Chapitre 3

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          Comme chaque lundi, aujourd'hui il n'y aura pas d'intervention, je suis de repos. Je m'adonne à mon activité favorite : la lecture. Aujourd'hui j'ai opté pour un livre de Virginia Woolf. J'adore.

Couchée sur mon lit, j'observe d'un œil mes colocataires. Naëlle, les écouteurs enfoncés dans les oreilles, range son linge. Enfin, ranger est un bien grand mot. Elle enfonce ses t-shirts en boules dans son placard. La fille étrange, qui apparemment s'appelle Mathilde est assise, prostrée sur son lit, le regard dans le vide. En deux mois passés ici, elle ne m'a adressé la parole que trois fois. Je n'ai aucune confiance en elle, je me méfie des gens comme elle. Ils voient et savent tous, mais ne disent rien. Si quelqu'un peut te trouver Ro, ça sera surement elle. Je dois la surveiller. Et ensuite il y a Julie. Cette fille devrait remporter la palme des hypocrites. Elle m'est hostile depuis le premier jour. Naëlle s'est laissé attendrir par son faux sourire, mais sur moi ça ne prend pas.

Mon téléphone vibre.

                               Taïs

Tu fais quoi ?

                              Rien de particulier.

Pourquoi ?

                              Je dois m'acheter un jean.

Tu m'accompagnes ?

°°°

          Je toque à la chambre 7. J'entends de la musique à l'intérieur de la pièce. Je toque de nouveau mais beaucoup plus fort.

- J'arrive !

Ne te dépêche pas bien sûr. J'ai tout mon temps.

- Lily !

- Antoine.

- Qu'est-ce que tu fous là toi ?

- Je viens voir Taïs.

- Je suis déçu.

- Quoi ?

- Je pensais que tu venais me voir moi !

- Arrêtes tes conneries. Je peux entrer où tu me laisses poireauter dans le couloir ?

- Non bien sûr, viens.

Je suis Antoine dans le minuscule couloir qui mène à la chambre. Ses lunettes rondes lui donnent un air amusant, mais sa carrure lui évite de ressembler à un enfant. Taïs est assis sur son lit, en train de jouer de la guitare électrique. Eric reproduit la même scène sur le lit dans face. Le son des instruments intensifié sur l'ampli fait bourdonner mes oreilles. Je ne connais pas cette musique, mais c'est beau. Surement une de leurs compositions. Taïs ne s'est toujours pas retourné. Il n'a pas dû m'entendre. Je m'approche de lui mais n'ose pas le toucher.

- Taïs ?

Il ne m'entend pas. Je fais le tour du lit pour me mettre face à lui. Quand il me voit, il cesse brutalement de jouer et rougit violemment.

- Désolé, je ne t'avais pas entendu.

- Tu aurais dû continue, c'était beau.

Est-ce que je viens vraiment de lui faire un compliment ? Je n'en fais jamais.

- Qu'est-ce que tu fais ici ?

La guitare d'Eric attaque un air plus doux.

- Tu m'as dit vouloir faire du shopping, je t'accompagne.

Son sourire illumine son visage.

- Cool !

          Faire les boutiques avec lui est plus amusant que je ne l'aurai imaginé. Taïs trouve toujours une histoire idiote à raconter, des passants de qui rire. Tu aurais pu aimer un homme comme lui Ro. Il aurait fait un excellent papa pour Charly.

- Bon ! Ça fait deux heures qu'on est là et tu n'as pas essayé un jean !

Je ne peux m'empêcher de rire.

- C'est toi qui me distrais ! Tu monopolise toute mon intention !

Ses yeux s'attardent sur mes lèvres.

- Pardon ? C'est toi qui joue les enfants depuis tout à l'heure ! Tu veux que maman te tiennes la main et t'aide à choisir ?

- Toi ! Si je t'attrape...

Je me mets à courir dans la boutique, ne pouvant cesser de rire. Slalomant entre les rayons, mon pied s'entrave dans un portant. Taïs hurle derrière moi.

- Je t'ai !

Je sens ses bras serrer ma taille et me soulever du sol. Je me débats mais sa force est supérieure à la mienne. Il me repose au sol et met son nez dans mes cheveux. Son souffle chatouille m'a peau.

Mais que suis-je en train de faire ? Je m'écarte de son corps chaud et lui fait face.

- Ok, tu as gagné. Bon, je vais bientôt devoir rentrer et rejoindre Naëlle. Trouvons d'abord ce jean.

Il ne me répond pas, se contente de sourire. Les jouesen feu, je ramasse mon sac à main tombé au sol et me dirige dans le rayon pourhommes.

LilyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant