Chapitre deux

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Réveillée brusquement par le chaos violent des vagues, j'étais sur le pont pour aider l'équipage à maintenir le bateau à flots. Une pluie battante s'écrasait sur nous, plaquant nos vêtements à nos peaux. L'Adventure Galley était malmené par la colère de l'eau. La tempête secouait le bâtiment entier et chacun s'affairait en restant proche des cordes du mât. Tomber dans l'eau pouvait être fatal. Nous ne pourrions plonger pour repêcher ceux tombés à l'eau. La chute n'était pas mortelle mais les lames brisaient les corps en quelques secondes.

— Attention ! Hurla un marin.

Un tentacule s'échoua sur le pont et mes yeux blanchirent sous l'effet de mon pouvoir. Je n'eus le temps d'agir que Rana abattait sa lame sur l'étrange bête. Le moignon se glissa dans la mer, et deux tentacules jaillirent à nouveau, entourant le pont de leur étreinte.

— Ne coupez pas les tentacules ! Scanda Valacar.

Ses yeux améthystes tourmentés se posèrent dans les miens. Nous avions visiblement fait les mêmes conclusions. Les Kraken avaient disparus bien avant la naissance des six royaumes. Alors pourquoi l'un d'entre eux était entrain de nous attaquer. Je serrais les dents et me remis en mouvement. Je m'accrochai à une corde pour me balancer de l'autre côté du bateau. Je survolai le pont en quelques secondes et atterris aux côtés de Rana. L'elfe agrippai la proue comme si sa vie en dépendait. Une corde craqua et la grande voile se déplia en quelques secondes. La puissance du vent gonfla le toile et le bateau changea de direction, emporté par la puissance de l'air. Les tentacules du Kraken lâchèrent et nous retrouvâmes un semblant de calme.

— Raccrochez la voile ! Armez les canons !

— Oui capitaine !

La voix de Rana emplit l'air et son équipage se mit au travail. Les boulets furent placés dans les canons, les mèches tendues à la verticale, malgré la pluie qui ne cessait.

— Les mèches ne vont pas s'enflammer avec la pluie, hurlai-je à Rana pour qu'il m'entende dans le brouhaha de la tempête.

— Elles sont imbibés d'huile, me rassura-t-il. Vas me secouer ceux qui dorment on a besoin de tout le monde sur le pont !

Je filai sans un mot, en essayant de ne pas glisser avec les marres d'eau qui recouvraient le pont selon la houle. Le bateau tanguait tellement que même les plus expérimentés dérapaient. J'arrivai difficilement à la porte et je me jetais dans le couloir. La chaleur me réchauffa alors que j'étais trempée jusqu'aux os. Ma chemise me collait à la peau et mon corset me protégeait à peine de l'eau. Mon pantalon et mes bottes en cuir me serraient mais je ne pouvais rien y faire. Je courus dans chaque cabine pour vérifier que toutes étaient vides. Je fus dans la cale et tout le monde se préparait en vitesse.

— Tout le monde sur le pont ! Un Kraken nous a pris pour cible !

Des hochements de tête me répondirent et je ne m'attardais pas. Je remontai et croisai Mardil qui sanglait la ceinture de son épée autour de sa taille. Il m'offrit un pâle sourire désolé, mais je ne lui répondis pas, trop préoccupée par l'attaque. J'arrivai à ma cabine en dernier et je secouai Othar qui dormait dans mon lit. Son sommeil aurait été perturbée si je ne l'avais pas forcé de ma magie. Il veillait sur le mien depuis plusieurs nuits et j'avais pris le relai. Ses yeux améthystes s'ouvrèrent difficilement avant de s'écarquiller alors que la magie quittai son corps. Il sentit le chaos du bateau et se leva en trombe, s'habillant en vitesse. J'en profitai pour enfiler les lanières de mes armes. Je revêtus un harnais par dessus mon corset et y fixai des petits couteaux. Une dague prit place dans l'étui qui reposait en travers contre ma poitrine. Mon épée se logea dans mon dos. Je laissai mon arc et mes flèches, je risquai seulement d'en gaspiller inutilement.

Le poids du destin : l'héritièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant