Je m'appelle Rachel Softon et je suis photographe. Mais pas n'importe quelle photographe. Je ne fais que les portraits. Les visages me fascinent, et j'adore capter les émotions des gens dans mon appareil à l'ancienne qui me vient de mon grand-père. Bien sûr, à côté de cela, je fais des photos « alimentaires », comme on dit. Je dois bien gagner ma vie. La plupart des contrats que l'on me propose ne sont pas très intéressants, mais un jour, on m'appela pour me proposer de photographier un petit garçon, et ce pour une très belle somme d'argent. Je sautai donc sur l'occasion, mais je ne savais pas ce qui m'attendait en me rendant chez les Waterford, ni ce qui résulterait de mon travail chez eux.
Paul et Gillian Waterford possédaient une demeure extrêmement luxueuse, et quand j'y pénétrai, je fus stupéfaite par la majesté de l'endroit. Monsieur Waterford m'accueillit et me conduisit au premier étage, là où je devais photographier son fils de dix ans, Ben. Je le trouvai peu sympathique et il avait l'air nerveux. En arrivant sur le palier, il me prévint qu'il m'avait engagé pour des photos peu conventionnelles, et quand il ouvrit la porte de la chambre de son fils, je le trouvai allongé sur son petit lit, dans un beau costume, sa mère assise à ses côtés, sanglotante. Tout de suite, je ne saisis pas tout, et puis en m'approchant du lit, je compris avec effroi que cet enfant était mort. Je fus extrêmement choquée. J'avais entendu parler de ce procédé qui consistait à photographier les défunts, mais je ne savais pas que ce genre de pratiques étaient encore courantes de nos jours, et quand bien même, c'était quelque chose qui me répugnait au plus au point. J'en fis part à monsieur et madame Waterford, et je m'apprêtais à quitter la chambre, quand la femme m'attrapa par le bras en me suppliant de faire ces photos, doublant même ma rétribution. J'eus finalement pitié de ces gens, et j'acceptai, même si c'était en totale contradiction avec mes principes moraux.
Cette séance fut extrêmement éprouvante, pour ne pas dire épouvantable, mais je m'acquittai de ma tâche avec professionnalisme. Quand j'eus terminé, les Waterford me remercièrent mille fois, puis je pris congé, avec un gros chèque dans ma poche, et en leur promettant de leur envoyer les clichés le plus rapidement possible.
En rentrant chez moi, je m'empressai de me mettre au travail. Je voulais développer ces photos au plus vite, et quand ce fut fait, je les glissai dans une enveloppe à l'attention de monsieur et madame Waterford, et je me mis au lit, épuisée par cette journée pour le moins étrange.
Ma nuit fut peuplée d'horribles cauchemars, et quand je me réveillai en sursaut le lendemain matin, j'étais en sueur. Je pris une douche, et une fois mon petit-déjeuner avalé, je partis pour le bureau de poste afin d'envoyer les photos aux Waterford. Quand ce fut fait, je n'avais pas tellement envie de rentrer chez moi et de me retrouver seule dans mon appartement. J'étais encore troublée par les mauvais rêves que j'avais fait la nuit précédente. Je décidai donc d'aller faire un peu de lèche-vitrine afin de me changer les idées.
Je marchais tranquillement sur le trottoir, m'arrêtant de temps à autre devant une boutique, quand une jolie paire de bottes à talons attira mon regard. Je m'approchai du magasin pour les voir de plus près, quand soudain, dans le reflet de la vitrine, derrière moi, je vis un petit garçon qui ressemblait à Ben. Je pris peur et me retournai brusquement. Bien sûr, il n'y avait personne. Je me dis que c'était probablement une illusion d'optique ou une manifestation de ma nervosité. Je décidai de rentrer chez moi pour travailler et essayer de chasser de mon esprit cette vision étrange.
Une fois à la maison, je travaillai donc un peu avant de sortir avec mes amies. Je réussis à me concentrer sur ma tâche, et ne vis même pas l'heure tourner, à tel point que je dus me préparer en vitesse pour mon dîner. Je passai une excellente soirée, et en rentrant, j'étais si épuisée, que je me couchai tout habillée, sans même prendre la peine de retirer mes escarpins. Je fus réveillée en sursaut par les mêmes cauchemars que la veille. Mon réveil indiquait trois heures. Quand je me retournai, je vis avec effroi le petit Ben debout au pied de mon lit. Prise de panique, j'allumai aussitôt la lumière. Je regardai de nouveau, mais il avait disparu. Je ne réussis pas à me rendormir, tant cette vision m'avait effrayée. C'était la deuxième fois que je le voyais. La première fois, j'avais cru à une illusion d'optique, mais la seconde fois, je compris que c'était bien lui que j'avais aperçu dans le reflet de la vitrine. Cet enfant me hantait-il ? Son esprit n'avait-il pas apprécié que je le photographie après sa mort ? Voilà autant de questions auxquelles je n'avais aucune réponse.
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Esprit, es-tu là? (Recueil de nouvelles)
Historia CortaUne petite fille qui erre sur une route déserte en pleine nuit, le fantôme d'un serial killer prisonnier d'un livre, une poupée diabolique... Voilà autant d'histoires qui vous feront frissonner d'émotion ou d'angoisse. Dans ce recueil de nouvelles f...