59. Litchi

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"Qu'est-ce que c'est que ça ?"

"Ca," répondit Sasaki en levant vers Katsuki un regard ravi, "c'est un rat."

"ET QU'EST-CE QUE CA FOUT DANS MA CHAMBRE ?!" 

"Je l'ai trouvé dans la rue," se défendit Sasaki. Elle caressa doucement la tête du rat, une grosse bête grise qui sentait le moisi. "Il avait faim et froid, alors je l'ai ramené ici pour lui donner un peu de fromage. J'ai utilisé un de tes caleçons pour le réchauffer."

Le visage tordu par la colère, Katsuki rassembla toutes ses forces pour ne pas hurler. Mais la tempête à l'intérieur était trop forte ; il hurla, "QUI T'AS AUTORISE A UTILISER MES CALECONS POUR RECHAUFFER TA MERDE A MOITIE CREVEE ?!"

"Tu ne laisserais quand même pas mourir un pauvre rat ?" le défia Sasaki. 

"SI !"

"KATSUKI !" hurla une voix venue d'en bas. "ARRÊTE DE HURLER !"

"JE HURLE SI JE VEUX !" répondit brutalement Katsuki. 

"SI TU CONTINUES DE BRAILLER COMME UNE BÊTE, JE VAIS MONTER !" menaça Mitsuki. 

Katsuki devina qu'elle ne plaisantait pas. Il faillit cingler une réponse agressive, mais il se retint de justesse. A la place, il tendit le doigt vers la porte et ordonna, "Tu gardes ta bestiole où tu veux, mais pas dans ma chambre. Sinon, je veillerais personnellement à ce qu'elle se retrouve dans les toilettes d'ici ce soir."

Aemi tendit les mains pour toucher le rat, qui tremblait comme une feuille dans les petits bras de Sasaki. Katsuki attrapa le bébé et la posa brusquement sur le lit avant qu'elle ait pu toucher la bestiole, puis il fit volte-face vers Sasaki. 

"Je te jure," grogna-t-il d'un ton menaçant, "que si Aemi chope une maladie à cause de ta merde, je te jette dehors."

Visiblement Sasaki était dans la provocation , car elle pencha la tête de côté et répondit, "Le caca ne donne pas de maladies. Je vois pas ce qu'elle craint."

"JE VAIS TE TUER !"

Sasaki se dépêcha de se lever avant de courir dans le salon avec son rat dans les bras, poursuivie par le blond. Elle alla se cacher derrière Mitsuki et murmura, "Katchan veut pas que je garde mon rat."

"Quel rat ?" demanda Mitsuki. En voyant le sac à puces qu'elle tenait dans les bras, la mère de Katsuki fit un bond en arrière. "Qu'est-ce que c'est que cette horreur ?"

"Il s'appelle Fromage," répondit Sasaki. "Et c'est un rat. Dis, je peux le garder ? S'il te plaît ?"

"Hors de question," répondit fermement Mitsuki. "Katsuki, débarrasse-moi de ça."

"Mais je veux le garder," insista Sasaki. 

"Katsuki, maintenant."

Katsuki leva les yeux au ciel. "Ouais ouais, c'est bon."


Ce soir-là, Yoake se coucha en compagnie du petit Litchi. Elle n'avait pas encore acheté de panier, juste des gamelles et de la nourriture, alors elle avait installé le petit chat à côté d'elle. Elle avait vraiment hâte de parler de lui à Kase. D'après ce qu'elle savait, il adorait les chats. 

Litchi se blottit sur l'oreiller disponible sans lui jeter un regard. Yoake essaya de lui caresser doucement le dos, mais il tressaillit et sa fourrure se hérissa légèrement. La lycéenne abandonna et se livra au sommeil. 

Le lendemain, en arrivant au lycée, elle alla s'installer à sa place. A sa grande joie, elle vit Kase la rejoindre avec les mains dans les poches. Elle cligna des yeux d'un air interrogateur en constatant qu'il avait un pansement sur la joue et un autre sur le nez. Tandis qu'il s'approchait, elle remarqua que ses poignets étaient bandés. 

"Salut," la salua-t-il d'un air décontracté. 

Yoake attrapa son bras d'un geste vif et sortit sa main de sa poche. Kase ne broncha pas. 

Sa main aussi était bandée. Et c'en était sûrement de même pour l'autre. 

"Qu'est-ce que tu as fait ?" demanda-t-elle en levant les yeux vers lui.

Kase haussa les épaules. "Je me suis battu."

"Pourquoi ?"

Nouveau haussement d'épaules. "En rentrant chez moi, j'ai croisé deux ou trois anciens copains. On n'était pas en bons termes, alors on a réglé ça avec les poings. Mais ça n'a pas d'importance," ajouta-t-il en balayant l'air de sa main tandis qu'un sourire apparaissait sur son visage. "Tu vas bien ?"

Yoake ne comprenait pas comment il faisait pour rester aussi indifférent alors qu'il s'était  battu et qu'il avait même été blessé.

"Oui," répondit-elle. "Tu ne t'es pas trop fait mal ?"

"Mais puisque je te dis que tout va bien," marmonna-t-il. "Tout va très très bien, même."

Pendant un instant, Yoake se demanda s'il essayait de se convaincre lui-même, mais elle chassa aussitôt cette pensée. Que pourrait-il bien lui cacher qui soit important au point de se mentir à lui-même ?

"Ils n'ont pas atteint tes genoux ?" insista Yoake. Sans savoir pourquoi, elle sentait qu'il lui mentait. 

"T'inquiètes pas, bordel !" rétorqua Kase. "Regarde, je suis là, je suis debout, je suis vivant, je vais bien."

"Si tu le dis," marmonna Yoake, peu convaincue. "Tes relations avec ton père se sont améliorées ?"

Instantanément, elle sut qu'elle avait touché une corde sensible. Son visage s'assombrit un peu et il détourna brusquement le regard. 

"Non."

Yoake attrapa le col de son uniforme pour qu'ils soient nez-à-nez. "C'est ton père qui t'a fait ça, n'est-ce pas ?"

"Ecoute, Yoake," murmura Kase en croisant son regard. "Ce qui se passe chez moi ne te regarde pas. Je suis désolé."

"Qu'est-ce qu'il t'a fait ?" insista Yoake. "Tu peux pas continuer à vivre comme ça. Parce que je présume que c'est pas la première fois, pas vrai ?"

Kase se retira brutalement et lâcha, "Non, c'est pas la première fois. Mais je m'y habitue. J'aime pas mon père mais il est tout ce qu'il me reste, et je ne laisserait pas les services sociaux m'envoyer ailleurs."

"Mais je veux pas que tu continues à vivre comme ça. Tu dois faire quelque chose," persista Yoake d'un ton suppliant. "Je veux pas que tu finisses comme Karasu à cause de ton père."

Le regard de Kase se perdit dans le vague. Il savait ce qui était arrivé à Karasu. Il savait tout. Et il avait dit lui-même qu'il ne voulait pas finir comme ça. Mais Yoake savait que, tôt ou tard, il cèderait à la facilité des actes de Karasu. 

"La prochaine fois, essaie au moins de te défendre," supplia-t-elle. "S'il te plaît."

Un demi-sourire en coin se dessina sur les lèvres de Kase. "Ah ça, t'inquiètes pas. Ses bijoux de famille ont gardé un bon souvenir de mes pieds."

The game || My Hero AcademiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant