Chapitre 4

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En prévision du lendemain de soirée, aucun tournage particulièrement significatif n'avait été prévu aujourd'hui. En conséquence, lorsque Pierre se réveilla, tout était très calme dans la maison. Il se rappelait parfaitement de la veille...il avait dormi avec Benjamin et celui-ci avait serré sa main comme si sa vie en dépendait. Il ne savait plus où ils en étaient. Il se demanda quelle serait la réaction du brun et en vint à la conclusion que de toute évidence, il ne voulait pas assister à un éventuel rejet. Il choisi donc de détacher sa main, à contrecœur, de celle du parisien, de le détailler une dernière fois avant de se lever et de partir. Il était à la seconde étape de son plan quand Ben, qui semblait avoir compris ce qui se jouait, grogna dans une forme de demi-sommeil et se retourna, il était dangereusement près, il était même difficile de faire plus près après ce dernier mouvement. Pierre n'eu le temps d'esquisser aucun geste que son ami papillonnait des yeux, sa vision s'adaptant à la lumière que le matin projetait maintenant dans la pièce. Son regard virevolta du tee-shirt qu'il rencontra jusqu'au visage de son propriétaire, il dévisageait littéralement le lorrain. Il s'arrêta plus longtemps que nécessaire sur ses lèvres et il planta ses yeux noisettes dans les siens. La respiration de Pierre s'était accélérait à cause de la proximité de leurs corps. Leurs souffles se mélangeaient et il sentait bien qu'il n'était pas le seul dont le cœur avait décidé d'aller plus vite.

Mais tout à coup, ce fut comme-ci, tout ses détails qui auraient pu faire de cette matinée un moment unique, avaient brûlés Benjamin. Il se redressa brusquement, faisant sursauter le blond, prit une profonde respiration et dit sèchement qu'il voulait être seul.

Pierre ne se fit pas prier deux fois, après avoir discrètement jeter un œil dans le couloir, il retrouva sa chambre sans rencontrer une âme qui vive. Il avait été surpris par la réaction de Ben, il se doutait qu'ils allaient devoir affronter ça ce matin, seulement il s'était dit qu'ils le feraient ensembles puisque vraisemblablement, il n'avait été le seul à entreprendre un rapprochement hier soir. Lui, avait même l'excuse d'avoir bu, en bon membre de la team foi sale. Non seulement son ami n'avait rien dit lorsqu'il l'avait rejoint dans son lit et qu'il s'était collé à son dos mais il avait aussi pris la main du blond, sans aucunement être forcé ou encouragé à le faire. Le plus jeune était encore plus perdu dorénavant, hier, il était assez fou pour penser qu'il y avait définitivement quelque chose entre eux, que ses abonnés avaient tous raison et ce matin, il avait l'impression qu'il dégoutait au plus au point le parisien, qu'ils n'étaient même plus ami.

Que devait-il faire ? S'excuser semblait hors de propos puisqu'ils étaient tout deux responsables de la situation de base et, étant têtu, il n'était pas question qu'il le fasse en premier. S'expliquer paraissait plus logique mais alors, Benjamin devrait le faire aussi et Pierre n'était pas tout à fait sûr qu'il voulait entendre son explication. Faire comme si rien ne s'était passé était la solution la plus viable, avec un peu de chance, Ben en serait venu à une réflexion similaire.

Alors après s'être habillé, il descendit en bas dans l'espoir de ne croiser personne, il ne souhaitait qu'une chose : prendre son petit déjeuner dans un silence monacale. Il avait mal, il avait l'impression qu'on l'avait poignardé à la poitrine et que la plaie le brûlait. Il cacherait son mal-être derrière des vannes et des sourires, il savait que ça marcherait. Il atteignait toujours la cuisine plus rapidement que n'importe quel autre membre de l'équipe, Pierre connaissait cette maison par cœur. Et quand il entra dans cette pièce généralement en désordre, celle de l'autre aile, celle de Guillaume, P-A et Lucas, il n'avait encore rencontré personne.

Il préparait son café latté quand Guillaume, qui avait l'air beaucoup trop en forme pour un lendemain de soirée, lui souffla un bonjour clair et presque chantonnant. Mais la réponse de Pierre ne parvint pas à le convaincre de sa véracité. Il connaissait très bien son ancien colocataire et là, il pourrait parier que quelque chose n'allait pas.

Il entraîna le lorrain faire le tour de la maison. S'ils n'étaient que tous les deux, il y avait des chances que Pierre en vienne à se confier. Cela n'arriva pas, le blond n'était pas prêt à faire un coming out, même s'il savait que Guillaume n'avait aucun problème avec ça. Son colocataire lui changea les idées, ils parlèrent et rigolèrent, celui dont le métier au sein de la maison était méconnu, voulu aborder la soirée d'hier, qu'il avait considérer comme un excellent moment, mais le blond s'était de suite fermé à la conversation. D'un accord tacite, ils changèrent de sujet.

Bientôt, ils firent demi-tour pour revenir à la maison et cette promenade avait fait du bien à Pierre, il se sentait mieux. Il était de meilleure humeur.

C'est ensemble qu'ils traversèrent le jardin afin de rentrer par la terrasse. Pierre se figea à la vue de Benjamin qui réalisait son dernier tournage dehors. Ils étaient hors cadre et Ben ne regardait que l'objectif ainsi, il pouvait laisser ses yeux dériver vers le brun sans qu'il s'en aperçoive. Guillaume remarqua que son ancien colocataire avait changé de visage mais il ne fit aucun commentaire, sachant pertinemment qu'il ne voulait pas en parler.

Aujourd'hui, ils devaient organiser les derniers vlogs et le départ de la villa, sachant qu'ils avaient un vlog en stock, tourné plus tôt dans la semaine, ils pourraient consacrer toute une journée à ranger et nettoyer. Il fut décider qu'ils rangeraient la villa samedi et qu'ils partiraient le lendemain. Ils leur restaient un vlog à tourner, celui pour le 28. Ils le tourneraient le jour même. Il ne restait qu'une chose à planifier: qui ramènerait Benjamin sur Paris, lui qui n'avait pas le permis.

P-A et Agathe ramèneraient les camionnettes qu'ils avaient loué et iraient déposer le matériel aux locaux. Lucas et Camille rentreraient ensembles parce qu'ils devaient trouver un concept de vidéo et envoyer un mail à Valérie Damidot, en conséquence, ils avaient décidé de travailler ce futur tournage dès qu'ils seraient de retour sur la capitale. Guillaume et Fred auraient des réunions avec le reste de l'équipe qui n'étaient pas venus à la villa et ils devraient organiser l'emploi du temps de chaque personnel de l'administration et de la logistique pour la semaine suivante. Pierre, lui devrait aussi venir superviser tout ça, en bon patron de l'entreprise qu'il était, cependant, Fred, nommé directeur général, serait déjà sur place, sa présence n'était donc pas vraiment nécessaire. C'est donc tout naturellement que la décision fut prise, ce serait le lorrain qui ferait la route avec Ben.

Après la réunion, chacun retourna à ses occupations. Le blond ne se voyait pas faire huit longues heures de route avec le malaise qui s'était installé entre lui et le parisien, il chercha son ami partout dans la villa afin de crever l'abcès entre eux. Il le trouva dehors, encore, il était sur son téléphone, assis à la table en bois, installée plus loin pour le repas qui avait eu lieu quelques jours avant. Il mangeait et répondait visiblement à des messages. Pierre resta dans l'embrassure de la porte quelques instants, il l'observait pendant qu'il n'avait pas encore déclenchait de guerre. Benjamin n'était pas seulement beau ou drôle, il avait du charisme et de la tchatche, finalement le plus jeune pouvait aisément trouver des fondations aux émotions qu'il ressentait. Ben avait dû sentir le regard brûlant du plus jeune, il releva les yeux de ses notifications et envoya un sourire sincère et éclatant à Pierre. Celui ci ne comprenait plus rien à son comportement mais il prit ce sourire comme un signe, une invitation à venir le retrouver.

Il eut l'impression d'avoir des jambes de plombs mais il parvint à traverser le jardin et il se laissa tomber sur la chaise aux côtés du plus vieux. Il y eut un moment de silence confortable et Benjamin posa sa main sur la cuisse du plus jeune pour capter son attention:

-Je suis désolé pour ce qui s'est passé.

Le blond ne voulait pas qu'il s'excuse, il ne voulait surtout pas qu'il s'excuse de la nuit qu'ils avaient passé ensemble, enlacés. En voyant que son ami écoutait, sans rien ajouter, Ben continua :

-C'était une erreur. J'avais bu et je n'avais pas conscience de ce qui se passait.

C'était faux, le lorrain l'avait regardé toute la soirée et il n'avait pas bu une goutte, il n'en dit rien, il était muet de douleur. Sa plaie brûlante s'élargissait aux nombres de mots qu'il prononçait. Il retira d'ailleurs la main qu'il avait posé sur sa jambe et lui demanda s'il voulait bien oublier ce qui s'était passé. Pierre pensa "non", mais il avait bien trop peur de le perdre si c'était la réponse que son corps exprimait, il se força à étirer ses lèvres en une drôle de grimace et opina de la tête.

Le reste de la journée se déroula dans une ambiance cordiale. Le soir, tous deux allèrent se coucher dans leur chambres respectives et le blond n'avait jamais passé une nuit aussi froide au sein de la villa.

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