Chroniques de Fantasmagoria - Aux Origines du Monde

Altus

Altus n'était pas non plus un Dieu Créateur. Il n'était pas assez puissant pour créer un autre être directement ; cela lui prendrait autant de temps que Cirrus, sinon plus.

Altus était le Dieu des sciences. Il était né entre les dimensions, et était apparu dans celle où Cirrus avait élu domicile, avec des objets de science à la main. Il naquit après Cirrus, mais paraissait plus âgé. Il avait l'aspect d'un homme d'une quarantaine d'années, et avait de grandes lunettes rondes, qui permettaient à quiconque les portait de voir clairement jusqu'à l'horizon, et de pouvoir tout étudier à la fois.

Cirrus s'énerva contre Altus au départ, de l'avoir dérangé en pleine expérimentation. Car lorsqu'il retourna à sa masse blanche, la vie n'y avait pas été insufflée. Et Cirrus avait oublié comment procurer la vie ; cela lui aurait pris encore plusieurs millions de cycles pour s'en souvenir.

Altus se confondit en excuses, et se proposa, pour se faire pardonner, de multiplier, grâce à sa science, la masse blanche de Cirrus, et de lui donner le mouvement.

Cirrus se montra immédiatement intéressé : même si l'arrivée de l'autre Dieu réglait son problème de solitude, il ne put résister à l'idée de voir sa création atteindre un tel potentiel. Altus s'exécuta donc avec joie, lui qui s'accomplissait dans les tâches de sciences et de mathématiques. Après plusieurs milliers de cycles, où Cirrus ne fit que contempler sa masse blanche, s'imaginant ce à quoi elle et ses futurs pairs pourraient bien ressembler, une fois en mouvement autour de lui, Altus tendit à Cirrus une petite fiole. Cirrus fixa le Dieu Savant avec circonspection, et ce dernier le rassura du regard. Le Dieu Jeune versa le contenu de la fiole sur sa masse blanche. Immédiatement, celle-ci se mit à trembler.

Cirrus recula de peur. Altus ne se montrait pas très confiant non plus. Soudain, la masse se souleva, et se mit à tournoyer au-dessus de leur tête.

Tandis qu'elle tournoyait, elle se dédoublait, et envoyait des copies d'elle-même, de différentes tailles, de différentes formes, partout dans le Ciel, tout autour d'eux.

Au bout d'un moment, il y eut tellement de masses blanches dans le Ciel qu'il était devenu impossible de deviner laquelle était l'originelle. Mais Cirrus s'en fichait.

Il passa des centaines de cycles, ensuite, à simplement contempler la beauté de sa création, multipliée à l'infini. Elles finirent par arrêter de se reproduire, et se mirent à se déplacer tranquillement, un peu partout dans le Ciel, changeant parfois de hauteur, parfois de forme, devenant parfois grises lorsqu'elles se percutaient. Cirrus était totalement hypnotisé par ce spectacle. Il aimait l'aléatoire de leur mouvement, la tension de leurs confrontations. Altus vint s'asseoir à côté de lui, et lui demanda :

« Il faudrait leur donner un nom... »

Cirrus réfléchit quelques instants, puis lui répondit sans l'ombre d'une hésitation : « Nuages. »