|le grand saut|

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(Je conseille la musique pour pouvoir être plus apte à se plonger dans le texte et ressentir tout ce qu'il peut faire naître)

Mon regard est perdu dans l'horizon au couleurs de la nuit qui s'étire en une ligne droite, la brise d'été faisant voltiger mes cheveux qui caressent ma peau. Ma main agrippe la rambarde devenue tiède au contact de mon épiderme et mes doigts s'enroulent autour de cette barre de fer qui sera la dernière chose à laquelle je me tiens, le dernier élément auquel je me raccroche. Tout sera différent à présent. En ce jour de mi-juillet, ma vie prend un différent tournant. J'avais pris la décision la plus difficile de ma vie, et désormais tout mon corps en était apaisé. Le poids qui rendait chacun de mes battements de cœur douloureux avait disparu en même temps que le noeud autour de ma gorge s'était volatilisé. Je me sentais légère, plus que je ne l'avais jamais été. Mes frêles épaules avaient été débarrassé du fardeau qu'elles soutenaient et qui pesait de plus en plus lourds à chaque instant, chaque insulte, chaque humiliation, et affaissait mon dos qui se tenait désormais droit face à l'adversité. Une harmonie infinie régnait en mon être et les ondes dévastatrices que dégageait mon esprit instable avait laissé place à la plus mélodieuse symphonie que je ne pourrai jamais composer. Ça y est. Je suis enfin prête, et le moment qui précédait le début de la fin était le plus agréable que j'avais connu. Mon sort est d'une grande et injuste ironie. Qui sait ce qui m'attendrait de l'autre côté? Je n'en savais rien. Tout ceux qui avaient entrepris de s'engager dans ce long périple n'avait jamais refait surface après avoir plonger dans les ténèbres de l'inconnu. Un rire cristallin s'échappe de mes lèvres, brisant le silence mélancolique de cette nuit céleste. Quel drôle de fait. Les étoiles seront les témoins silencieux du geste que je m'apprête à faire, de l'acte auquel j'ai et avais toujours été destiné , malgré le nombre incalculable de fois où j'ai essayé de fuir. On n'échappe pas à son destin. Je crois que j'en serais l'éternel et inéligible preuve. Un jour quelqu'un a écrit que l'on mesure la valeur d'un homme à la façon dont il affronte la peur. Et bien, toi, noble et vaillant soldat, regarde moi. Porte moi toute ton attention et ne détourne pas les yeux. Admire comment je fais face à la fatalité, comment je m'imprègne de toute sa cruauté et la transforme en quelque chose de bien plus grand, bien plus beau. Observe la façon dont mon cœur bat paisiblement, dont mon sang s'écoule lentement et calmement dans mes veines, le long des muscles qu'il vient alimenter de sa force, comment tout mon être pulse a l'unisson, faisant vibrer chacune de mes cellules, faisant vivre mes pensées, aussi sombres soit-elles. Car non, je n'ai pas peur. Mes jambes ne tremblent pas, les fourmis ne viennent pas me chatouiller les membres, ma respiration est tout sauf inégale et mes yeux tout sauf emplis d'inquiétude. Au contraire. Je ne me suis jamais senti autant en paix avec moi-meme. J'allais quitter ce monde de brutes, ce royaume de violence pour un endroit où je retrouverais ceux qui me sont chers, là où le soleil rayonnera en permanence, où chacun est traité avec respect et où l'existence de personne n'a jamais dérangé quelqu'un. Je suis persuadé que ce lieu existe et que j'allais enfin pouvoir y accéder, alors non, je ne suis pas terrifié. Pourquoi le serais-je? De toute façon, même si j'atterrissais en enfer, je m'y sentirais mieux qu'ici. Je pris une grande inspiration, sentant l'air s'infiltrer dans mes poumons avant de s'en aller. Je pris appui sur mes avant-bras, mauvis mon bassin et passai mes deux jambes de l'autre côté, afin que je puisse m'assoir sur le maigre cylindre de fer qui me maintenait par dessus le sol. Soudain, l'image de ma mère me vint à l'esprit. Elle était souriante et accueillante, avec son teint café et ses yeux noisettes. C'était d'ailleurs l'un de ses fruits préférés. Elle aimait s'en amuser. C'était la seule chose qui me retenait ici et j'eu un pincement au cœur. Elle allait être dévastée après mon départ. Qu'elle ne se sente pas coupable, elle a joué son rôle à la perfection et m'a élevé seule comme une battante. C'est la personne la plus admirable que j'ai connu de ma courte existence. Je suis désolée, maman, mais je ne suis pas aussi forte que toi. Une larme coule sur ma joue, douce et salé. Elle a le goût de l'après. Je lève les yeux pour la dernière fois. Les astres me tendent la main. Je leur souris. J'arrive. Je vous rejoins. Alors, à l'instant qui me semble le plus juste, les paumes de mes mains me propulsent vers l'avant et je chute tout droit vers le béton. Mon corps va à une vitesse folle, si bien que je ne sens pas le temps passer avant que je ne perde connaissance.

Planète bleue, existence misérable, je vous tire ma révérence.

J'ai essayé, je vous le jure.

𝔪𝔦𝔡𝔫𝔦𝔤𝔥𝔱 𝔱𝔥𝔬𝔲𝔤𝔥𝔱𝔰Où les histoires vivent. Découvrez maintenant