Chapitre 10

4.9K 236 0
                                    


Suisse, 18H40

Je me tenais au milieu de mon bureau le regard rivé sur le paysage à travers la vitre panoramique devant laquelle j'adorais laisser mes pensées prendre les reines. Voilà une semaine que j'étais rentrée. Je croisais mes bras sur ma poitrine recouverte de mon tailleur beige.

« Ma fille. » Ma mère apparut à mes côtés, la secrétaire venait de m'appeler pour me prévenir de son arrivée.

Elle posa une main sur mon épaule qu'elle caressa avec bienveillance.

« Je suis désolée pour ce qu'il se passe. Les femmes de cette famille n'ont jamais vraiment eu le choix. Et voilà qu'aujourd'hui on essaie de leur donner l'illusion qu'elles en ont alors que la réalité est tout autre. »

« Je ferais en sorte que cela change, que ce soit maintenant ou plus tard. » dis-je du bout des lèvres sans quitter le ciel découpé par les immeubles de la ville.

« Sers-toi d'eux comme ils se servent de nous. » dit-elle sans une émotion sur le visage.

Ma mère fit couler deux cafés dans la machine près de mon bureau. L'odeur réconfortante de la boisson chaude me détendit un peu. Elle me tendit une tasse que j'attrapais.

« Je leur prendrais jusqu'à la dernière miette du pouvoir qu'ils détiennent. Les femmes décideront, plus rien ne se mettra en travers de nos chemins. » conclus-je.

Je réajustais ma jupe, m'asseyais à mon bureau et attrapai le contrat que je venais de finir de rédiger cette après-midi.
Ma mère me sourit, je le lui rendis son doux sourire, celui qui m'avait toujours bercé. Elle attrapa ma main sur le bureau et la serra avec douceur.

« Je t'aime tant. » dit-elle doucement et nous quittâmes le bureau ensemble bras dessus, bras dessous.

Nous nous baladions près d'un lac, profitions ensemble de l'air frais, elle avait sa tête appuyée contre mon épaule. Je ne l'avais jamais vu réellement tranquille, toujours sur ses gardes. Elle paraissait frêle et fragile mais elle avait toujours été une femme forte, une femme d'esprit et possédant un amour inconditionnel pour moi. Nos talons claquaient sur le bitume, nous racontions potins et souvenirs, mettant de côté les événements prochains. Faire abstraction pour trouver la paix, même pendant quelques minutes.
Lorsque j'étais jeune et que nous venions d'arriver ici, nous n'avions pas beaucoup d'argent, on adorait alors se balader au bord de ce lac le soir après une lon,gué journée de travail pour elle et d'école pour moi, et voir les lumières des réverbères danser dans l'eau sombre en bâtissant des projets sans fin. Nous étions repartis de rien, et ma mère, Erika, m'avait transmise l'ambition, la joie face aux petits instants de vie ainsi que la rage de vivre. Des outils qui n'ont pas de prix.

Je raccompagnais ma mère chez elle en voiture et me mis en route vers un appartement que je ne connaissais que trop bien.

« Quel plaisir de te voir ! » s'exclama Steffen Pierce, mon ami et avocat depuis cinq ans. Nous nous étions connu à la fac.

Il m'invita à entrer et me servit un verre de vin français tandis que je m'installais sur le fauteuil de son balcon.

« Alors qu'est ce que tu m'emmènes là ? Ça a l'air d'être du lourd. »

« Tu n'as pas idée. » je souris en attrapant le verre qu'il me tendait, « ça risque d'être un peu long. »

« On a toute la soirée, je ne travaille pas demain et je ne vais récupérer le petit chez sa mère que dans l'après-midi. »

« Comment va Even ? »

« Très bien, plus en forme que jamais. Il a demandé après toi. »

« Oh mais comment ne pas demander après sa tata préférée hum ? C'est impossible. » dis-je avec un petit sourire arrogant.

Steffen rit de bon cœur et attrapa le dossier que je venais d'étaler sur la table basse.
J'observais son visage passer de la surprise à des émotions plus sérieuses tout en avalant mon verre de vin, je le fis tourner entre mes doigts et le posai sur la table au moment même où Steffen finissait sa lecture.

« Il va falloir que tu m'expliques plus en détail ce qu'il se passe parce que là je ne m'y attendais pas. »

Je me mis à lui raconter en détail les événements, et ce qu'on m'avait proposé voir imposé.

« J'accepte cette union mais je veux des parts majoritaires sur le capital de ma famille, ainsi que des parts suffisantes sur la société Moretti me permettant d'avoir mon mot à dire lors des réunions et prises de décision comme je l'ai indiqué sur ces papiers.»

Il possédait une grande société familiale en parallèle de leur activité criminelle. Ils pouvaient ainsi réinjecter l'argent à leur guise et ouvrir leur champs des possibles.

« On peut négocier ça, j'ai quelques détails à pofiner sur ce contrat vu ce que tu m'as dit d'eux mais tu l'as bien réalisé. Tu me facilites la tâche, ça sera rapide. » dit-il.

« Merci Steffen. »

« Mais tu es sûre que c'est ce que tu veux Alaïa ? » une expression d'inquiétude déformait ses traits.

« Je dois nous garder en sécurité. Et puis ça profitera à ma carrière professionnel et à ma propre entreprise si j'obtiens de lui une signature alors au final, je n'ai pas à me plaindre. Peut-être que ce coup de pouce est ce qu'il me fallait pour m'ouvrir au marché étranger. » dis-je le regard dans le vide pendant quelques secondes.

« Professionnellement oui c'est intéressant mais qu'est ce que tu ressens réellement ? Tu aimes ton travail mais je sais qu'il ne t'ai jamais passé à l'esprit de ne vivre que par ça, et là j'ai l'impression que tu comptes t'appuyer là dessus pour t'aider à tenir. »

« J'apprendrais à vibrer avec l'orage. » lui dis-je.

Il leva un sourcil et nous resservit du vin à tous les deux.

« Alors que les choses te sourissent. » lâcha t-il.

La Promise (1er jet) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant