VI - L'auberge

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   Une fois habillées, Naïmsa nous dirige vers la porte d'entrée. 

- Le voyage risque d'être long à pieds. Mère a pris les Courants, mais je ne suis pas en mesure de les utiliser. Je vais donc laisser un mot au gardes au cas où. Attendez-moi là.

   On patiente 3 minutes, et Naïmsa reviens vers nous.

- C'est à combien de temps d'ici ? questionne Océane.

- Offfff, 5 heures peut-être ?

- 5 heures ?! je m'exclame. Mais le soleil va se coucher d'ici là 1 heure à peine !

- On dormira dans une auberge Crépuscule.

- ...... ?

- Les Crépuscules sont un clan qui se situe à l'orée de la forée des Enchantements, qu'il faut traverser pour atteindre le logis de Morgane, notre Mage.

- Oui, mais on a pas d'argent, je proteste.

- De l'argent ? Est-ce une invention humaine ? Ici, en échange d'un service, on offre un service. On se proposera pour nettoyer ou aller faire une course, ça devrais être suffisant pour une nuit.

- Mais on est 5.

- Ça ira, ne vous inquiétez pas. Maintenant, suivez-moi.

   Lorsqu'on s'habillaient, les filles et moi, Naïmsa s'était emparée d'une sacoche, qu'elle avait fourré de bulles d'eau, suspendues à des crochets, des couvertures, et ce qui semblait être des galettes sèches. Je comprend maintenant ces précautions. Je m'inquiète néanmoins. Avons-nous le droit de se balader comme ça, à la tombée de la nuit ? Et puis on dois se dépêcher de rentrer.

   On marche, je dirais 40 minutes, avant d'arriver à un village. Les maisons de briques blanches sont éclairées par des bougies sous cloches. Comment-cela peut-il bruler ? Les toits de paille sont noirs dans la nuit, et celui où se dirige Naïmsa laisse pendre une pancarte de fer. "L'Auberge des six Soleils". Charmant, comme nom. Mais complètement illogique. Cet endroit est décidément dépourvu de science.

   La princesse en jupe dorée toque à la porte de bois sombre. Une jolie jeune femme nous ouvre, un sourire chaleureux sur le visage. Sa robe ample rouge pourvue d'un petit tablier blanc ondule à chacun de ses mouvements. Elle nous invite à entrer à l'intérieur, d'où se dégage une odeur de soupe au poireau. Elle a un étrange tatouage sur le front. Un Soleil qui se couche, mais son reflet n'est autre qu'une moitié de Lune. Ses bottes à lacets martèlent le sol. Elle disparait derrière un rideau, quand ce qui semble être la réceptionniste nous interpèlent. C'est un petite femme ronde à la peau rougeoyante et aux joues rebondies, et au même tatouage au front. Elle est assise derrière un comptoir de bois. Un manuscrit devant elle, elle nous demande nos noms et notre ville de provenance.

- Océane Oulanos, Lierre Laen, Sunny Vulyte, Flamme Fynelle, et Naïmsa Dryare. Le Château des Étoiles. Une nuit, s'il-vous plait.

- Très bien, mesdames. Tenez, votre clef. Ne la perdez surtout pas.

- Bien-sur, madame.

- Le dîner sera servit dans 20 minutes. Les bains sont de l'autre côté, vous devez traverser la cour. C'est la porte décorée de fleures jaunes, pour les femmes.

- Merci.

   Elle nous indique un escalier, et nous commençons à monter les marches. Une fois dans notre chambre, Naïmsa referme la porte d'un tour de clef. Sur une chaise, des draps et des robes de dentelle ont été posées. Il y a trois lits simples, et un espèce d'étage auquel on peut accéder par une échelle. Trois autres lits s'y trouvent.

- Qui dort où ? demande Flamme. Perso, je préfère être en haut.

- Je veux être en bas, annonce Océane. Lierre, tu peux venir ?

- Si tu veux.

- Je reste aussi là, si tu n'y vois pas d'inconvénient Sunny.

- Non, non, ça me va.

- Bien ! Maintenant, aux bains !

   On redescend, et Naïmsa demande à la réceptionniste des serviettes. On traverse la cour, pour entrer dans un bâtiment. Il y a un couloir, et de part et d'autre, des portes. Une petite fleur sur chacune annonce, en se refermant, que la pièce est occupée. On en déniche un libre, et une douce chaleur nous parcours de frissons. On se déshabille chacun dans son coin, et nous plongeons dans l'eau brulante. Que ça fait du bien ! De petits bols disposés autour du bassins comportent des pierres lissent et plates. Il y en a une bleu, une grise, et une vieux rose. Naïmsa se saisit de la grise et frotte ses cheveux avec.

- Ça nettoie, explique-t-elle devant nos têtes incrédules. La bleu pour le corps, la rose pour le visage.

- J'ai une question, Naïmsa, je dis. Euh, comment on rentre chez nous ?

- Rentrer ? Mais enfin, vous devez rester ! On a besoin de vous ici.

- Euh, c'est queuh...

- Vous verrez avec Morgane.

  Quand on ressort de l'eau, je suis un peu contrariée. On ne va quand même pas rester ici ? Flamme et Sunny attache leurs longs cheveux en un chignon, et Naïmsa, Océane et moi, retenons notre carré de petites barrettes de perles. On se rhabille, et on retourne dans l'auberge. Le dîner est servi : soupe de poireau orange.

- Mais qu'est-ce que c'est ?

- De l'afinot. Ça a gout d'itolre, rajoute-t-elle.

   Ce qui ne nous aide pas. Mais ça ne m'empêche pas de tout gober ! Je meurs de faim. Océane, elle, n'a pas l'air d'apprécier et mâche lentement les galettes de Naïmsa. La femme qui nous a ouvert la porte dépose un pichet d'eau sur notre table. En voulant se servir, Océane le renverse et l'eau se déverse sur le sol. Elle se précipite pour éponger avec une serviette, et, au contact de sa main, l'eau s'évapore.

- Wah ! T'apprends vite ! s'émerveille Naïmsa.

   Océane la regarde, ahurie. Puis elle louche sur ses mains, et sur l'eau disparue.

- J'ai... quoi ?!  chuchote-t-elle. 

   Je redresse le pichet de bronze, abasourdie. Comment ça, on apprend ? Océane se rassoie sur sa chaise, interdite. Naïmsa, que ça ne choque pas le moins du monde, parle de notre traversée de demain. Il faudra bien se couvrir, même si on est en période de temps chaud. On remonte dans notre chambre pour nous changer. On enfile nos robes blanches pour dormir, et je rabat ma couette sur mes épaules. Que s'est-il passé tout à l'heure avec l'eau ? Mais draps sont tièdes et je suis fatiguée de cette journée tourmentée. 

   J'arpente mon collège, il fait nuit. La lune se reflète sur le carrelage qui recouvre le sol. Un bruit attire mon attention, il vient de ma salle de maths. La porte est entrebâillée et une flaque de lumière verte s'étend au sol. Je m'approche, confiante : je suis habituée aux portails. J'ouvre mon sac et me saisie de mon fixeur. Je l'attache à mon poignet et me laisse engloutir dans la flaque brillante.

   Je suis dans ma chambre. J'attrape une photo encadrée sur mon bureau. Sala, Armi et moi posons devant l'objectif. On a 6 ans. Ce sont mes cousines de cœur, elles me manqueront. Je prends aussi la peluche que Papa m'a offerte. Mon mp3 et mes écouteurs son déjà dans ma sacoche. Je regarde ma chambre. Mon bureau, mon armoire, mon lit. Je ne les reverrai plus...

Les Quatre Gardiennes ~ Les ClefsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant