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Posant mon sac sur le sol, je fixe mon salon.
Un soupire de soulagement traverse mes lèvres alors que je relâche la pression de ce premier jour de rentrée.

Ni les étudiants, ni l'amphithéâtre ne m'avait manqué.

Je laisse mes chaussures à l'entrée et me sert un verre d'eau.
L'eau fraîche me détend et termine de chasser cette horrible sensation de reprendre les corvées après deux mois calmes et reposant.

En repensant à mon séjour en Italie, je me demande alors si reposant est le mot adapté pour cette expérience.

En effet, la découverte d'une nouvelle facette de ma personne n'avait ni été simple, ni tranquille.

Beaucoup de doute et de fatigue.
Le doute d'un jour réussir à être autre chose que moi et la fatigue de constater à quel point j'ai raison de douter.

Mais cette réflexion s'arrête net quand un grattement se fait entendre à ma fenêtre.

Un coup d'oeil à l'horloge m'indique que le soleil s'est bel et bien couché.

Et cette joyeuse conclusion m'arrache un sourire.
Inutile de me retourner lorsque j'entend la fenêtre s'ouvrir, car son odeur envahi déjà la pièce.

Une odeur autrefois désagréable pour un nez lupin.
Mais pour mon coeur, celle ci est bien trop agréable.

Je me retourne alors lentement pour découvrir ces deux iris grisâtres et cerclées qui me fixent depuis quelques minutes déjà.
Profitant de l'atmosphère apaisante qui s'installe, je souris en coin et murmure d'une voix taquine :
« Mais vas y, je t'en pris entre.

C'est un murmure tout aussi taquin qui me répond alors :
- Maintenant je suis aussi chez moi ici, je n'ai plus besoin de demander.

Comme pour illustrer son propos, Ezio s'approche et encercle mon cou de ses bras.
Laissant son menton reposer sur mon torse, il m'observe pensif.

- À quoi penses tu ?
- J'ai soif... Mais je veux pas sortir seul, là j'ai envie de rester avec toi.
- Tu sais que je suis pas fan de la quête du soir mais...
- S'il te plaiiiit... Le regroupement de vampires est à 10 minutes d'ici.

Absorbé par son regard hypnotisant, je souffle en signe d'abandon.
Il sautille presque comme un enfant et saisi ma main.
- Allez viens mon petit poilu...

Je retiens mon sourire de gêne face à ce nouveau surnom sorti de nul part et le suis jusqu'à la sortie de l'appartement.

- Ok mais direct après on rentre hein ? J'ai repris les cours moi...
- Ouiii, on rentrera après... Mais on dormira pas tout de suite, moi je viens de commencer ma journée..

Remarquant que notre nouveau rythme de vie ne sera pas toujours reposant, je pince mes lèvres et le regarde me guider à travers les rues plongées dans l'obscurité.

Une créature diurne qui dort paisiblement la nuit, fréquentant une autre créature que le soleil brûle.
Cela ne sera sûrement pas simple..

Mais cette sensation au fond de mon coeur me laisse penser que ça en vaut largement la peine.
Cette sensation d'être complet, d'être en symbiose avec quelqu'un qui comprend ce que je ressens.

Être un monstre, il connaît.
Être arraché à la vie normale par quelque chose d'incontrôlable, il connaît aussi.

Il me comprend, me pardonne et m'aime.

Alors au Diable le soleil et le sang.
Au Diable ce crinos en moi qui me rend dangereux.
Au Diable son aspect vampirique qui diffère tant du mien.
Au Diable son monde nocturne qui nous sépare plus que tout.

Car son âme maudite et mon âme de monstre dansent ensemble ce soir et danseront encore chaque soir de notre vie.

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