Playboy

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Voilà qu'elle se lève pour m'échapper. Le voyage déjà touche à sa fin et, alors qu'elle enfile son blouson, je songe une dernière fois à l'arrêter. Je la regarde faire, silencieuse et immobile. Je pourrais essayer de l'arrêter ; dire ou faire quelque chose, n'importe quoi, pourvu que je puisse, même un instant, freiner cet élan inéluctable qui l'éloignera de moi.

Je ne fais rien, c'est à peine si j'ose encore la regarder. Mes yeux pourtant se dérobent à mon insu, soucieux de s'en approprier au moins le souvenir. Le seul susceptible de demeurer.

Elle récupère le sac laissé à ses pieds, le passe à son épaule. Playboy.
Je me souviendrai du nœud papillon de ce lapin qui me scrute encore tandis qu'elle me tourne le dos. Lui sait peut-être que j'aurais aimé lui parler ; faire connaissance, saisir cette opportunité que la succession des choses nous offrait.

Elle s'arrête, immobile, à suite des passagers qui attendent déjà pour descendre. Le commandant de bord vient d'annoncer notre arrivée en gare ; dans une poignée de secondes, quittant le wagon, elle redeviendra anonyme parmi tant d'autres. Et probablement alors, je l'oublierai, à moins que son image ne me poursuivent quelques jours encore.

L'Intercités s'arrête, les portes s'ouvrent et, petit à petit, le train se déverse sur le quai. Des têtes passent qui se succèdent mécaniquement. Assez vite, je me retrouve au milieu de la foule et déjà, j'ai perdu l'épaule à laquelle pendait fièrement l'élégant rongeur. Je presse le pas, peut-être arriverais-je encore à l'apercevoir au détour d'un escalator, noyé dans la masse de voyageurs inconnus.

J'arrive au métro. Trop vite. Je l'ai ratée, à moins que ce ne soit elle qui m'ait échappée. Il était de toute façon trop tard pour lui demander quoique ce soit. Je n'aurais pu que la regarder encore un peu, la suivre du regard jusqu'à, soudainement, la perdre définitivement.

Cette fille ressemblait à une autre qu'un jour j'avais aimé. Je crois.