57. Questions sans réponse

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"Maman !" s'exclama Yoake. "Maman, maman, aujourd'hui un copain m'a dit qu'il allait avoir une petit soeur !"

Shinobu baissa les yeux pour regarder sa fille. L'amour qui se lisait dans son regard était si profond qu'il en était presque douloureux. 

"Ah oui ?" demanda-t-elle en souriant chaleureusement. "C'est super."

"Maman," commença Yoake d'un ton hésitant, "comment on sait quand on est amoureux ?"

Shinobu inclina la tête de côté. Elle ne s'attendait pas à une telle question venant d'une fillette de sept ans. Elle s'était déjà préparé pour répondre à toutes sortes de questions venant de Yoake, comme "Comment fait-on des bébés" ou "Pourquoi on doit respirer pour vivre", mais pas... pas ça.

"Eh bien..." Elle chercha soigneusement ses mots. Si elle disait quelque chose de travers, sa fille le retiendrait jusqu'à la fin de sa vie et elle vivrait avec le sentiment de ne jamais trouver l'amour ou de le trouver trop souvent.

"Il faut que tu sentes ce sentiment très puissant dès que tu regardes la personne que tu penses aimer," reprit-elle. "Il faut... Il faut que tu sentes que tu mérites cette personne autant qu'elle te mérite."

"C'est tout ?" s'étonna Yoake. 

"Il faut... Il faut que cette personne soit capable de te faire sourire par la simple force de son regard. Si tu aimes vraiment quelqu'un, la simple pensée de passer le reste de ta vie en sa compagnie te rendra heureuse."

"D'accord !" s'exclama Yoake. "Merci maman."

Shinobu regarda sa fille s'en aller en sautillant joyeusement pour rejoindre sa bande de copains. Elle raconta quelque chose à ses amis. Ces paroles tournèrent la tête du petit Bakugo vers Shinobu. Cette dernière soupira.

De rien...


"Blanche-neige ?"

Yoake grogna quand quelque chose lui piqua la bras. 

"Blanche-neige, t'es morte ?"

"Narita, ferme ta gueule," lâcha dédaigneusement une voix au-dessus de la tête de Yoake. 

La jeune femme était avachie sur son bureau, la tête dans les bras. Elle ne savait pas combien de temps elle avait dormi. Sûrement pendant toute la durée du cours. Elle releva la tête pour voir Narita penchée sur elle, le regard rivé sur le visage de Kase qui se tenait debout à côté d'elle. 

"Oh, je dérange ta petite amie ?" demanda Narita. "C'est ça ?"

Yoake jeta un regard inquiet à Kase. 

Oh non, s'il te plaît, tiens ta langue ! Si tu lui dis maintenant, on aura plus d'ennuis qu'autre chose. 

Mais Kase avait déjà répondu, "Bah ! Qui a dit que c'était ma petite amie ?"

"Je sais pas, j'ai l'impression que tu passes beaucoup de temps à lui courir après," rétorqua Narita en plissant les yeux. 

"C'est sûr qu'elle est beaucoup plus attrayante qu'une certaine personne de ma connaissance," contra Kase. Son regard brillait, mais impossible de savoir ce qu'il pensait. 

"Tu parles de toi ?" demanda Narita en riant. 

"Bon !" les interrompit Yoake. Elle se leva brusquement et attrapa le bras de Kase. "Je sais que vous vous adorez et tout ça, mais-"

"Mêle-toi de tes affaires," la coupa froidement Narita. 

Kase dégagea son bras. "Et mêle-toi des tiennes," grogna-t-il à Narita avant de tourner sur ses talons et de sortir de la classe d'un pas lourd, les mains dans les poches. 

Yoake poussa un profond soupir. "Tu peux pas t'empêcher d'emmerder le monde, hein ?"

Narita lui lança un regard assassin sans répondre. Alors Yoake se leva difficilement de sa chaise, rassembla ses affaires en un geste et, son sac à dos sur l'épaule, elle quitta la salle de classe en ignorant le regard de ses camarades posé sur elle. 

Kase ne l'attendait pas à l'extérieur de la classe. Yoake jeta quand même un regard autour d'elle pour en être sûre, mais elle ne le voyait pas. Alors c'est seule qu'elle se mit en route pour rentrer chez elle avec un haussement d'épaules indifférent. 

Sur le chemin, elle réfléchit. Encore. 

Mais cette fois-ci, elle pensa à Aemi. Elle ne pensait pas beaucoup à elle ces temps-ci, ayant un emploi du temps assez chargé, mais lorsque l'image de sa petite fille lui venait à l'esprit elle sentait son coeur être traversé de milliers d'épines. Aemi lui manquait énormément. Elle aurait vraiment aimé être capable de passer chez Katsuki pour la voir avant la fin de la semaine, quand Katsuki la ramènerait à la maison, mais elle n'en avait pas le courage. Elle avait peur de passer ne serait-ce qu'une minute en compagnie de sa fille sous le regard attentif de Katsuki, qui ne raterait pas un seul de ses mouvements. Cela l'effrayait.

Petit à petit, son esprit dériva vers le rêve qu'elle avait fait pendant qu'elle dormait en cours. Ce n'était pas vraiment un rêve, puisqu'elle avait vraiment vécu cet événement, mais elle se demanda pourquoi cela lui était venu à l'esprit maintenant. Ce n'était pas la conversation qui l'avait le plus marquée, alors pourquoi ? 

Les mots de sa mère lui revinrent brièvement à l'esprit. 

Il faut que tu sentes que tu mérites cette personne autant qu'elle te mérite.

Alors, elle fut prise d'un doute immense. Est-ce qu'elle méritait vraiment l'amour de Kase ? Il était prêt à faire beaucoup de choses pour elle, mais était-elle prête à faire la même chose pour lui ? 

Elle n'en avait aucune idée. Mais elle avait bien l'impression que Kase méritait mieux qu'elle...

Ses pensées se focalisèrent sur Katsuki. Est-ce que, lors de leur relation, elle s'était sentie prête à tout pour son bonheur ? Est-ce qu'il avait été prêt à faire la même chose pour elle ? Si leur relation avait duré plus longtemps, auraient-ils ne serait-ce qu'envisager de passer le reste de leur vie ensemble ? 

Yoake réalisa, le coeur lourd de culpabilité et de chagrin, qu'elle aurait pratiquement tout donné pour retrouver l'amour de Katsuki.

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