Hors du rêve

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Le rêve se déchira en son milieu, les renvoyant chacun dans ce monde qu'ils désiraient tant oublier. Chacun seul. Séparés de nouveau.

Gellert disparut des bras d'Albus, et Albus des bras de Gellert.

Ils furent arrachés l'un à l'autre, si violemment qu'ils sentirent leur esprit se fendre en deux.

Albus, face au miroir du Riséd, tituba et heurta le mur derrière lui brutalement, mais ne le remarqua même pas. La douleur physique était accessoire.

- Non ! Gellert ! hurla-t-il.

Il courut vers le miroir, éperdu, le fixant intensément, tournant autour sans réfléchir, tambourina dessus de toutes ses forces.

- Je dois retourner là-bas ! Laissez-moi y aller !

Il cria à s'en écorcher la voix pendant ce qui lui parut des heures, fermant les yeux pour évoquer l'image de son amant et le songe dans lequel il se trouvait, tenaillé par l'espoir chimérique que le miroir allait s'animer de nouveau, mais celui-ci ne lui renvoyait que son propre reflet.

Au fond de lui, Albus savait que c'était vain. Même si Gellert apparaissait, ce ne serait pas vraiment lui, tout au plus une projection du plus profond désir du jeune homme. Une image. Une illusion.

Ce qui venait de se passer ne se reproduirait plus. Comment était-il possible qu'une chose pareille se soit réalisée, même une seule fois ? Était-ce lié au don de vision du mage noir ? Au pacte de sang ? Aux deux, peut-être, ou bien à aucun.

Mais le miroir n'avait pas pour vocation de servir de pont entre deux mondes, entre deux esprits. Il reflétait simplement ce qu'on voulait y voir. Il ne permettait pas de communiquer, ni de réaliser ce qu'il montrait, peu importait combien on le souhaitait.

Et puisque Gellert et Albus avaient été déclarés ennemis, c'était tout ce qu'il pourrait faire, désormais.

Le jeune homme recula tandis que la vérité - qu'il avait repoussée autant qu'il le pouvait - s'imposait inexorablement à lui. Puis il se laissa glisser le long du mur, ramenant ses jambes et ses bras contre lui pour se recroqueviller contre la cloison.

- Gellert...sanglota-t-il doucement.

***

Gellert se réveilla en sursaut, suffocant. Là où un instant plus tôt, il tenait Albus, il n'y avait plus que le vide. Le pacte de sang flottait toujours au-dessus de sa tête, l'arrête du bureau s'était enfoncée dans sa chair et les feuilles froissées avaient laissé des marques sur son visage.

Mais il n'avait conscience que de la douleur. Albus n'était plus là et s'ils se revoyaient, ce serait pour s'affronter. Quelque soit l'issue du duel, jamais plus ils ne pourraient se retrouver en paix. Pas de fin heureuse pour eux, pas de belle histoire d'amour.

Juste la peine. L'absence.

Le désespoir le submergea. Gellert enfouit la tête dans ses mains et fondit en larmes.

- Tu me manques, Albus... Tu me manques tellement.

Le temps d'un rêveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant