La piraterie dans le sang
Mon histoire a commencé en cette belle et chaude nuit d'été du 17 juin 1738. Le village de Saint-Domingue, non loin de Tortuga, trouvait toujours si tardivement l'ambition de faire beaucoup de bruit et de fêter et célébrer cette tranquillité qui les entourait. Pourtant, tous savaient, ivres comme sobres, que cela nuisait de plus en plus au commerce, d'ailleurs douteux si l'on en fouillait les tréfonds.
Ce soir-là, le village était baigné de lumières et d'éclats de rire. Les maisons laissaient leurs ombres dessiner de grandes tâches noires sur le sol de pierres et les poules en liberté, se plaisant à concurrencer les magasins environnants qui avaient largement dépassées leurs heures de fermeture – mais cela n'empêchaient guère aux commerçants d'encourager la folie joyeuse de leur clientèle du jour. Ici et là, on entendait des musiciens gratter les cordes de leurs luths, des pichets et des gobelets se percuter ; renversant sur les tables mousse et bières. Ici et là, on percevait les éclats de rire, les dés se jeter dans un mélange d'hasardé et de fourberies. Seulement, si l'on tendait l'oreille, on pouvait remarquer ce merveilleux, apaisant, son de vagues qui venaient s'amouracher de la baie poissonnière.
C'est alors que dans la nuit noire, deux silhouettes sortirent d'un bar à malfrats. Le pas chancelant, la bouche pâteuse, le premier homme s'exclama :— Mon cher Gibbs ! Tu as vraiment décidé de m'achever !
Le dénommé Gibbs, la bedaine ronflante et le regard pétillant, lui fit remarquer d'un air narquois :
— Orh... Moi qui croyais que vous aviez décidé de vous amuser... Oh ! Mais que vois-je ? 'ardez, Jack, devant nous !
Deux jeunes femmes, à la beauté attrayante et aux tenues désinvoltes, fardées telles des filles de joie, chantonnaient grossièrement l'air de la piraterie. Un homme digne n'aurait pas reconnu la chanson, il aurait même passé son chemin. Mais cette distinction ne faisait pas partie des compagnons pirates.
— Oh ! Bien le bonjour, Mesdames ! chantonna Gibbs, une fois arrivés à leur niveau.
— Vous êtes d'une beauté exaltante, mes gazelles ! susurra Jack, en inclinant son tricorne.
Les deux jeunes femmes gloussèrent, telles des dindes, et la plus élancée jaugea Jack du regard. Elle se mordilla la lèvre. Il se lissa la barbichette.
— Quels sont vos noms, Messieurs ? demanda-t-elle d'une voix aiguë.
— Je me présente ! Cap'taine Jack Sparrow, pour vous servir...
La demoiselle rit aux éclats et s'accrocha à son bras avec ferveur. Puis, en témoignage de sa corruption par la canaille du beau monde, elle lui lança un regard fiévreux.
— 'suis fauché, j'ai tout donné pour une dernière bouteille, prévint aussitôt Jack.
— Pas comme le temps, je présume, persifla la jeune femme en commençant à se détacher de lui.
— Oh, j'accepte d'en perdre avec vous, si tel est votre souhait, ma colombe...
Et c'est ce qu'il fit. Avec grand malheur car il en resta profondément ensommeillé, sans même entendre l'arrivée tonitruante des autorités anglaises.
L'Ouest de l'Île de la Tortue avait été repérée, pour la première fois en toute l'histoire de la piraterie. Un navire du Port Royal avait accosté, avec lui une flotte de trois autres bateaux qui firent retentir le bruit de leurs canons. Ce fût sans attendre que le village se réveilla et que les habitants sortirent de leur maison, intimant à femmes et enfants de prendre la fuite et de se cacher.
Des navires sortirent des équipages entiers, prêts à intercepter et mettre au fer tous ces forbans et flibustiers. Les hurlements ne tardèrent pas à résonner. On dégaina pour les plus braves épées, sabres, pistolets, poêles et même des cuillères – tout ce qu'on possédait sous la main, à vrai dire – pour combattre ces hommes qui ne savaient vivre simplement et pour qui la piraterie n'était qu'un excès d'un manque d'ordre et de discipline.
Les marchants cachaient leurs provisions, enfermaient à double-tour leurs bétails et – surtout ! - leurs bouteilles. Les mères protégeaient leurs enfants en pleurs. Les pirates agressaient et se défendaient à leurs manières ; les explosifs ne tardèrent par à s'associer contre les militaires.
Pourtant, parmi tout ce tapage – que dis-je ! cet imposant tumulte – parmi les gens qui se carapataient de toute part, une silhouette glissait contre les maisons, à l'ombre des rues, dans un silence impénétrable.
Son chapeau à plumes descendu à ses yeux, le corps élancé et les cheveux bruns qui caressaient ses épaules, la jeune femme tenait dans le creux de ses bras une boule de chiffon en laine blanche, cachant une forme bien distincte ; un bébé. Et apparemment, tout comme Jack, le nourrisson ne semblait pas être gêné par la pagaille autour de lui, ni par ces hommes et ces femmes qui hurlaient de terreur, attrapées par les militaires, ni même par cette explosion causée par une grenade ou encore moins par cette petite fille qui pleurait à gorge déployée à la recherche de sa mère.
La silhouette, elle, tira son épée de son fourreau et la planta dans le thorax d'un officier. Il s'écroula sans vergogne. Renfermant sa prise sur le bébé, la jeune femme s'approcha de l'auberge et atteignit son but : la chambre où logeait Jack. Elle l'avait d'ailleurs observé toute la soirée.
Enfin arrivée devant la porte, elle y frappa vigoureusement.
Jack se réveilla en sursaut. Les yeux écarquillés, il s'assit vivement pour tenter de comprendre pourquoi il avait si mal à la tête. Il lorgna sur les draps emmêlés et vides de chaleur féminine.
Isabella était partie. Isabella ou Estella, d'ailleurs ? Il n'arrivait pas à s'en souvenir, tout paraissait brouillon.
Poum, poum, poum !
Jack tourna immédiatement ses yeux bordés de khôl vers l'entrée de sa chambre. Et en constatant le bruit infernal qui régnait dehors, il grimaça.
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Pirates des Caraïbes - Le trésor perdu de Lucifer
Fanfiction1733. Ou la naissance d'une nouvelle légende portant le nom des étoiles : Céleste Sparrow, descendante d'une nuit entre Jack Sparrow et Angelica Teach. Et bien que la piraterie lui aille merveilleusement au teint, la vie de Céleste prend un autre to...