Commémoration du 11 novembre

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Quoique les mots sont peu nombreux, l'émotion reste toujours aussi forte. Là où les paroles s'envolent, ne laissant derrière elles qu'un lointain souvenir, les écrits s'ancrent dans un lointain avenir.

L'armistice avait sonné. Jean tenait son ami, Luc, dans ses bras. Il était le plus petit en taille, il pouvait juste poser sa tête sur l'épaule de son camarade.

L'armistice avait sonné, et il avait été salué par les cloches du village près du front.
L'armistice avait sonné, et, serré dans les bras de Jean, Luc en pleurait de joie.

Ses larmes tombèrent, et abreuvèrent ce sol qui n'avait connu, depuis si longtemps, rien d'autre que le sang des soldats tombés au combat.

Luc serra Jean encore un peu plus fort. Il avait du mal à croire que c'était déjà la fin de tout cet enfer...
Et pourtant... 

Et pourtant la guerre était finie. Et pourtant ils pourraient rentrer chez eux, revoir leurs familles, leurs amis restés au pays.
Et pourtant, ils pourraient enfin vivre.

Et pourtant, ils pourraient enfin vivre

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Apolline se rappelait cette nuit d'été, cette maudite nuit d'été. Les larmes avaient coulé, beaucoup, longtemps. Puis, ils s'étaient aimés. Un court instant. Et les larmes étaient revenues, à peine couvertes par les baisers brûlants. C'était une nuit de regrets, d'amour, de peur. Dans toute la France, les femmes pleuraient, les enfants pleuraient, et les hommes aussi. Jamais ils n'avaient été aussi effrayés. Comment l'auraient-ils pu ? Comment savoir que l'on sera fauchés dans la jeunesse, qu'à peine nés, déjà, vous serez vieux, que plus jamais vous ne pourrez contempler la vie en souriant ? Non, il était impossible d'y être prêt. C'était un coup de tonnerre, brusque, imprévisible, soudain. Mortel.

Rapidement, à l'aube de l'automne, Auguste était parti. Dans les larmes, encore. Et même, même si c'était prévu, qu'il savait qu'il allait partir, il n'était pas prêt. La peur avait enveloppé le monde de son glaçant manteau, ne laissant plus de place à la moindre étincelle de vie. Il aurait voulu rester, la prendre dans ses bras, lui dire que tout irait bien, et qu'il reviendrait bientôt. Mais comment savoir s'il reviendrait ? S'il ne valait pas mieux qu'elle l'oublie ? Il n'était pas prêt, aucun d'entre eux ne l'était. Sans même savoir ce qui les attendait, la panique nouait leurs entrailles. Non, personne n'était prêt.

Mortel, le soleil se leva sur l'hiver désolé, et tous souffrirent. Auguste contempla l'horreur de ses yeux naïfs. Jamais il n'avait été prêt. Autour de lui, les corps de ses compagnons tombaient comme des mouches, disloqués, séparés, massacrés. Leurs yeux vides, culpabilisateurs, le fixaient sans cesse, même dans les quelques heures de repos. Pourquoi avait-il le droit de vivre ? Au début, ils ne pensaient être que des gamins se battant avec des épées de bois, mais Verdun n'était pas un lieu pour l'innocence. Ce n'étaient pas des rires enfantins qui enveloppaient son cœur, mais les détonations sauvages des obus. Jamais plus il ne vivrait.

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