Chapitre 3

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Les semaines suivantes, elle ne me parle pas de Weasley. Et moi, je ne relance pas non plus la discussion. Je n'ai pas oublié le fiasco sur le toit. Je ne peux pas prendre le risque qu'elle apprenne ce que je ressens pour elle. L'humeur de Granger s'améliore un peu. Je crois que Weasley lui fiche un peu la paix. Du moins, c'est ce que je croyais.

Le chef nous avait lâché une pile de dossiers monstrueuses sur nos bureaux sous nos yeux, éberlués.

- Le département de régulation des créatures magiques vient de nous transférer leurs dossiers. Le stagiaire a oublié de le faire depuis trois semaines, fulminait le chef en coiffant son impressionnante moustache.

- Il y a au moins 45 dossiers, j'avais fait remarquer.

- Oui, et ce ne sont que les dossiers urgents. Il faut que vous vous en occupiez. Ce soir.

J'avais protesté lourdement, Granger aussi. Elle avait quelque chose de privé ce soir-là d'après ce que j'avais compris, mais le chef était resté intraitable. On devait boucler ces dossiers ce soir avant de partir. Résignés, on s'est mis à la tâche.

Je bossais bien depuis quatre heures et j'en étais à mon douzième dossier. Granger me talonne de près. On ne tient que grâce au café alors que la petite horloge au-dessus de la porte indique 1h17.

- On parie combien qu'il ne nous payera pas nos heures supplémentaires ? je marmonne.

- Je pourrais parier une main. Même les deux, répond Granger.

Elle s'étire de tout son long et je la regarde. Ça fait longtemps que je ne l'ai pas observé de cette façon. Elle m'a rendu moins bizarre, moins inquiétant à la suivre partout. Maintenant qu'elle est face à moi, que j'ai un contact régulier avec elle, je me sens moins obsédé par elle. Du moins, pas obsédé comme avant.

- Tu avais un truc de prévu ce soir ? je demande.

- Evidemment. On est vendredi soir, Drago.

Je frissonne. Il lui arrive de plus en plus souvent de le prononcer. Mon prénom. Et chaque fois, ça ne me laisse pas de marbre.

- Et toi ? demande-t-elle.

- Rien de spécial.

Je n'ai jamais vraiment quelque chose de prévu. La plupart de mes amis étaient morts ou enfermés à Azkaban. Il m'arrivait parfois d'aller boire un verre avec Zabini, mais ce n'était jamais très palpitant. L'époque où nous sortions jusqu'au bout de la nuit était loin.

Je ne lui aurais jamais avoué que je préférais mille fois être ici, au bureau, à clôturer des dossiers à 1h00 du matin, si tant est qu'elle était avec moi plutôt qu'au manoir Malefoy, s'ennuyant ferme. Elle regarde souvent sa montre. J'imagine qu'elle n'a pas le même sentiment que moi à ce sujet.

On ne discute jamais beaucoup. A vrai dire, on ne discute pas. La plupart du temps, on se parle seulement de façon utilitaire. Il lui arrive de me demander un dossier, et moi une plume de rechange, mais ça ne va jamais beaucoup plus loin. Les quelques fois où nos échanges ont duré plus d'une minute se comptaient sur les doigts des deux mains. Il y avait la fois où je lui avais sauvé la mise pour Weasley, dans l'ascenseur lorsqu'on avait pris une pause-café et quelques fois où elle m'avait hurlé dessus pour que j'arrête mes fichues blagues.

Il ne reste que trois dossiers. Je commence à voir le bout et au fond, ça m'attriste un peu. J'aurais aimé passer la nuit avec Granger, même si ce n'était qu'au bureau et pas au lit. J'attrape l'un des derniers dossiers et papillonne des yeux. Ils me brûlent et je commence à ne plus voir clair. La fatigue me rattrape. Granger aussi. Je la vois qui s'endort sur son coude alors qu'elle lit un dossier sur les centaures de Poudlard.

Ministère de la magie, 72ème étage, département de la Justice MagiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant