Chapitre 3

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Après ces longues heures de vols, nous atterrissons à Jakarta, mais le périple n'est pas fini pour autant. Nous attendons notre correspondance pour nous rendre à Medan. L'un des aéroports de l'ile de Sumatra. Les souvenirs remontent très rapidement. Je suis au bord du craquage. J'ai l'impression que j'étais ici hier. Main dans la main avec Louis. Notre voyage de noce... Je sers mon alliance qui se trouve au bout d'une chaînette en or autour de mon cou instinctivement. Un geste réconfortant. Auparavant il y avait un pendentif en or qui y pendait. Un pendentif que mon amant m'avait offert. Lorsque l'on ouvrait le bijou en deux, il y avait une photo de mes parents dont je n'avais aucun souvenir et sur l'autre moitié, une photo de mon mari. Le pendentif était beau, avec une clé de sol gravée sur le dessus et à l'arrière un petit mot doux : Never Alone. Louis et moi nous nous sommes mariés en secret. Seuls nos témoins étaient au courant. Louis était le fils unique d'une grande dynastie, ils n'auraient pas apprécié ce mariage peu conforme à leur tradition. Pas d'église, pas de contrat, pas de médias, pas de banquet... Rien si ce n'est que nous. Ses parents n'ont pas apprécié quand ils ont appris ce petit secret, savoir que leur fils les avait privés de cette tradition, c'était difficile à accepter. Et puis pour eux, je n'étais pas assez bien pour ce grand homme, je n'étais pas issue d'une famille respectable et de la haute société. En fait je n'étais personne pour eux puisque je n'avais aucune famille. Louis et moi nous nous sommes rencontrés trois mois après la pire séparation de ma vie, enfin c'est ce que je pensais à ce moment-là. Tout a été très vite. Louis était fou amoureux de moi. Je l'ai beaucoup aimé. Sincèrement. Mais insuffisamment au vu de tout l'amour qu'il me portait. Encore trop blessée par la rupture délicate que j'ai eu avec Alexandre. J'avais peur de faire confiance, de me retrouvais seule à nouveau. Ça n'a pas loupé. Je ne lui en veux pas. Il n'est pas responsable. C'est à moi que j'en veux. C'est moi qui porte autant de malchance. Toutes les personnes qui m'entoure décèdent tragiquement. C'est ainsi, je suis le chat noir. Et je ne veux plus jamais avoir une seule responsabilité d'être la moitié d'une personne. Je ne veux pas qu'on dépende de moi, de mon amour et de mon attention. C'est assez horrible de penser ça, je m'en rends compte en l'écrivant, mais la culpabilité est trop forte. Je ne veux plus souffrir et l'amour ça fait mal que ça soit en bien ou mauvais. Je vois une image subjective flottée dans mon esprit ravagé, un bon gros "NO WAY" clignotant et rouge vif. En effet, plus question de tomber amoureuse. Désormais ça sera Monsieur Kitty et moi pour la vie avec quelques sorties autorisées auprès de mes amies proches. Mais rien de plus. Louis... Ce doux prénom qui flotte encore sur mes lèvres et qui pèsent sur mon cœur. C'est ici que je t'ai abandonné, dans une marée d'eau humaine. Louis n'était certainement pas l'homme de mes rêves, mon homme idéal, mais il était parfait et suffisant à me rendre libre. Je ne voulais pas me marier. N'étant pas croyante, je trouve que ça n'est pas très fantastique, c'est un simple papier finalement. Louis y croyait tellement, il vivait pour ça. Alors j'ai accepté et ça a été l'erreur la plus grosse de ma misérable vie.

Nous sommes arrivées très tardivement dans l'orphelinat qui nous attendait avec impatience. Chargées de caisses de ravitaillement, jeux, vêtements, nécessaires scolaire, ... De quoi apporter un peu de chaleur dans les cœurs détruits de ces enfants ayant tout perdu. Je me sentais terriblement proche d'eux. Nous avions survécu. Ce sont des petits héros et héroïnes. A force de penser, de me souvenir, je me suis aperçue que je n'avais même pas prêter attention à l'environnement, au paysage entre l'aéroport et l'établissement des enfants perdus. C'est comme si j'étais imperméable à toute autre émotion que la peine.

"Bienvenues mesdemoiselles. Nous sommes si heureuses de vous accueillir. Au nom de l'orphelinat, nous vous remercions. Que dieu vous protège." Dit notre interlocutrice depuis plusieurs mois, Lestari, dans un anglais approximatif mais qui se voulait accueillant.

The tree of our live - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant