Chapitre 17

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Le 18 avril, 11h

Oswald se saisit fermement de son outil et, sans aucune hésitation, le planta dans la chair chaude. Du sang coula sur le métal, tâchant son ustensile déjà maintes fois utilisé pour cette même tâche. Puis, toujours dans ses gestes habituels, il attrapa le pot de sauce américaine et l'étala sur les pains à burger. Toujours avec sa spatule, il détacha de la plancha les deux steaks préalablement découpés et les posa précautionneusement sur les pains. Quelques lanières de salade. Des cornichons. Ah non ! Pas de cornichon ! Il regarda autour de lui pour vérifier que personne ne le voyait puis il prit une tranche de cornichon et la mangea.

Il posa le burger sur un plateau. Un cornet de frites et une boisson avec. Deux serviettes. Puis on amène. Il se saisit du plateau et suivit le chemin parfaitement calculé pour optimiser la vitesse de trajet sans risquer de faire tomber la commande. Il posa le plateau sur une table à laquelle était assise une fille qui semblait avoir son âge et regardait la rue par la fenêtre, l'air pensif. Il ne voyait pas son visage mais uniquement ses cheveux bruns coupés au carré. Il ne dit rien et s'éloigna. Il n'était que 11 heures et le restaurant était donc quasiment vide. Il vit alors une fille sublime. Des longs cheveux noirs, la peau mate et de grands yeux verts. Elle riait en discutant avec une amie assise en face d'elle. Oswald n'avait pas le droit de lui parler mais peut-être que...

« EHHHH MMMBEEEE BURGEEEEER »

Oswald se retourna et repéra alors un homme qui était de toute évidence pété comme un trou. Ses joues ainsi que son nez avaient une teinte rouge qui le faisait ressembler à un clown qui avait éternué pendant sa session maquillage. Sa bouche pendait mollement et son visage était luisant de sueur. Mais surtout, il avait cette démarche caractéristique des gens bourrés : une danse grotesque, une parade nuptiale d'éléphant de mer. Il s'approcha du spécimen et commença à sentir les relents d'alcool. Il se souvint de son père. Ça en disait long. La seule chose qui lui rappelait son père était l'odeur de l'alcool. Il aurait préféré quelque chose d'un peu plus poétique, une sortie au parc d'attraction, une après-midi jeux de société, ou juste un câlin mais on fait avec ce qu'on a. Au moins il se souvenait de lui. Et il était sûr de ne jamais boire.

« Monsieur je vais vous demander de quitter le restaurant. » dit Oswald en s'approchant.

L'homme hurla avant de se jeter sur lui. Oswald esquiva rapidement sur le coté avant de balayer son assaillant et de le maîtriser au sol d'une clé de bras. Les formations de MMA en ligne ça marche mine de rien. Il releva la tête d'un air fier. La fille ne le regardait pas. Personne à vrai dire, si ce n'est un couple qui attendait sa commande et observait la scène par dépit plus que par intérêt.

Il s'assit à la table en terrasse de son café préféré. Une nouvelle journée de merde dans la journée d'Oswald Jackmann. Il observa le bâtiment à sa droite avec une grande attention. La rue formait un « T ». Une avenue principale et une rue perpendiculaire. Et, faisant face à cette rue perpendiculaire, trônait un temple traditionnel chinois. Au beau milieu de Los Angeles.

D'après les renseignements d'Oswald, le propriétaire avait refusée de vendre et le temple était resté propriété du clan. Ça aussi il l'avait glané durant ses interrogatoires plus ou moins musclé. La mafia chinoise siégeait dans le bâtiment. Il préparait son opération la plus ambitieuse. Après des mois d'assassinats de petites frappes, il passait à la vitesse supérieure. Et pour ça, il devait connaître le bâtiment sur le bout des doigts. Il avait commencé son repérage trois semaines auparavant environ, quand il avait entendu parler des Silencieux pour la première fois. Mais le problème était toujours insoluble pour lui. Il finit par se lever, malheureusement insatisfait de ce repérage, sans voir que son étude du bâtiment n'était pas passée aussi inaperçue qu'il l'aurait voulu.

Il entra dans le hall de son immeuble. Un sans-abri s'y trouvait, assis par terre. Il lui demanda une pièce mais Oswald refusa poliment. Soudain, on le saisit par le cou. Quelqu'un s'était caché. Le SDF se leva à la vitesse de l'éclair et asséna un coup dans le ventre au jeune homme. Oswald riposta par un coup de pied bien placé et il frappa la tempe de la personne qui le tenait. Elle lâcha. Il se retourna et vit que c'était une jeune fille. Sans hésiter, il lui décocha un crochet du gauche dans la joue avant de se retourner pour mettre un coup de pied au visage du faux SDF. Il regarda la scène en reprenant son souffle. Puis on lui asséna un violent coup au crâne. Et il s'effondra.

Noir.

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