Le mouton noir

Chapitre 4

            La touche sarcastique était obligée ? Je dois déjà me taper Hugo pendant deux heures, franchement, j'aurais pu m'en passer.

            Nous nous dirigeons tous vers les salles qui nous ont été réparties. Hugo et moi entrons dans la g14. Les tables sont toutes contre les murs et le sol est recouvert de costumes et de petits livrets, qui doivent être les scriptes qu'utilisent les élèves de la classe Théâtre. Ils auraient plus ranger un minimum, franchement.

            Hugo me regarde et je lui lance un regard blaser avant de m'avancer pour ramasser les vêtements qui trainent à mes pieds.

« - Si on commence maintenant, on finira peut-être plus tôt, je dis en me dirigeant vers l'un des portiques placés dans les quatre coins de la pièce. »

            Hugo me suit. Il attrape, lui aussi, ce qu'il trouve sur le sol, et fini par me rejoindre. Nous restons silencieux pendant plus d'une demi-heure.

« - Tu viens à la soirée vendredi soir ? me demande Hugo en coupant le silence.

- Quelle soirée ? A l'évidence, je ne suis pas invitée.

- Ce n'est pas grave, si tu viens avec moi, ça serait comme si tu étais invitée.

- Et pourquoi j'irais avec toi ?

- Parce que tu as besoin d'une bonne soirée, insiste Hugo. Je te connais Noa, je sais que ça te manque les soirées comme celle-là.

- C'est chez qui ? Je ne veux pas me retrouver chez Emma ou Rose, je préfère mourir.

- Ne t'inquiète pas, c'est Alix qui organise la soirée.

- Alix ou les autres, je ne serais jamais la bienvenue.

- Mais si aller, viens. On va s'amuser.

- Bon ok, mais je viens avec Lola.

- Marché conclu, fini par répondre Hugo. »

            C'est vrai que Lola n'est pas bien en ce moment. Elle a besoin d'une bonne soirée pour se changer les idées, même si pour ça, je dois supporter toutes les personnes que je déteste.

            Pendant le reste de la colle, nous parlons de tout et de rien pour passer le temps. Ces moments m'avaient manqué, mais je sais très bien qu'on est loin de redevenir les amis qu'on était.

            Après avoir nettoyé de fond en comble, deux salles de classe et demie, le directeur entre dans la salle pour nous annoncer la fin de la colle. Aussitôt, j'attrape mon sac, posé à côté de la porte, puis je sors en trombe de la pièce.

« - Attend ! »

            Je m'arrête net.

« - On est toujours voisin, je te rappelle, continu Hugo. On rentre ensemble ? »

            J'acquiesce avant de continuer ma route dans la direction de l'escalier. Hugo me rattrape en courant sur quelques pas.

« - Je suis content qu'on se reparle, ajoute-t-il avec son plus beau sourire.

- Ne t'emballe pas trop vite, ce n'était qu'une colle, je réponds en rigolant. »

            Le retour à vélo se passe plutôt bien. Enfaite, j'ai même passé un bon moment avec lui. C'est vrai que lorsque le directeur m'a annoncé qu'on passerait deux heures ensemble, j'étais à deux doigts de la crise cardiaque. Mais on a bien rigolé. Ça me rappelle des souvenirs.

            Quand je rentre chez moi, je balance mes chaussures dans le couloir, salut mes parents, puis monte dans ma chambre. Ils ne m'ont même pas demandé pourquoi je rentre aussi tard. Il est dix-neuf heures quand même. Je pense qu'ils s'en foutent. Depuis la mort de... depuis l'accident, ils ne me demandent plus rien. En même temps, ils ont l'habitude que je rentre tard. J'aime bien le silence des rues désertes. Ça me laisse le temps de réfléchir. De me vider la tête. C'est devenu une sorte de petit rituel. Mais ce soir je décide de ne pas sortir. Il est déjà tard, et puis j'ai des devoirs à rendre pour demain.

            Je suis assise sur mon lit. J'allume mes leds qui sont accrochés sur le mur derrière moi. Je fini par mettre du jaune. C'est une couleur qui symbolise la sagesse et l'imagination. J'espère que ça va m'aider pour écrire dissertation sur Baudelaire que je dois rendre demain. Il faut vraiment beaucoup, beaucoup, beaucoup d'imagination pour écrire 6 pages sur les œuvres d'un auteur qui est mort il y a des décennies. Non mais sérieusement, ça nous sert à quoi de connaître tous ces auteurs ? Leurs œuvres sont nuls en plus, je n'arrive pas à les lire. Du coup je lis la moitié puis cherche le résumer sur YouTube. De toute façon, même les quelques pages que je lis, je ne les comprends pas. Alors ça ne sert à rien de se torturer alors que nous avons tous à porter de main, notre meilleur ami qui nous sort de tous les pétrins, Internet.

            Il est vingt-et-une heure et demie, je commence à avoir faim. Je descends dans la cuisine pour prendre la première chose mangeable que je trouve. Ça sera donc les reste de pâtes d'hier, que ma mère a laissé au frigo et un yahourt au chocolat. Je passe l'assiette au micro-onde et cherche rapidement mes parents du regard. Comme d'habitude, ils se sont endormi sur le canapé devant leur émission préférée sur les pierres qu'ils ratent tous les soirs. Rien de très intéressant. Je me dirige vers la télé pour l'éteindre et remonte dans ma chambre.

            Je n'ai pas encore fini ma dissertation, mais je fais quand même une pose. Ça fait deux heures et demie que je travaille sur ce fichu devoir. Baudelaire, je ne peux plus le voir. Je vais balancer Les Fleurs du Mal par la fenêtre, suivi bien évidemment par son spleen et son idéal.

            Je reprends mon ordinateur et allume Netflix. 13 reasons why et Justin m'ont attendu sagement toute la journée.

            Mais avant de commencer mon épisode, une lueur verte attire mon attention vers ma boite à bijoux qui se trouve sous mon miroir. Ça brille. Je ne me rappelle pas avoir un collier ou un bracelet de cette couleur. Je descends de mon lit et m'approche. Je m'arrête net. Mon reflet dans le miroir n'est pas le même que d'habitude. Je n'ai plus de cicatrice sur ma joue. Mais quand je passe ma main, je la sens. C'est une sensation très étrange. Je me rapproche de mon miroir, ma cicatrice n'apparait toujours pas.

            Soudain, la lueur, juste à côté de moi, est encore plus intense. Je tourne la tête. C'est un pendentif, incrusté d'une émeraude. Quand je la prends, elle brille d'avantage.

            Mais comment ce collier a pu se retrouver dans ma chambre ?