Une autre journée se déroula encore sans que Pierre n'osa parler plus que nécessaire à Ben. Il tentait de faire bonne figure dans les vlogs, dans les vidéos de Lucas, de Camille, même dans les siennes et celles de son acolyte et encore plus dans les lives et les story mais la vérité était qu'il ne pouvait plus se retrouver seul avec Benjamin.
Celui-ci s'était d'ailleurs rendu-compte du changement de comportement du blond. Il essayait plusieurs fois par jour quelques approches, de par le tennis ou d'une banale conversation autour d'un café le matin, mais Pierre ne répondait que par des monosyllabes et parfois ne répondait pas du tout. Mais bientôt il n'aurait plus vraiment le choix parce que tout le monde, dont lui, qui s'était montré faussement enjoué, souhaitait à tout prix fêter les un an de mariage du couple phare de la maison.
Les occasions étaient donc multiples de se rappeler à cette journée. Fred, plus emballé que jamais, voyait les choses en grande pompe, il voulait des feux d'artifices et des costumes, ils n'étaient pas trop de deux pour tarir son engouement. Benjamin rejetait toute idée de nouveau baiser avec Pierre et chaque fois qu'il en était question, il reproduisait la moue dégoutée dont il avait le secret. Ce running gag n'avait plus le même effet chez Pierre, si avant, cela ne lui posait pas de problème parce qu'il connaissait parfaitement l'affection que le brun lui vouait, après sa lecture nocturne, c'était une douleur pure qui s'était introduit en lui. Il ne la comprenait pas tout à fait mais il savait qu'elle existait et il ne voyait pas pourquoi il serait le seul à en pâtir, il n'adressait donc plus la parole que sèchement ou avec une ironie blessante au brun. Il avait ainsi l'impression de se venger sur lui de tout ce qu'il lui faisait, inconsciemment, souffrir.
Il voulait rentrer chez lui, vivre tous ensemble était agréable mais il avait besoin d'air, il ne pouvait plus éviter Benjamin plus longtemps sans que cela devienne un sujet de conversation au sein de la villa.
Pierre était dehors, comment faire autrement quand, au plein mois de novembre, on avait un ressenti mi-juin. Il était plongé dans une fiction. Il lisait ces histoires parce qu'il n'avait rien d'autre à faire...du moins, il essayait de s'en convaincre.
-Pierre est-ce que tu m'évites ?
-Merde.
La voix du brun l'avait fait sursauter et son téléphone était tombé dans l'herbe, quelque part entre les deux chaises longues.
Il se pencha et tâtonna pour tenter de remettre la main dessus. Il ne répondait pas au brun qui se tenait devant lui. Le blond apercevait clairement son ombre. Un silence pesant s'installait alors que ses doigts ne cherchaient même plus son téléphone, ses yeux ayant rencontré la forme caractéristique de son iphone dans la pelouse. Il espérait que Benjamin parte avant qu'il se redresse.
-Pierre...
Il entendit la chaise en tissus grincer doucement et sentit une main se poser sur son bras.
Il se redressa vivement, un frisson l'avait traversé au contact de Ben et son regard océan s'était de lui-même planté dans celui noisette de son ami.
-Qu'est-ce qui se passe ?
Il voyait une profonde douleur dans les yeux du plus vieux, il n'avait pas réfléchit, il ne s'était pas dit que son comportement pouvait le rendre malheureux ou lui faire du mal, alors il raconta tout. Il expliqua dans les moindres détails ce qu'il ressentait depuis qu'il avait passé sa nuit sur cette application. Son collègue écoutait religieusement, il n'avait porté aucun jugement et ça mettait Pierre plus en confiance.
Quand il eut finit, Ben s'enfonça dans la chaise en tissus, il se gratta la barbe qu'il laissait pousser plus que d'habitude. Le blond attendait. Il attendait un ou deux mots, un rire, une vanne, peut-être même qu'il prenne la fuite. A la place, il soupira et jeta un regard compréhensif sur le plus jeune. L'homme aux yeux bleutés eut le souffle coupé par cet élan de ce qui semblait être de la compassion.
-Moi aussi j'en ai lu, tu sais. C'est normal.
Pierre resta sans voix. Il n'en espérait pas tant. Il lui demanda si c'était vrai et son mari forcé lui expliqua qu'une journée d'ennuie pendant le premier confinement avait eu raison des barrières qu'il mettait parfois à sa curiosité. Il en avait lu une puis deux. Et ça l'avait troublé aussi.
-Pourquoi ?
-Parce qu'on est ami, Pierre. Et que c'est bizarre de s'imaginer autrement.
Et après cette discussion, qu'ils décidèrent tout deux de bâcler par quelques vannes sur le couple qu'il pourrait former, ils restèrent au soleil, simplement. Benjamin finit par s'endormir et l'autre homme suivait le fil de ses pensées. Il n'avait pas la sensation de ressentir les choses de la même façon. Ces fictions ne le rendaient pas mal à l'aise, il dirait plutôt l'inverse, il enviait ce Pierre. Il s'imaginait dans de telles situations avec Ben et il n'était pas gêné par les émotions qui le prenaient alors.
Il osa tourner le regard vers la forme endormie si près de lui. L'autre homme aurait certainement été énervé s'il avait entendu ce qui se jouait dans son esprit. Ses abonnés auraient déjà mille idées de fictions avec cette scène...Il ricana et se replongea dans la lecture qu'il avait été obligé d'interrompre, ce n'était plus si important, son ami dormait et il n'avait pas le sommeil léger, il pouvait lire sans aucune crainte.
Il en lisait une nouvelle aujourd'hui, qui retranscrivait la vidéo "une journée comme un couple" avec quelques scène coupées visiblement. A la fin de celle-ci, l'auteur n'avait pas fait changer de lit les deux collègues, ce qui aurait été bien plus proche de la réalité et ce qui était en train d'arriver dans cette histoire dépassait de bien loin, l'imagination de Pierre. Il mit son téléphone en veille en rougissant un peu. Est-ce que Ben en avait lu des fictions comme ça ?
Il se permit de lui lancer un nouveau regard, il s'imaginait l'embrasser et ce qu'il ressentait dans son bas-ventre n'était décidément pas un sentiment de mal aise. Il savait ce que c'était. Il comprenait parfaitement ce qui lui arrivait, ce qui était vexant c'est qu'il n'était pas parvenu à le deviner seul. Maintenant, plus rien ne serait comme avant. Comment allait-il expliquer à son ami qu'il ressentait quelque chose pour lui ? Comment ne pas paraître absurde en disant qu'il s'en est rendu compte grâce à ses fans ? Qu'est-ce qui se passerait après que le plus vieux l'aura rejeté ? Devaient-ils même en arriver là ? Pierre se demandait s'il devait lui avouer ?
Peut-être que ce n'était qu'une passe. Il ferma les yeux et se laissa retomber doucement tout au fond de la chaise. Demain, on était le 25. Il s'endormit en laissant le feu d'artifice intérieur que provoquait cette pensée le submerger. Il verrait demain.
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Inception
FanfictionPierre s'était laissé aller à lire des fanfictions mais jamais il n'aurait pu penser que cela changerait tout.