te voir remonter cette allée un jour, pour rejoindre Cole, dans une robe aussi blanche que ton cercueil...

La messe s'est déroulée, les chants, les prières... Je déteste tellement la messe, Lili, c'est si long. Et celle-ci m'a parue sans fin. Tu sais, Addy, t'as chanté une chanson du haut de ses 4 ans, avec sa robe de dentelle noire et ses petite bottines, ses couettes de boucles blondes. La pauvre tremblait comme une feuille, je ne savais pas qu'elle avait une si belle voix, notre cousine, ta filleule. Les discours étaient tour à tour entrecoupés de sanglots. Puis, est venu le temps de bénir ton cercueil, entrouvert, des bougies étaient alignées et en fesaient le tour. Ton petit visage pâle, qui rayonnait encore de fraîcheur, malgré tout. Qui ? Qui aurait pu penser que tu ne te réveillerais plus jamais ? À mon tour, j'ai imité les autres, deux petites larmes ont roulé sur mes pommettes. Par réflexe, je les ai recueillies avec ma langue et elles m'ont paru si d'allées par rapport à d'habitude. Presque violentes. Je suis restée longtemps à te regarder, les yeux perdus sur tes contours, ta peau blanche, lisse, tes lèvres asséchées par le manque d'oxygène... Tes cheveux avaient été coiffés d'une broche pour dégager ton cou, où l'on cherchait désespérément une pulsation, comme un dernier message d'espoir. Je suis retournée m'asseoir à ma place. Le contraste remarquable de cette petite foule vêtue de noire dans cette chapelle de pierres blanches.

À la fin, nous sommes repartis en cortège silencieux vers le cimetière. Personne n'a osé prononcer une seule parole, Lili. Maman a accompagné Cole à l'avant du cortège, juste derrière toi. Ces 300m nous ont parus les plus longs du monde je pense bien. Les pas étaient lents et lourds, la chaleur de cette matinée d'été tranchait avec nos sentiments. Je ne sentais bien plus le sol sous mes chevilles tremblantes. Le cercueil a été descendu lentement et avec précaution dans ce grand trou. Il semblait énorme, avant d'être rempli de ta personne. Ainsi, voilà l'endroit où tu passerais l'éternité. Tu fus recouverte par cette massive tombe de marbre noir. Une petite croix, une photo, une inscription :

Lili Reinhart

1996-2020

Un ange aux ailes brisées.

Tu as reçu beaucoup de fleurs, blanches évidemment. Peut-on dire que le nombre de fleurs sur une tombe permet de juger si une personne était aimée ou pas ? Pourtant l'amour ne peut être représenté, en aucune matière, par quelque objet matériel que ce soit. C'est d'ailleurs la difficulté avec les sentiments, on les ressents mais comment les partager et les expliquer aux autres ? C'est même étonnant que l'on puisse trouver une définition à l'amour dans le dictionnaire... Aucun mot, pour moi, ne peut être posé sur cette sensation et aucune définition ne pourra jamais être juste. Je le demande même si tout le monde ressent le même sentiment, ou si par convention nous avons dit que ce que l'on ressentait dans certaines situation s'appelait l'amour, alors que chaque personne ressent une chose différente. Je vais y réfléchir.

Mamie s'est évanouie pendant qu'il scellait ta tombe... Elle avait beaucoup pleuré depuis ses deux dernières heures, et là ce fut de trop. Elle a chuchoté, qu'elle aurait dû être à ta place, avant de s'effondrer. Dans un sens, on s'est tous dit qu'elle avait raison, mais quel que soit l'âge d'une personne qui quitte cette Terre, on se dit toujours que c'était trop tôt pour qu'elle nous abandonne... Cette journée est passée si lentement Lili, et dire que le temps continue de s'écouler inébranlablement, quoi qu'il se passe. Quoi qu'il se passe la vie continue de s'écouler sans un bruit.

Penses-tu que si plus rien n'existait le temps vivrait encore ?

Y a-t-il encore des secondes dans le néant ?

Je t'ai ouvert mon cœur une dernière fois, ma grande sœur. Tu vas me manquer terriblement Lili. Je t'aime et je t'aimerais toujours.

Tess, ta petite sœur qui t'aime tant.

- - -

Nous étions là devant la tombe de notre sœur, fille ou petite amie, simplement recouverte d'une couche de terre. Demain, ils viendront placer la pierre qui recouvre cette terre mais pour aujourd'hui, ils s'arrêtent là. C'est pourquoi, nous sommes encore là. Cole, a enterré, avec le corps sans vie de la sœur, le collier qu'il lui avait offert pour leur un an de relation, il y a quatre ans. C'était son collier préféré à ma sœur. Maman, elle, a enterré une photo de Lili et elle, alors que ma sœur venait de naître. Maman, la tenait tout sourire dans ses bras. Ce petit corps frêle, qu'on pensait pouvoir serrer dans nos bras encore longtemps. Papa, lui, n'a rien enterré mais a simplement déposé un baiser sur la pierre tombale en lâchant quelques larmes et en murmurant une dernière fois  « ma fille ». Chloé, n'était pas là ce soir. Elle essayait tant bien que mal de calmer Addy, qui voulait sa marraine et ne pouvait pas l'avoir, ne comprenant pas encore toutes les nuances de la mort. C'est normal à son âge. Et moi, j'ai enterré cette lettre. Elle ne sera sans doute jamais lue, mais j'ai ouvert mon cœur à ma sœur une dernière fois et ça m'a fait du bien. Alors que la nuit tombait, nous étions là, nous 4, deux filles et deux garçons se tenant la main, pleurant, pour te dire au revoir pour de bon.

Au revoir, Lili, tu nous manqueras.

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Hello, j'espère ne pas vous avoir fait trop pleurer. J'avais cette idée d'OS dans la tête depuis un moment mais je ne savais pas comment l'écrire vu qu'il est quand même vachement triste. Je l'ai finalement sorti aujourd'hui mais je tiens à vous rassurer que je ne suis pas dans ce mood là et que Lili, n'est pas vraiment morte. Bisous à tous.

Mes OneShootsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant