3 décembre

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— Comment va Menra ?

Je me maudis intérieurement lorsque je me rends compte de la question que j'ai posée. Eridis lève une fois de plus les yeux vers moi.

Et, pour une fois, son regard n'est pas avenant, mais menaçant.

— Es-tu consciente que tu es la dernière personne à qui j'ai envie de parler d'elle ?

Je hoche la tête silencieusement. Menra et moi avons un passé bien trop douloureux.

Et puis, je lui ai fait tellement de mal... !

— Si ton projet est d'aller la voir, commence-t-il en se rapprochant de moi, son doigt pointé vers moi.

— Non, Eridis. Loin de moi cette idée. Je sais pertinemment que je ne serais pas la bienvenue, chez elle. Enfin, chez vous.

Son regard s'adoucit. Il esquisse un sourire, comme s'il était satisfait de ma réponse, et se baisse de nouveau pour analyser la prochaine victime.

Un pompier me traverse et se rend dans un coin reculé de la bâtisse en lambeaux. Je n'y fais pas plus attention que cela.

La vérité est que j'ai un choix à faire, et vite.

— Le temps presse, reprend Eridis sans pour autant me regarder. J'ouvrirai le portail dans quelques minutes, tout au plus. Libre à toi de t'y engouffrer en même temps que moi.

Cela fait des années que je n'ai pas emprunté ce portail. J'appréhende. Que se passera-t-il, une fois de l'autre côté ?

Serais-je dévisagée comme la paria que j'ai été ? Ou bien ont-ils tous oublié jusqu'à mon nom ?

— Sais-tu..., je commence, gênée.

—... qui t'a remplacé ?

J'acquiesce. C'est la question que je me suis promis de ne pas poser, pourtant elle me brûle la langue depuis des centaines d'années déjà.

— Une déesse splendide, si tu veux mon avis. Elle répand l'amour et la sérénité au sein du monde des mortels, mais aussi celui des dieux. Tout ce que tu n'as pas réussi à faire, en somme.

Je retiens de justesse un juron. Il est vrai que je n'ai pas été une déesse exemplaire. On peut même dire que j'ai failli à mon rôle. Mais il est inutile de me le rappeler sans cesse.

— Quel est son nom ?

Je me demande si je la connais. Est-ce une de mes amies d'enfance, ou bien une étrangère sortie de nulle part ?

— Félicie. Cela m'étonne que tu n'en aies pas entendu parler, rajoute-t-il, les sourcils froncés.

— Je ne m'intéresse plus vraiment à ce genre de choses, me justifié-je en croisant les bras sur ma poitrine.

Félicie. Ce nom ne me dit rien. D'après Eridis, elle fait un excellent travail. Me remplacer n'aura jamais été plus facile.

— Par ici !

Mon attention est détournée par une voix d'homme, qui lance un appel rempli d'espoir à ses pairs. Mon regard croise celui du disciple du dieu de la mort qui semble tout aussi perdu que moi.

— Je sens un pouls !

Je me rapproche en sautant de débris en débris, mes cœurs serrés dans ma poitrine. S'il y a bien quelque chose que j'ai appris à l'académie des dieux, c'est de n'épargner aucune victime vivante lorsque nous laissons notre haine prendre le contrôle.

— Occupez-vous d'elle, continue la voix en donnant des directives aux autres humains. L'incendie est d'ordre criminel, nous aurons peut-être une piste si elle reprend connaissance.

Mes cœurs ratent un battement en entendant cette phrase. Comment ont-ils pu déduire si vite que l'incendie avait été causé par un tiers ? J'ai pourtant fait attention à ne laisser traîner aucun indice.

Si elle s'en sort vivante et qu'elle m'identifie... les humains ne la croiront pas, certes, mais l'information remontera jusqu'à mon père, et là...

Je ne veux pas me faire enfermer de nouveau.

— Tu t'es mise dans de sales draps, cette fois, intervient Eridis en se frottant les mains.

— Je le sais, merci.

— Que comptes-tu faire ?

— Je ne sais pas, je réponds, soucieuse.

Je regarde passer le brancard où la victime est allongée, inconsciente. La moitié de son corps a été dévoré par les flammes, mais elle respire encore.

Sa vie ne sera que douleur et tristesse.

— C'est une âme en moins à prendre, se réjouit Eridis en souriant. Donc moins de boulot pour moi. Je devrais peut-être te remercier ?

Je hoche rapidement la tête, mais mon esprit est ailleurs. Tuer des humains n'a jamais été aussi facile. Mais les estropier ? Ce n'est pas plaisant, ni pour eux ni pour moi.

Toki en sait quelque chose.

— Le départ approche, continue Eridis en se dirigeant vers le dernier tas de cendres. Réfléchies bien.

Je me mords la lèvre. Devrais-je le suivre ? Ou bien rester et m'assurer que cette humaine, qui qu'elle soit, ne parle pas ? Je sais pertinemment qu'Eridis ne me trahira pas. Il est mon seul et unique contact avec l'autre côté, et jamais il ne m'a dénoncée.

Mon destin ne tient qu'à un fil. Et c'est dans les mains d'un parasite qu'il se trouve.

Mon regard croise celui de Toki avant qu'il ne s'en détourne. Je ressens de la peine dans ses pupilles alors qu'il suit des yeux le corps méconnaissable de la victime. Pense-t-il à la fois où je l'ai sauvé, alors même que j'étais celle qui l'avait condamné ?

Peut-être réalise-t-il que je suis un monstre, lui aussi ?

Il a sûrement raison, tout compte fait. Pendant toutes ces années, je n'ai fait que répandre malheur et mort sur mon passage.

Tout ça à cause de l'amour, alors même que j'étais censée être l'incarnation divine.

— Plus que quelques minutes, m'informe Eridis en se relevant.

Circée va-t-elle suivre Eridis ?

Choix vert : Circée négocie un passage sécurisé avec Eridis et demande à ce que personne ne soit au courant.

Choix blanc : Circée, prise de remords, suit la victime afin de la sauver.

Choix rouge : Circée tue l'humaine, donne plus de travail à Eridis et le suit de l'autre côté.

                                                                                      

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Alongside CircéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant