Chapitre 3

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 Cela faisait une semaine que Bokuto était allé voir Akaashi à la bibliothèque après sa fermeture. Il avait raccompagné le jeune homme chez lui en discutant de tout et de rien, mais surtout d'eux-même. Ils avaient fait connaissance, somme toute.

Bokuto avait appris d'Akaashi qu'il travaillait dans sa bibliothèque depuis deux ans; qu'il lisait beaucoup et de tous types de livres, mais surtout des romans d'aventure; que son café préféré était le latte, ce qui le fit se parer d'un sourire éblouissant.

Akaashi en revanche avait appris de Bokuto qu'il changeait généralement d'emploi tous les six mois, parce qu'il se faisait virer, mais que pour une fois il avait dépassé le cap des huit mois et en était très fier. Il apprit également que son animal préféré était la chouette, information qui ne le surprit pas outre mesure.

Bokuto parlait sans cesse de chouettes. Sans doute était-ce chez lui une passion. Son encéphale parvenait à associer à toute situation son équivalent implicant une chouette, et il ne se gardait jamais d'en informer son entourage. Ce qui lui avait d'ailleurs valu de Kuroo pas mal de sourires moqueurs.

Ils avaient prévu de se retrouver ce jour là, pour poursuivre leur conversation. Akaashi ne savait pas vraiment s'il s'agissait d'une sortie classique, d'une tentative de flirt ou même directement d'un rendez-vous galant, et il était pratiquement certain que Bokuto, lui, ne s'était absolument pas posé la question.

Dans le doute, il avait fait légèrement plus d'efforts vestimentaires que d'habitude, ce qui consistait chez lui à parer un de ses sempiternels cols roulés d'un blazer noir (en prévision de la différence de température, il avait mit un pull plus léger qu'à l'accoutumée).

Leur projet était d'attendre la fermeture de la bibliothèque, qui aurait lieu plus tôt ce jour-là car il s'agissait d'un dimanche, et de se rendre en ville ensemble. La suite, l'avenir en déciderai. Akaashi surveillait d'un oeil sévère l'horloge de la salle de lecture, son appréhension ne pouvant rivaliser avec sa curiosité.

Sans doute stressait-il un peu trop, mais il ne s'en rendit compte que lorsqu'il lança sans le faire exprès un regard assassin à une pauvre adolescente qui venait s'enquérir de ses conseils littéraires. Il se repris bien vite et recommanda trois bons romans à la malheureuse fille tétanisée.

Il fit par la suite attention à ne plus effrayer personne et cet incident ne se reproduisit pas.

Après avoir discuté schéma narratif avec quelques fanatiques d'Heroic Fantasy et débattu prose et alexandrins contre un une personne âgée qui ne jurait que par Verlaine, il retourna s'asseoir sur un des vieux fauteuils et reprit sa décortication mentale de l'horloge, qui malgré ses menaces tacites refusait de se hâter.

Akaashi la fixa de plus belle, et si le pauvre objet avait eu des yeux peut-être lui aurait-il renvoyé un regard intrigué, faisant fi de son aura meurtrière, ou peut-être se serait-il détourné par peur, mais le fait était qu'une horloge possédait rarement de globes oculaires, aussi se contenta-t-elle te tic-taquer impassiblement - ce qui déplut à Akaashi: pour qui se prenait donc cette horloge, à défier son autorité?

Il se prit - à titre informatifs uniquement, si ce n'était pour passer le temps - à imaginer toutes les façons possibles de faire du mal à une horloge. Et cet exercice mental des plus pacifiques le passions au point que, bien qu'il ait toujours les yeux rivés dessus, il oublia de lire l'heure affichée par les aiguille. Il fut tiré de sa rêverie lorsqu'un individu soutira à son regard l'objet de ses plans de tortures, et le décrochant du mur.

Bokuto descendit de la chaise sur laquelle il était monté et se retourna vers un Akaashi confus.

« - Cette horloge est plus intéressante que moi? Demanda-t-il, dépité et boudeur.

- Je suis désolé Bokuto-san, j'étais totalement ailleurs, s'excusa le bibliothécaire.

- En train de courir dans un champ au bras d'une horloge, sans doutes? L'interrogea l'homme chouette, dont la moquerie cachait à peine la jalousie.

- Plutôt en train de lui perforer le cadran à la scie à chantourner », avoua-t-il avec un sourire en coin.

Bokuto mima une expression choquée et se recula de quelques pas.

« - Maltraitance matérielle! Comment peut-on oser faire subir de telles choses à une pauvre horloge, innocente, pleine de rêves et d'espoirs! » Il cria ses mots tel l'acteur d'une tragédie antique, ses traits habités d'un sérieux exemplaire. Sérieux qui fut mis à mal lorsque Akaashi éclata de rire, provoquant chez Bokuto un sourire ravi.

« - Plus sérieusement, poursuivit-il, torturer des pendules fait partie de tes passions? Parce que si c'est le cas je ne juge pas mais ça me semble peu rentable... Demanda l'homme aux yeux dorés.

- Non je vous rassure, en général je n'ai rien contre elles, mais celle-ci a eu l'audace de tourner de manière particulièrement lente, répondit Akaashi, dont le rire s'était apaisé pour ne plus laisser sur son visage qu'un sourire doux, à en faire fondre Bokuto.

- Oh, ça veut dire que tu avais hâte de me voir? Interrogea ce dernier dont les yeux brillaient de joie.

- Bien sûr Bokuto-san, affirma le bibliothécaire qui avait choisi d'opter pour une honnêteté sans faille.

- Hey hey hey!!! Je suis content, parce que moi aussi j'étais impatient de venir! Il s'exclama, un bonheur sincère se lisant dans ses yeux. On y va?

- Avec joie, répondit simplement Akaashi. »

Et ils prirent la direction de la ville, laissant à Kenma le soin de fermer la bibliothèque, malgré les sourires à fendre l'âme du pauvre jeune homme, qui ne rêvait que d'un plaid et d'une manette, reliée à un écran plat.

Alors que les deux hommes marchaient côte-à-côte dans le rue, discutant pendules sur un ton léger, une idée germa dans le cerveau d'Akaashi. Il se rapprocha subrepticement de son compagnon, et enroula son bras autour du sien, sans cesser de parler d'un voix douce, comme si cet acte était anodin. En réalité il n'avait absolument pas l'habitude d'être entreprenant et un geste aussi insignifiant était pour lui d'une audace inimaginée, mais lorsque Bokuto, surpris, tourna la tête vers lui, il ne sembla pas remarquer son trouble et se contenta de sourire doucement en poursuivant la conversation.


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1041 mots

15/04/21

Quelles seraient vos idées de torture d'horloge?

-Laurene-

Entre deux rayonnages - BokuakaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant