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Les rayons du soleil caressaient doucement les paupières de Yasuo en chassant lentement le sommeil son corps. Ses muscles endoloris se réveillaient les uns après les autres. La petite cabine était inconfortable. Les nuits passées à bord de ce navire durcissaient ses membres et ne reposaient pas suffisamment son esprit. Mais pour une fois, la cabine était silencieuse, constata Yasuo en remarquant l'absence des bruit des pas habituel au-dessus de sa cabine. Il s'extirpa du matelas avec peine et étira ses membres avec quelques exercices basiques avant de se rééquiper de son accoutrement habituel. En sortant de sa cabine, il remarqua la porte fermée qui menait à la chambre de sa cliente. Il hésita un instant. Prenant soin de faire le moins de bruit possible, il entrouvrit légèrement la porte.

Ahri dormait encore. Son corps était noyé sous les couvertures. Seule son visage et sa queux de renard pendant au-dessus du sol, dépassaient de la couette. Les couvertures se soulevaient lentement au rythme sa respiration. Un faisceau lumineux éclairait une partie de son profil, dévoilant un air souple et apaisé. Son teint pâle lui donnait l'aspect d'une poupée de porcelaine, aussi fragile et vulnérable mais avec les détails et les finitions qui font leur beauté. Ce visage calme et son sourire apaisé tranchaient avec le caractère piquant et rusé qu'il lui connaissait. Il ne voulait pas la réveiller. La journée s'annonçait longue et au vu son état d'hier, un peu de repos supplémentaire ne lui aurait pas fait de mal. Il referma la porte en faisant le minimum de bruit possible.

Il emplit ses poumons d'air et parti à la recherche du capitaine. Selon le plan, sa tâche était de l'occuper pour laisser le temps à Ahri de préparer leur évasion. Cette mission ne lui plaisait pas, mais il n'avait pas vraiment le choix.

En arrivant sur le pont, une étrange sensation vint tendre ses nerfs et énerver ses muscles. Il n'y avait pas le moindre bruit. Il était surveillé. Pas seulement lui, l'air était chargé d'une aura malveillante qui semblait observer le navire tout entier. Ils étaient totalement à l'arrêt. Une inquiétude silencieuse emplissait l'air, chaque instant s'étirant dans une attente intenable, comme si le temps lui-même avait suspendu son cours. A bord une tension oppressante s'était installée. L'équipage fixaient l'horizon avec un air sombre et apeuré. Même le capitaine semblait inquiet en haut de la vigie.

En voyant l'épéiste sortir de la cale, il descendit du mat avec une agilité surprenante et le rejoignit d'un pas assuré. "Regarde-moi ça petit" grogna-t-il d'un air grave "pas un souffle de vent ! Nous dérivons selon les courants..."

"Il n'y a pas de rames pour avancer ?"

Le loup de mer le regarda un instant, l'air surpris, avant de rire nerveusement.

"Il n'y a plus de rame sur les bateaux depuis des décennies, le vent suffit à nous guider !"

"Pas toujours on dirait..." ironisa l'épéiste.

"Justement gamin... c'est bien ça le problème... il y a toujours du vent en mer, cette situation n'est pas naturelle."

Le corsaire avait changé de ton. Il n'y avait pas le moindre soupçon d'humour dans sa voie. Il se rapprocha du rebord du navire et s'appuya lourdement sur le garde-corps. Ses yeux vert perçant fixèrent longuement l'horizon à la recherche de n'importes quels signes qu'un marin saurait interpréter. Yasuo se rapprocha sans prêter plus attention aux paroles angoissées du capitaine.

"Vous n'avez aucune idée de ce qui peut provoquer ce genre de chose ?" Demanda-t-il innocemment en se rapprochant du pirate.

Le corsaire se retourna, un regard dur marqué sur le visage. Il regarda autour de lui comme pour vérifier qu'aucun de ses hommes ne l'écoutaient.

"Nagakabouros" murmura-t-il, la peur et l'excitation au fond du regard.

Un air circonspect s'afficha sur le visage amusé de Yasuo. Il avait déjà entendu parler de nombreuses légendes marine et Nagakabouros en faisait partie : la fameuse déesse des mers, à la forme de serpent géant ou de calamar monstrueux selon les versions. Mais il ne s'agissait selon lui que de mythe pour effrayer les enfants. Il ne put s'empêcher de rire face à la superstition dont faisaient preuve le capitaine.

La traverséeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant