Homo Sum 2 : l'éveil de l'humanité (Episode 2 : Révélation)

33. Téléportation

— Ne nous affolons pas, interrompit l'Amiral en tentant de calmer l'assemblée. Nous avons encore quelques jours devant nous... Dès qu'elles seront à notre portée, nous allons lancer nos sondes vers ces deux planètes afin de rassembler de plus amples informations sur leurs petits satellites respectifs. Ce sujet pourra faire l'objet d'une réunion future. Nous vous avons principalement invités ici pour étudier notre plan d'interception des Indésirables... Comme nous ne savons pas encore sur quel astre, lune ou planète, ils se sont installés ; autant élaborer un plan générique applicable à n'importe quel endroit. Nous avons la conviction qu'ils sont restés aux environs de leur vaisseau et qu'ils n'occupent pas encore un trop grand périmètre autour de ce dernier... Nos ordres étant d'intercepter un maximum d'entre eux en vie, à des fins d'interrogatoires ; nous aurons à encercler ce périmètre pour que personne ne passe à travers les mailles de notre filet... Inutile de vous dire qu'il nous faudra agir vite et bien. Je n'ai pas l'intention de passer des semaines, sinon des mois, à les poursuivre au sein de je ne sais quelle jungle impénétrable !

— Nous ne possédons à bord que dix petites navettes, ainsi qu'une plus grosse qui sera nécessaire à leur évacuation Amiral, répondit le Chef technicien ravi que la conversation se soit dirigée vers son champ d'expertise. Comme vous le savez, notre frégate est bien trop lourde pour se poser autre part que dans un astroport...

— Cela veut donc dire que nous ne pourrons pas déployer plus d'une centaine d'hommes au sol. C'est peu pour un bon millier d'évadés, répondit l'Amiral...

— Moins que cela, reprit le médecin en chef. N'oubliez pas que ces Indésirables étaient, pour la plupart, d'un âge très avancé. Je doute qu'ils aient tous survécu à ce voyage de plus de trente années dans le vide ! J'estime que leur nombre actuel ne doit pas dépasser les cinq cents.

— Cela nous donne un rapport d'un à cinq, remarqua l'Amiral le sourire aux lèvres. Vu notre entraînement et les armes dont nous disposons, cela ne devrait donc pas poser trop de problèmes...

— N'oublions tout de même pas qu'ils disposent de l'armement de bord du vaisseau cargo : une dizaine de petites armes à feu sans recul, ajouta le Second... Mon expérience m'a appris qu'il était dangereux de se lancer dans quelque opération que ce soit avec trop d'optimisme. Ils ont certainement eu le temps de se confectionner des armes rudimentaires ainsi qu'un plan de défense.

— Mais comment pourraient-ils savoir qu'ils ont étés poursuivis ? demanda le radariste. Nous ne n'avons pas réussi à les détecter sur nos propres radars de bord...

— C'est vrai, répondit le Second. Mais comme je viens de vous le dire, mieux vaut envisager le pire. Ils sont loin d'être stupides. Ils doivent bien se douter que la Fédération ne laissera pas leur crime impuni. Ils s'attendent certainement à notre arrivée... Mieux vaut considérer cela comme un état de fait !

— Et pourquoi ne pas envisager une autre approche à notre problème ? interrompit le professeur, resté pensif et silencieux jusqu'à présent. Nous pourrions, une fois que nous aurons localisé l'endroit où ils se sont installés, leur envoyer des émissaires. Ceux-ci pourraient négocier leur reddition de façon pacifique, si je programmais le prochain saut de notre cavalerie spatio-temporelle jusqu'à leur emplacement. Cela nous ferait gagner énormément de temps et d'efforts !

— Attendez professeur, s'indigna l'Amiral qui avait failli tomber de son siège en entendant cette dernière remarque. Pourquoi ne nous avez-vous pas fourni cette information plus tôt ? Il vous est donc possible de nous déplacer dans l'espace, sans devoir nous déplacer dans le temps ? Cela se rapproche bien plus de la téléportation que du voyage temporel !

— Exactement Amiral, pour effectuer un saut dans le temps il faut également, et impérativement, faire un trajet dans l'espace... En effet, comme toutes les étoiles et planètes se déplacent sans cesse, leur position varie de façon permanente. Tout voyage temporel nécessite donc un déplacement vers la position, passée ou future, de l'endroit que l'on désire atteindre à un instant prédéterminé ; sous peine de se retrouver flottant dans le vide interstellaire... Je viens juste d'envisager la possibilité de nous déplacer, sur une grande distance, durant un saut quasiment instantané d'à peine quelques secondes dans le temps. Et je ne vois toujours pas pourquoi cela ne pourrait pas fonctionner... Il vaudrait mieux néanmoins tester cette nouvelle théorie avec nos petits chasseurs, avant de s'aventurer à faire un tel saut avec notre frégate.

— Tout à fait d'accord avec vous, répondit l'Amiral. Nous serait-il possible d'y envoyer plus que quatre appareils ? Combien de chasseurs et de petites navettes pourriez-vous modifier durant le délai qu'il nous faudra pour localiser l'emplacement des fugitifs ?

— Tout dépendra précisément de ce délai Amiral. Mais en me mettant au travail tout de suite, sans interrompre la construction du deuxième anneau de notre frégate, j'estime pouvoir équiper une navette ou un chasseur par semaine.

— C'est bien peu, reprit l'Amiral. Mais il faudra bien que l'on s'en contente. Commencez immédiatement à équiper autant de navettes que vous le pourrez. Les quatre chasseurs suffiront à assurer leur protection. Quant à négocier, autant le faire en force en envoyant une solide délégation plutôt que quatre pilotes sans aucune protection.

Tout le monde comprit qu'il n'y avait plus un instant à perdre. Les membres de la réunion s'en allèrent superviser leur personnel s'apprêtant à exécuter la manœuvre de décélération de la frégate. Celle-ci n'allait pas faciliter les travaux du professeur. Il s'en doutait bien, car il semblait penseur et préoccupé. Le Second l'accosta lorsqu'ils se retrouvèrent enfin seuls dans la salle.

— Professeur... Combien de personnes pourraient effectuer ce saut dans une navette ? Il va nous falloir lui désigner un ou plusieurs équipages.

— Nous pourrons la remplir complètement... disons dix personnes. Mais elles devront être éduquées quant aux différents aspects des sauts spatio-temporels par moi-même, ainsi que par nos quatre cadets ayant déjà effectué ce genre de voyage. Je propose qu'ils commencent leur entraînement au plus vite. Pas besoin d'attendre que la ou les navettes soient prêtes ou que nous ayons localisé notre point d'atterrissage. Désignez-moi vite mes prochains cobayes... Je propose de mettre le chef de la patrouille des Bleus en charge de cette nouvelle escadrille ! Nous verrons bien de combien de navettes elle pourra disposer en fonction du délai qui nous sera imparti. Commençons à entraîner une trentaine de membres de notre équipage. Je ne crois pas que nous aurons le temps d'équiper plus de trois d'entre elles pour ce saut.