Chapitre 1. Jack

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Une nouvelle partie commence à la casse Autohaven. Autour de moi, des carcasses de véhicules sont empilés et forment des lignes irrégulières. Je ne distingue personne. Le silence pèse sur mes épaules. Je reste un moment sans bouger, cherchant mes repères. Une légère brise vient caresser mon visage. Mes cheveux noir, ébouriffés me tombent dans les yeux. Je les remets à leur place délicatement.

Aujourd'hui, le courage me manque. Je n'est aucune envie de continuer ce jeu morbide. Mourir sans fin. À quoi bon ? "La mort n'est pas une issue", cette phrase qu'on nous répéte sans cesse.. mais que l'on gagne ou perde la partie, 1 ou 100 fois.
Ça ne fait aucune différence. Je laisse échapper un soupire, las.
Au loin des cris se font entendre. Le jugement à commencer. Qui sera assez rapide, assez discret, assez efficace pour sans sortir en vie ?

Je m'attelle à un premier générateur, les mains recouvertes d'huile, douloureuses de répéter sans cesse les mêmes mouvements. Elles bougent mécaniquement au rythme du tintement des engrenages.
Un corbeau se pose sur le dessus et me regarde de ses jolis petits yeux perçants.

Ho toi, être de malheur
Oiseau ou démon
Tu n'es que la création
De la destruction.

Au fond
Aussi noir que le charbon
Tu emmènes sur mes compagnons
Une sorte de corruption
Pire qu'une infection

Mais à l'horizon
Jamais bien loin de ta vision
Tu entends une respiration.

Faisant alors légion
Tels des voleurs
Vous recherchez la douleur
Ho, êtres de malheur.

Pour une raison que j'ignore, les corbeaux m'apprécient. Jamais ils ne s'envolent sur mon passage et même ils me tiennent compagnie. Je suis le seul que jamais ils ne dévoilent, le seul avec qui, ils passent du temps.
Peut être aiment ils le calme ? Les autres sont bruyants, assourdissants.
Moi j'ai appris à ne pas crier, ne pas gémir, taire la douleur.

Sur ma gauche survient une respiration saccadée. Cheryl se cache derrière un groupe de tonneaux, rouge et bleus. Elle avance doucement, accroupi, en se tenant le ventre. Je termine ma tâche. La lumière s'allume au dessus de moi avec un petit clic. Je m'avance tranquillement vers elle et commence à la soigner, quand nos coeurs se mettent à battre violement. Cheryl me lance un regard désespéré avant que nous ne nous séparons, elle vers la droite, moi à gauche. Mon coeur tambourine de plus en plus fort, je cherche le tueur du regard, quel idiot je ne lui ai même pas demandé qui c'est.

Soudain je le vois. C'est la légion. Dans une tenue que je ne lui avais jamais vu. Un ensemble noir avec des bandes bleus fluo. À peine éclairer par une lune jaunâtre, on ne voit pourtant que lui.

Je réalise soudain qu'il me fonce dessus, de son sourire peint en croix bleu sur son masque.
Je détale devant lui mais je n'ai aucune chance. Il me court après, le couteau levé, près à se planter dans mon dos. Sa respiration est forte et rapide. J'abaisse une palette entre nous deux mais il glisse par dessus et me donne un violent coup dans l'omoplate gauche.
Je grogne à peine ne souhaitant en aucun cas lui donner une quelconque satisfaction. Puis cours droit devant moi sans me retourner. Quand enfin je m'arrête épuisé, je constate qu'il a disparu dans la nuit.

Au loin cinq hurlements rapprochés se font entendre puis le calme revient. Légion doit avoir fini sa phase. Je trafique un totem caché entre deux arbres et m'en vais pour un nouveau générateur.

Le silence est lourd. Je n'entends rien d'autre que ma réparation. Cliqueti mécanique dans un royaume de ténèbre. Mes coéquipiers doivent être ailleurs en train de courir ou réparer également. Du moins c'est ce que je pense et espère.

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L'image provient de l'artiste lacteaWay dispo sur deviant art et tumblr.

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