Scène 9

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KAREN MINEFIELDS – KATHRYN MINEFIELDS – ZACHARY FROST


NARRATEUR. – La femme arrive chez elle d'un pas lourd, lançant son sandwich à la poubelle en soupirant. Un silence lourd et inhabituel plane dans l'atmosphère, alors que Karen semblerait, pour la première fois, faire preuve de sensibilité...

*

KAREN MINEFIELDS, s'asseyant dramatiquement. – Pfff... Quelle journée pourrie... (Elle soupire avec insistance.) Que des cons dans la rue, et ce Frost que je ne peux pas me voir ! Et cette femme d'affaires, qui m'a attaquée... Elle me fait réfléchir... Pourquoi cette indifférence ? Face à moi qui obtient tout et qui fait trembler les gens ? Vraiment étrange. Flippant. Presque angoissant.

KATHRYN MINEFIELDS, arrivant, détendue. – Des accès de mégalomanie, Karen ?

KAREN MINEFIELDS, sursautant vivement. – Qu'est-ce que tu fous ici, Kathryn ?!

KATHRYN MINEFIELDS. – Je viens rendre visite à ma sœur adorée qui a des envies de meurtre et qui parle seule, quoi de plus normal ?

KAREN MINEFIELDS, soupire. – Tu m'énerves.

KATHRYN MINEFIELDS, faisant un clin d'œil. – C'est pour ça que tu m'aimes, non ?

(La sœur arrivante s'installe confortablement à côté de la femme d'affaires, qui la fusille du regard.)

KATHRYN MINEFIELDS. – La foudroyante et redoutée Karen Minefields, seule et pensive sur son canapé en plein après-midi, au lieu d'enguirlander n'importe qui, tant qu'elle enguirlande... La légende s'efface ?

KAREN MINEFIELDS. – Fous-moi la paix. J'ai bien le droit de rentrer chez moi en journée, non ?

KATHRYN MINEFIELDS. – Zen, Karen ! Je trouve juste ça inhabituel et étrange. Comme ta femme d'affaires.

KAREN MINEFIELDS, ahurie. – Tu la connais ?

KATHRYN MINEFIELDS. – Non. Tu en parlais toute seule.

KAREN MINEFIELDS. – ...

KATHRYN MINEFIELDS. – Et donc ?

KAREN MINEFIELDS. – Et donc elle m'a plaquée au sol.

KATHRYN MINEFIELDS. – Toi ?! Elle t'a plaquée, à toi ?

(Kathryn éclate de rire. Karen, d'humeur grincheuse, ne semble pas apprécier.)

KAREN MINEFIELDS, d'une voix geignarde, tentant de caricaturer sa sœur. – Oui, moi. Et alors ?

KATHRYN MINEFIELDS. – Ne me dis pas qu'elle n'avait aucune raison.

KAREN MINEFIELDS. – Elle a perdu son job, mais est-ce que c'est ma faute ?

KATHRYN MINEFIELDS. – Je suis prête à parier que oui.

KAREN MINEFIELDS. – Peut-être, mais je m'en contrefous.

KATHRYN MINEFIELDS, souriante. – Je suis prête à parier que non.

KAREN MINEFIELDS. – Tu m'emmerdes, à la fin. (Celle-ci lui sourit en coin.) Mais si tu veux vraiment savoir, c'est son changement d'attitude qui m'a déstabilisée. Elle était prête à me tuer, un déclic, et paf ! (Elle tape violemment dans ses mains.) La maîtrise émotionnelle d'un grand sage, et elle me dispense des philosophies à deux balles avant de partir, indifférente.

KATHRYN MINEFIELDS. – Mais quelles philosophies ?

KAREN MINEFIELDS, soufflant une fois encore, caricaturale. – Qu'elle ne s'abaisserait pas à parler à des personnes dont la philosophie n'était que la violence, blablabla... la violence n'engendre que la violence... gneugneugneu...

La Colère Humaine - Pièce de théâtreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant