Entretien Avec Mr. Powinski

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J'avais donné rendez vous pour mon interview à Moscou dans une salle isolée au fond d'un café près d'un grand théâtre au cœur de la ville. Après cinq minutes d'attente, et le temps de préparer mon matériel, mon interviewé rentra en me serrant la main. Un soixantenaire souriant, imberbe, qui avait encore des cheveux mi-longs sur la tête, bien qu'un peu dégarnis. Ce n'était pas en tout cas un homme si torturé comme me l'avais décrit un contact qui le connaissait il y a cela quarante ans, il avait sûrement eu le temps de changer depuis. Néanmoins, au fur et à mesure de mon interview, il souriait de moins en moins et prenait de très longues pauses dans sa douleur de remémoration. Je vous laissez alors mon interview tel que je l'aie vécue, en éspérant avoir brodé le moins possible. Peut-être était-elle imparfaite, j'étais jeune et je ne la faisait que pour moi, le journal ayant refusé de publier celle-ci par la banalité des questions.

"Bonjour Mr. Powinski. Vous avez contribué à une très longue affaire d'Amérique du nord qui a secoué le monde durant quelques années. Je n'ai évidemment pas à rappeler ceci à mes lecteurs. Première question qui m'est venue dès lors que j'ai essayé de vous joindre, pourquoi êtes vous venus habiter ici?

- Je suis né ici, en 1929. J'ai parcouru un peu toute l'Europe, la Pologne, l'Ukraine. Je suis très attaché à ces terres. Mais j'ai dû fuir pour des raisons politiques, et quand le mur de Berlin est tombé je venais d'essuyer un divorce à mes cinquante neuf ans, j'ai décidé de revenir après une longue retraite. Le pays s'est complètement changé, je ne reconnais plus ma ville, pourtant cet air me manquait, et je suis bien entouré dans mon village de Sibérie occidentale.

- Qu'avez vous fait après cette sinistre affaire?

- Hé bien, je voulais changer la ville. Dès que cette organisation a été dissoute, je me suis empressé de remettre le socialisme sur le droit chemin à Bruckston, j'ai été engagé comme secrétaire adjoint au parti communiste de Bruckston. Mais, après vingt ans de lutte, tout s'est effondré et nous n'avons presque pas gagné d'élection. Les premiers ministres étant tous sans étiquettes et menait des politiques centristes aussi bonnes soient-elles. On pourrait très bien me blâmer du fait que j'ai profité d'une situation pour mener à bien mon utopie, mais sans succès. Le peuple de Bruckston ne voulait sûrement plus de tout ça. Alors j'ai continué en tant qu'écrivain, j'ai publié mon récit qui a été adoré et brûlé, et lorsque je me suis fait oublier, après quarante ans de vie citadine, j'ai pris un avion pour Pétersburg. J'ai beaucoup souffert de cette histoire. Mais avec l'âge, on s'assagit."

Il avait craché sa chique, et insatisfait, s'était allumé une cigarette.

"Comment avez vous découvert toutes ces choses affreuses?

- Hum... - il eût un regard sinistre, comme si j'avais touché à quelque chose de sensible – Je ne me souviens pas très bien... Enfin, il y a prescription. - il s'emmêlait totalement dans ses pensées à haute voix – Je crois bien que j'ai soupçonné Donoré moi même. - Il se glissa dans son fauteuil en regardant le plafond pour réfléchir – Certes, moi même je pensais à une sauvagerie de mon extrême, mais il s'avérait finalement que c'était vrai, à force de fouiller à Paris. Mais il me semble que même avant, j'avais impunément assassiné le représentant initial des chapeaux noirs pour les élections. - A ce moment là je me raidit, la confession d'un meurtre semblait ne pas l'atteindre – Tout ceci était très bizarre, mais j'ai comme eu une intuition.

- Vous ne m'en voulez pas de vous demander vos sources?

- Non pas du tout, tout ça est derrière moi maintenant. Vous savez, j'ai une tumeur depuis un an. Elle s'est stabilisée, mais je ne m'en débarrasserais jamais et je sais pertinemment que je vais y passer, alors autant tout livrer à quelqu'un avant que je ne l'emporte dans ma tombe.

Sensations et émotions (Expérimental)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant