Folie meurtrière

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 Je regardais par la fenêtre, les yeux dans le vague, comme hypnotisé par le bruit de la pluie battante venant tambouriner contre la fenêtre.

- Quelque chose ne va pas docteur ?

Cela faisait un moment que je tapotais mon crayon contre mon carnet, mécaniquement. Je revins à l'instant présent et regardai ma patiente. Elle caressait son pendentif entre ses doigts tout en me fixant.

- Désolé, j'ai eu une petite absence, j'étais perdu dans mes pensées. Je vois que vous semblez être attachée à ce pendentif. Dites-moi, que représente-t-il pour vous ?

- Il appartenait à ma mère...

En bon psychiatre, je notais sur mon carnet les moindres détails de son récit.

- C'est un souvenir d'elle. Elle me l'a donné sur son lit de mort. Je la revois encore...

Le beau visage de ma patiente s'assombrit tristement.

- Elle me caressait la joue... elle me fit ouvrir la main et y posa délicatement ce pendentif après l'avoir retiré de son cou. Elle me dit de le garder précieusement, toujours près du cœur, et de ne jamais m'en séparer, car il contenait tout l'amour qu'elle avait pour moi... Ce furent ses derniers mots.

Je laissais passer un court silence de circonstance et analysais les traits du visage de ma patiente pour noter toutes les émotions que je pouvais y découvrir. J'y lu beaucoup de tristesse, de mélancolie... mais aussi... une sorte de colère, probablement liée à son impuissance face à la mort de sa mère et à son autre personnalité. Elle releva les yeux et sécha ses larmes.

- Merci docteur, cela m'a fait du bien de me rappeler ce souvenir. Je crois que nous arrivons à la fin de notre séance ?

- Oh ! En effet, je n'avais pas vu l'heure tourner. Je vous revois lundi prochain donc ?

- Oui, je repasserai vous voir.

Je me levais et raccompagnais ma patiente. Je la regardais s'en aller, un peu hypnotisé par son déhanché mis en valeur par ses formes généreuses et ses habits très chics. C'était ma dernière consultation de la journée. Je me rassis dans mon fauteuil de cuir confortable, et consultai encore un peu mes notes.

Cela faisait maintenant une année que je suivais cette patiente. Et, après vérification, c'est la première fois qu'elle me parlait de sa mère. Je me notais de l'interroger davantage sur ses parents à la prochaine séance. Cela expliquerait peut-être, en partie, l'origine de son dédoublement de personnalité. Naturellement douce, elle avait en effet des excès de colère très spectaculaires et décuplant ses forces. Il m'a fallu, à plusieurs reprises, lui administrer un calmant pour qu'elle reprenne ses esprits.

Grâce à nos séances, et notamment nos séances d'hypnoses, nous étions parvenus à réduire la fréquence de ces changements de personnalité. Elle avait cependant encore des progrès à faire avant d'être totalement guérie. J'en restais là sur cette patiente, traitais d'autres dossiers avant de rentrer chez moi.

Après une demi-heure de route sous la pluie, un passage à l'épicerie pour refaire le plein de bières et de quoi grignoter, je poussais la porte de mon petit deux pièces. Content d'être rentré, j'enlevais mon imperméable, jeta ma besace au sol, mis les bières au frais, en pris une qu'il me restait au passage et m'affala dans le canapé de mon minuscule salon, télécommande en main.

Je zappais les chaînes toutes les deux secondes, faute de bonne émission, jusqu'à ce que j'arrive sur celle des informations. Gros titre : "Un homme retrouvé mort dans sa maison, s'étant probablement suicidé en se coupant la main à la hache". Je ne comprenais pas trop comment cela était possible. J'allumais le son :

Sombres histoiresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant